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Take Shelter (Jeff Nichols, 2012)

Par Doorama
Take Shelter (Jeff Nichols, 2012) Curtis fait d'étranges cauchemars, où les tempêtes qui les habitent sont annonciatrices de perturbations bien plus inquiétantes encore que leur violence. Comme autant de signes annonciateurs d'un cataclysme à venir, Curtis perd progressivement pied avec la réalité. Pressentiments ou premiers signes de folie, son comportement irrationnel fragilise son couple déjà bien éprouvé par la maladie de leur fille...
Entre fantastique et drame psychologique, Take Shelter évoque le meilleur de M. Night Shyamalan et nous rappelle immanquablement la nature de Terence Malick ainsi que les frémissements météorologiques de La Dernière Vague de Peter Weir. Imaginaire ou pas, la grande tempête de Take Shelter envahit et entoure le spectateur, imposant un air chargé d'humidité et d'électricité.
Tels des animaux au comportement influencé par une catastrophe imminente, Curtis et Samantha n'agissent plus comme à l'ordinaire. Leur couple doit pourtant rester uni pour affronter la surdité de leur fille, mais cette période difficile qui doit focaliser toute leur énergie se voit troublée par le comportement inhabituel de Curtis. Suivrait-il les traces de sa mère, atteinte de schizophrénie aigüe passé ses 30 ans ? Ses cauchemars sont-ils des prémonitions à écouter attentivement ? Dans le doute, inquiet par l'idée de devenir fou et perdre sa famille, obsédé aussi à l'idée de la protéger en réaménageant le vieil abri anti-tempête de son jardin, le comportement de Curtis met en péril son couple, son emploi et la situation économique de sa famille. L'urgence de protéger sa famille coûte que coûte risque aussi de la lui ôter...
C'est ce dilemme qu'explore Jeff Nichols dans Take Shelter. S'écouter ou écouter les autres, affronter la solitude d'une décision qui ne peut se prendre que seul, tant elle ne sera pas comprise de l'autre, le doute qui le ronge... : Take Shelter décrit avec une grande finesse la solitude et la souffrance de Curtis, il s'attaque parallèlement à décortiquer son impacte sur son couple, avec une finesse encore plus grande, une souffrance plus palpable encore. Take Shelter est un film en équilibre fragile, mais parfaitement tenu, entre thriller fantastique et drame psychologique. Sa nature humide semble sans cesse écraser le logis familial par son omniprésence, voire le menacer. Projection imaginaire de son esprit ou bien premier signe d'une fin du monde imminente, Jeff Nichols, dans les deux cas permet au spectateur de choisir l'expérience qu'il préfère, chacune d'elle étant parfaitement palpable, lisible et ciselée. Par son ambiance presque schizophrénique entre hallucinations et réalité, Take Shelter impose son rythme lent et met fait peser une pression constante sur le spectateur.
Visuellement magnifique avec sa nature si calme et verdoyante, mais pourtant tellement menaçante, Take Shelter nous embarque dans son doute et son incertitude sans jamais nous imposer aucune de ses passionnantes propositions. Que ce soit Michael Shannon ou Jessica Chastain (que nous avons respectivement découvert récemment dans Premium Rush et Des Hommes Sans Loi), ils donnent à leur personnage toute la subtilité nécessaire pour nous faire accepter chacune des propositions de Take Shelter. Contemplatif, inquiétant, inquisiteur et interrogateur sur la société américaine qu'il met en scène, Take Shelter se révèle passionnant de bout en bout. Take Shelter aborde sa fin du monde en commençant par la destruction de ses repères les plus importants, comme la famille, l'épanouissement de l'individu, et nous livre ainsi une superbe vision, belle et intense d'une fin possible. Atypique et inspiré, Take Shelter envoûte... l'expérience est presque sensuelle : on applaudit des deux mains devant le fond et la forme du film de Jeff Nichols.
Take Shelter (Jeff Nichols, 2012)

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