« Bien des lecteurs dont l’éducation littéraire est achevée considèrent avec stupeur les « Greguerías ». Ils ne comprennent pas de « quelle façon elles sont une surprise ». Ils y cherchent d’instinct une « maxime », une « pensée », une épigramme. Ils s’attendent à y trouver de « l’esprit », un bon mot, une réflexion morale ayant un caractère universel et permanent. Ils cherchent « la pointe ». Et, comme ils ne trouvent rien de tout cela, la « greguería » leur paraît un défi au bon sens, une naïve platitude, le comble du trivial, la chose, entre toutes, qui ne valait pas la peine d’être écrite. »
Valery Larbaud, en 1919, à propos des Greguerías de Ramón Gómez de la Serna.
Non seulement elles valent la peine d'être écrites, mais encore plus d'être lues (et donc éditées par les passionnés des éditions Cent pages). Un livre gratuit et inutile, c'est-à-dire aucunement utilitaire : n'est-ce pas la plus belle définition d'une œuvre d'art ?
Quant à ces lecteurs qui auraient achevé leur éducation littéraire, il doit s'agir de ceux qui ne lisent plus, jugeant sans doute que cela ne leur sert à rien. Nous ne finirons jamais de lire, il y aura toujours de quoi nourrir notre boulimie. Nous n'achèverons jamais notre éducation littéraire : elle n'en a pas besoin.