Chemin des Âmes du Purgatoire

J’ai envoyé mes vœux de bonne année. Comme tous les ans, dès les premières heures de l’année, les cartes et les emails ont été expédiés aux quatre vents.

D’anciens lecteurs attentifs pourraient s’étonner que j’utilise l’email pour cette occasion car j’ai le vague souvenir d’avoir écrit ici que je condamnais la méthode, préférant la carte manuscrite qui perpétuait une tradition et, coup double, donnait du boulot aux postiers, un métier en voie de disparition. Il n’y a que les imbéciles qui ne changent pas d’opinion diront certains, ou la fainéantise qui gagne du terrain répliqueront les autres. Actuellement, j’en suis à la phase où je ménage la chèvre et le chou, utilisant emails et cartes à la fois, selon les destinataires. 

Pour les anciens, souvent de vieux parents, j’utilise la carte. D’abord, parce qu’ils n’ont pas d’ordinateur et d’adresse email, une raison suffisante en elle-même. Ensuite, parce qu’une carte dans leur boîte aux lettres égaiera ce désert habituel et qu’ils pourront la conserver quelques jours sur le buffet de la salle à manger, preuve matérielle qu’ils ne sont pas oubliés.

Quant aux autres, plus jeunes ou se fichant complètement de cette tradition des vœux, un email fera l’affaire. La carte à peine lue aurait filé à la poubelle, autant leur simplifier la vie et la mienne. Un message électronique et comble du luxe pour certains élus, je double mes vœux par un SMS court et net. Je respecte les codes de courtoisie élémentaire et je passe – pour ce que je ne suis pas – un mec à la page et à la pointe des technologies modernes. Yes I Can !

Et pourtant. Et pourtant, parmi les cartes envoyées par la Poste, l’une d’elle était expédiée à Antibes, chemin des Âmes du Purgatoire, quelle magnifique adresse sur l’enveloppe. Quel email ou SMS pourra jamais rivaliser avec ce charme désuet, consistant à envoyer un pli, aussi court soit-il, à une destination aussi poétique.