Qui n’a jamais posé, comme à chaque début d’année, ses « bonnes » résolutions, avec, cette fois-ci, la ferme intention de s’y tenir ? Pourtant, immanquablement, tous les ans, nous recommençons. Et si, justement, la démarche ne consistait pas à poursuivre nos résolutions coûte que coûte, mais plutôt à réfléchir à ce que l’on aimerait réellement changer.
Chaque début d’année, nous nous promettons plus ou moins les mêmes choses, nous décidons de changer certaines de nos habitudes, nous nous fixons des objectifs. Mais, pour la plupart d’entre nous, ces souhaits passent rarement le cap de la mi-janvier. J’ai demandé leurs points de vue à trois professionnels en développement personnel, afin de comprendre pourquoi nous sommes si nombreux à faire des projets en début d’année, pourquoi il est souvent difficile d’amener à bout ces résolutions et comment, enfin, rendre tangibles nos aspirations.
Pourquoi avons-nous tendance à prendre des résolutions en début d’année ?
Nicolas Proupain : La fin de l’année calendaire est également la fin d’un cycle biologique. Le solstice d’hiver, le 21 décembre, est la nuit la plus longue et représente le terme d’une année avant la renaissance. Cette « mort » résonne avec la peur inconsciente de notre propre mort et le sentiment de ne pas avoir fait ce qui nous est essentiel. Il n’est alors pas étonnant que de si nombreuses personnes ressentent le besoin de faire des changements au cours de cette période de transition.
Caroline Lambert : Effectivement, la fin d’une année est une date butoir, où beaucoup d’entre nous en profitent pour dresser un bilan du passé. Cela génère également un nouvel élan où l’on va se projeter dans un futur agréable et décider certains changements que l’on aimerait faire.
Gregory Sevilla : Au fil de nos progrès et de notre évolution personnelle, nous vivons, comme toute chose dans l’univers, selon une logique cyclique. Nous avons tous, en effet, conscience de passer par diverses phases, états d’être ou problématiques de vie. Ainsi, comment se fait-il, qu’à certains moments, nous remettons en question notre « routine » et prenons de nouvelles résolutions ? Que cela se passe en fin d’année, comme c’est souvent le cas, ou à tout autre moment important de notre vie, nous réalisons durant ces périodes de transition que nous en avons assez et que nous aspirons à changer ou transformer quelque chose en nous ou à l’extérieur de nous.
Pourquoi, dans la majorité des cas, retombe-t-on dans « la routine » avec un certain sentiment d’impuissance ?
N. Proupain : Parce que beaucoup de personnes n’ont pas suffisamment de visibilité sur leurs vraies valeurs. Leurs résolutions naissent de la recherche d’un idéal plutôt que du désir de faire ce qui est important pour eux. On veut faire du sport pour ressembler aux jeunes femmes des magazines, on décide d’arrêter de fumer pour faire plaisir à nos proches, on se promet de passer plus de temps à lire pour être cultivé, et ainsi de suite. En d’autres termes, on s’injecte des valeurs extérieures. Pourquoi agissons-nous ainsi ? Parce que la majorité des gens s’attache au regard des autres dans le souci d’être accepté et aimé, quitte à négliger ce qui important et vrai pour eux. Invariablement, ces changements que l’on veut mettre en place génèrent alors du stress ce qui, dans la plupart des cas, nous amène à y renoncer.
C. Lambert : Dans bien des cas, les résolutions restent du domaine du rêve, plutôt qu’un projet concret. Avant même le 31 janvier, on abandonne notre objectif auquel nous n’avons d’ailleurs jamais vraiment cru : « Si je n’y suis pas arrivé dans le passé, pourquoi le pourrais-je maintenant ? » Il y a trois raisons à ce manque de succès. Tout d’abord, le souhait est rarement suivi d’une mise à l’action. Ceci est souvent dû à des blocages et à des peurs inconscientes. Ensuite, la personne n’est pas efficacement soutenue dans son projet. Enfin, l’individu ne prend pas en compte les obstacles potentiels qui peuvent se présenter.
G. Sevilla : La perception de notre qualité de vie (le rapport entre ce que nous vivons et ce à quoi nous aspirons) crée le désir plus ou moins conscient de mettre en oeuvre des stratégies (nouvelles résolutions) afin de nous rapprocher de notre idéal de vie. Mais nos résolutions ne tiendront pas, tant qu’elles seront seulement l’objet de nos multiples personnalités et masques, influençables par l’autre et les circonstances extérieures. Nos résolutions ne pourront nourrir durablement nos actions présentes et à venir que lorsque notre personnalité authentique en aura été l’instigatrice.
Comment faire pour concrétiser un objectif ?
N. Proupain : Les résolutions « non justes » sont souvent associées à l’impression de sacrifice ou d’effort. Alors que, lorsque l’on se lève le matin pour faire des choses qui nous inspirent, que l’on aime, l’action devient naturelle et sans effort, donc sans raison de s’arrêter. L’essentiel est de déterminer ce qui est vrai et juste pour soi, ce que nous aimerions vraiment. L’important n’est pas de savoir comment suivre nos résolutions, mais plutôt d’identifier celles que nous souhaitons réellement vivre. C’est seulement ainsi qu’un changement fondamental peut avoir lieu dans notre vie, et cela bien au-delà de la nouvelle année : celui d’une nouvelle vie.
C. Lambert : Pour qu’une résolution ne reste pas un souhait et se concrétise, il est nécessaire qu’elle suive l’acronyme SMART. L’objectif doit être Spécifique, Mesurable, Atteignable, Réaliste et réalisé dans un certain Timing. Une jeune femme est venue me consulter avec le désir de « changer ma vie car je ne suis pas bien ». Ne sachant pas vraiment quoi faire, elle n’est jamais passée à l’action. De plus, à chaque fois qu’elle entreprenait un changement, la résistance de son entourage, son principal obstacle, l’amenait à douter et à rebrousser chemin. Je l’ai aidée à préciser sa demande. « Je veux changer » est devenu « je veux avoir plus confiance en moi », puis « j’aimerais pouvoir dire non à mes beaux-parents ». En clarifiant d’avantage, un objectif mesurable et atteignable a fait surface : «Je désire créer ma boîte.» C’est ainsi qu’on a pu, avec cette personne, mettre en place de réelles stratégies afin de concrétiser ce souhait.
G. Sevilla : La clé de la réussite : être authentique et se rapprocher de notre moi profond, celui qui ne doute pas, celui qui aime. Certains penseront que tout ceci n’est que chimère pompeuse ou ésotérisme. D’autres seront inspirés par de telles affirmations. Si nous souhaitons nous tenir à nos objectifs, quels qu’ils soient, et les réaliser, qu’il s’agisse de résolutions annuelles ou de projets bien précis, il faut trouver comment aimer plus que tout au monde les fruits qui pousseront de leurs accomplissements.
Article de Moutassem Hammour initialement publié dans Vitalité et Bien-être, Hivers 2007.