Dépêche de l'AFP du 2 avril 2008
Des fouilles inédites depuis près d'un demi-siècle tentent de comprendre pourquoi, il y a cinq milliers d'années, des centaines d'hommes préhistoriques ont fait des efforts démesurés pour ériger le site mégalithique de Stonehenge, dans le sud de l'Angleterre.
Ce ne sera bientôt qu'un fossé de 3,5 m de long et profond de moins d'un mètre, mais le site de fouilles de Stonehenge, entamé mardi, pourrait détenir la clef d'un mystère vieux comme le monde. "C'est la première occasion d'utiliser l'archéologie scientifique pour se pencher sur un problème qui a occupé les esprits depuis le Moyen-Age" : Timothy Darvill, responsable de la chaire d'archéologie à l'Université de Bournemouth (sud), s'intéresse à Stonehenge depuis son enfance. Mais jamais il ne s'est senti aussi proche de comprendre le pourquoi et le comment d'un des alignements de menhirs les plus importants au monde, classé au patrimoine mondial de l'Unesco en 1986.
Vers 2.600 avant Jésus-Christ, des centaines d'hommes, voire des milliers, érigeaient 80 menhirs sur un plateau où avait déjà été creusé 400 ans plus tôt un fossé circulaire. L'alignement était perfectionné vers 2.400 avant J.C. : des pierres encore plus gigantesques étaient dressées au centre du site, toujours en cercle. Aujourd'hui, sur la plaine d'herbe grasse de Salisbury, battue par les vents, seuls 40% du site subsiste. Mais la majesté des 17 menhirs restants, surmontés de six linteaux, attirent 850.000 visiteurs par an. Les blocs de grès, pouvant peser jusqu'à 45 tonnes, avaient été amenés d'une carrière située à plus de 30 km de là. Comment? On ne le sait pas vraiment. Des études ont montré qu'il aurait fallu jusqu'à 600 hommes pour les tirer. Reste également à savoir exactement de quelle manière on a pu poser, au sommet de ces menhirs hauts de six à sept mètres, des linteaux de pierre pesant eux aussi des tonnes. Au Moyen-Age, on y voyait la main de Merlin l'Enchanteur, voire du diable. De nos jours, certains évoquent la thèse d'une intervention extra-terrestre.
Mais, plus que le comment, c'est le pourquoi qui interroge les experts. L'alignement du site, en direction du lever du soleil lors du solstice d'été, a nourri la théorie d'un observatoire préhistorique. On évoque également la possibilité d'un temple sacrificiel, voire druidique. "C'est un puzzle, un rébus", admet Timothy Darvill. Le professeur a une autre théorie. Autour du cercle de Stonehenge ("pierres debout" en vieil anglais), ont été enterrées de nombreuses personnes mortes de maladies. Au centre du site, se trouvaient de plus 80 "pierres bleues", des menhirs dont la couleur particulière avait fait croire à leurs vertus thérapeutiques. Le professeur Darvill en conclut : "Stonehenge était un temple dédié à la guérison, une sorte de Lourdes préhistorique". Mais l'expert sait qu'il doit encore en apporter la preuve. D'où ses fouilles, les premières depuis 1964. Les travaux cherchent à retrouver des "fragments de pierres bleues" et à voir s'ils ont été soigneusement découpés en vue d'être emportés comme une sorte de talisman guérisseur, explique Liam Wolley, étudiant en archéologie, tout en nettoyant à la brosse à dents des éclats de roches dans une bassine d'eau boueuse.Les fouilles ne doivent durer que deux semaines, jusqu'à la mi-avril, mais l'analyse des prélèvements prendra "probablement six mois", avertit le professeur Darvill. Mais, même si les échantillons confirment la thèse du site guérisseur, il ne s'agira encore que d'un "élément de preuve", reconnaît-il. Stonehenge gardera toujours une part de secret."
Source : Entre guillemets.(merci à Tuttiquanti).