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Grand prix de l'urbanisme 2012 ou la règle en question

Par Villefluctuante

Quels enseignements tirer de la cérémonie de remise du Grand prix de l'urbanisme qui s'est déroulée le 20 décembre 2012 à la cité universitaire de Paris? Rien de vraiment nouveau mais plus que jamais le projet est mis en avant comme processus, la règle est remise en question et la gouvernance devient fondamentale comme l’ont montré les discussions des trois ateliers qui se sont succédés au cours de l'après-midi.

De la règle

L'urbaniste François GRETHER était le grand prix de l'urbanisme 2012. Son passé à l'Apur a façonné sa pensée et il dit entretient un rapport décomplexé à la règle en militant pour sa simplification. Il a rappelé à ce titre qu'au XIXe siècle la règle d'urbanisme ne dépassait pas quelques pages (cela mériterait d'être vérifié) alors qu'aujourd'hui elle s'écrit dans d'épais documents. La question est de savoir comment la règle issue de la planification urbaine peut produire de la qualité et pourquoi une règle simple serait libératrice ? Si la règle joue un rôle de régulation, la thèse défendue par François GRETHER était que la règle se doit d'être aussi fédératrice pour produire de la valeur. L'exemple donné par le paysagiste Loïc MARECHAL (agence PHYTOLAB) est éclairant sur la question de ce changement de tendance : lors de la révision du secteur sauvegardé du 7eme arrondissement menée par A.U.P., les nombreux espaces boissés classés - nés parfois d'un manque d'entretien ayant laissé pousser une végétation autochtone - ont été remplacés par l'obligation de maintenir ces espaces en pleine terre. La contrainte laisse donc place à une mesure conservatrice. Les intervenants ont clamé la main sur le cœur que le copier-coller et le recours à des stéréotypes réglementaires furent néfastes à la planification urbaine et qu'il convenait dorénavant de mettre en avant la notion de projet allant au-delà des procédures. On assigne donc dorénavant au projet la maîtrise de la grande échelle en lieu et place de la planification.

L'innovation ne peut venir ni des règlements ni des benchmarks. L'appel à projet, comme dans le cas de la Ville de Paris sur l'immobilier numérique, incite les créateurs à faire des réponses sur mesure.

Du projet et de la gouvernance

Les discussions des trois ateliers ont à chaque fois déviées sur la gouvernance. Premièrement, la gouvernance vue au cœur même des projets et de leur conception. François GRETHER rappela comment l'opération de Clichy-Batignolles avait donné lieu à des macro-lots d'aménagement et des "groupes projet" agissant comme des ateliers communs de conception pour faire converger les différents projets architecturaux. Ensuite, l'exemple de la rénovation urbaine fut pris pour démontrer qu'il était pertinent de réunir les acteurs techniques et institutionnels d'un territoire au sein d’une gouvernance unique pour se porter efficacement au chevet des quartiers dégradés. Enfin, le rôle de la population a bien entendu été abordé avec l'exemple de la reconquête des bords de la Maine à Angers. La population a été longuement concertée pour façonner un projet fédérateur. D'autres fois, ce sont les élus qui sont réunis en groupes projet, comme dans le cas de l'agglomération nantaise, pour forger des positions communes sur des thématiques telle que la forme urbaine et ces dispositif donnent lieu à l'élaboration de chartes ou de guides sans portée réglementaire mais devant être pris comme recommandations. L'enjeu ici n'est pas d'imposer mais d'accompagner et de stimuler.

Le Grand Paris a naturellement été un sujet polémique, Mireille FERRI (conseillère régionale d’Île-de-France,Vice-présidente de l'Institut d'aménagement et d'urbanisme de la région d'Île-de-France) théorisant la communauté d'actions au-delà des limites administratives en mobilisant les forces sociales du territoire. Pour elle, on peut agir sans gouvernance, à savoir sans nouvelle institution, en créant des expérimentations à partir d'une démocratie de projets. Tous les intervenants semblaient d'accord avec l'idée que le projet partagé, co-construit avec les citoyens, surmonte les clivages politiques, institutionnels et réglementaires. Le modèle fédéral des pays nordiques à été mis en avant comme antidote aux dysfonctionnement d'une vision hiérarchisée où seules les grandes villes auraient leur mot à dire. Cela parait terriblement naïf mais l'urbaniste a le cœur pur.

Le géographe Marcel Roncayolo, invité d'honneur, a alors posé une question essentielle en s'étonnant de la différence observable entre les intentions et les actions des urbanistes. Pour illustrer son propos, il a repris l'exemple des grands essembles projetés initialement à partir du modèle des cités jardins pour un résultat bien différent. Cet engouement pétri de bon sentiment pour le projet et son caractère fédérateur, qui vaut déchéance de la règle, tiendra-t-il longtemps?

Et l'Etat dans tout cela? Il a parfaitement joué son rôle de stratège, feignant de ne pas y toucher, annonçant qu'il n'était que organisateur de l'événement alors qu'en fait il travaillait à bras le corps l'urbanisme de projet. Faite croire à autrui qu'il est l'auteur de la solution que vous lui tendez et vous maitriserez l'art de la persuasion.


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