Deuxième jour sur l’île démoniaque. Chaleur humide et dépaysement garanti.
Je décide de louer un vélo (VTT à 25 000 IDR la journée en face du Wahyu) au petit matin pour aller à la mangrove, au nord-est de Lembongan. Après le Wahyu, les hôtels se font de plus en plus rare pour devenir inexistants sur toute la côte sud. Quelques échoppes jonchent la route et de nombreux locaux s’affairent à leurs algues sur la plage (ils la cultivent pour en faire je ne sais quoi, désolée je n’ai pas demandé).
Je fais un premier stop photo chez Nyoman’s warung pour la photo, un petit resto recommandé par le routard. Effectivement, l’endroit est paisible et le bar agréable.
Je continue pour m’arrêter à un temple devant lequel vit un arbre aux fleurs rouges absolument splendides (ça me fait penser au manga L’Orme du Caucase, sa beauté, son histoire que j’imagine, cet amour qu’il inspire…)
Je continue au bout de la route nord de la mangrove qui finit en cul-de-sac. Ca m’a fait rire cette petite place avec un banc de sable au bout duquel trône la pancarte de la pétanque
Ce jour là, il devait y avoir une réunion car une trentaine d’hommes dont des policiers étaient rassemblés sous un toit et assis sur des chaises à écouter parler un autre.
Au bout de la mangrove, je fais demi-tour pour reprendre la seconde division de route. J’ai déjà chaud. Je m’arrête prendre mon Minute Maid, épuisée après seulement 30 minutes vélo. La dame et ses deux fils s’asseyent avec moi, le petit pouffe de rire et se cache parfois, mais nous ne parlons pas. C’est juste gentil.
Je me dis que la mangrove est sympa mais que je pourrais continuer à rouler la journée tant qu’à faire. Me voilà donc partie pour le Suspension bridge, le fameux pont jaune qu’on voit sur toutes les brochures touristiques.
Je passe par la forêt silencieuse, sur l’asphalte bien lisse et ne croise que quelques scooters, un jeune homme et un petit camion.
J’ai vraiment très chaud.
Je finis par arrivée au pont, toute dégoulinante à deux doigts de m’écrouler (je n’avais pas d’eau). Je m’assois à la seule épicerie du coin et n’ai même plus la force de me lever pour aller chercher ma bouteille d’eau. Je reste là 30 minutes immobile à regarder les travailleurs décharger les petits bateaux, à écouter les locaux se raconter des histoires. Sans exagérer, j’étais là sans plus avoir de conscience de moi-même.
Mes esprits repris, je regarde le pont. Entre nous, je me suis dit « Tout ça, pour ça ?! » ! Lorsque l’on est pas dessus, on se demande l’intérêt qu’à ce pont mais dès qu’on l’emprunte, on comprend mieux (c’est peut-être tout subjectif). Des lattes de bois servent de chemin entre toute cette ferraille jaune, parfois avec de sacrés écarts, ça donne un côté sensationnel à la traversée (uniquement réservée aux piétons, vélos et scooters). Une fois dessus, on voit cette eau turquoise magnifique et on a une vue assez surprenante de part et d’autre. Sur la droite, on voit l’océan, sur la gauche l’océan aussi mais on dirait davantage un lac, le paysage est totalement différent (il faut y être pour comprendre) ; derrière moi, la belle Lembongan, devant moi, la sauvage Ceningan.
Roues sur Ceningan, je prends à droite en espérant rejoindre Blue Lagoon (je n’en avais jamais vu, c’était l’occasion) qui, sur le plan, ne me paraissait pas trop loin. Je roule, je marche, je monte, je m’arrête au bord des chemins, je roule, je descends, je marche, je monte, je roule… Une bonne heure comme ça en suivant la pancarte du Jumping point. Empathiques, des femmes me sourient, d’autres m’invitent à prendre mon temps et souffler. Les hommes eux, se demandent visiblement ce qui ne va pas chez moi.
Ceningan est le coin le moins adapté aux touristes que j’ai rencontré. 4 ou 5 homestay rencontrés, pas plus. Ici, cela appartient aux indonésiens, c’est une vraie vie de village, pas déformée par nous autres. C’est authentique (je n’aime pas ce mot car après tout, on ne sait pas à quoi l’endroit ressemblait dans son état initial).
J’arrive à Blue Lagoon où un homme qui m’avait proposé de me prendre en scooter me demande 5000 IDR pour entrer sur cette zone déserte. C’est Made, le « propriétaire » dit-il. Je laisse mon vélo à l’entrée et continue à pieds. C’est majestueux. La mer est puissante, indigo, profonde, libre. Il y a 4 bungalows vides apparemment sur le terrain.
Au bout du chemin, il y a le Blue Lagoon Cliff Jumping, Made m’y attend déjà. Une japonaise est au rocher des 7 mètres pour sauter dans le lagon mais, visiblement, ça fait un moment que tout le monde attend qu’elle saute… je la regarde, amusée et me demande pourquoi les gens s’imposent tant de pression. Si cela génère trop de peurs chez toi, ne sautes pas ma cocotte ! Sur le terrain de Jumping point, il y des sortes de cratères au sol, c’est assez bizarre.
Je demande à Made de me faire un truc à manger, n’importe quoi. Il n’a que des nuggets et des frites, ça fera très bien l’affaire. On discute un peu. Il a 37 ans et sa famille habite à Ceningan depuis toujours. Il est divorcé et vit avec son fils Komang qui doit avoir une dizaine d’années. Made a un iPhone 4S et un Nokia Lumia, il est over connecté et prend des photos et vidéos à tout bout de champs. Il me montre les sauts des touristes et se rappelle de la nationalité de chacun. Il me raconte que les bungalows appartiennent à un français, Fredo, dont le métier est de construire à Bali. C’est aussi son boss.
Au retour, je ne me sens pas de pédaler jusqu’au Wahyu, je demande donc à Made de m’accompagner jusqu’au pont jaune. Il propose que son fils prenne mon vélo contre quelques roupiah pour s’acheter des pétards à l’approche du réveillon. Il ne me reste que 20 000 sur moi, je les lui donne. Sur son scooter ultra-tunné (pot d’échappement arc-en-ciel, siège en cuir beige et capitonné de boutons dorés par exemple), nous suivons Komang qui peine rapidement à pédaler (le vélo était bien trop grand pour lui). Heureusement, nous croisons un copain à lui qui prend le relai. En chemin, nous nous arrêtons chez Made qui me montre les 5 bungalows et la piscine qu’il est en train de construire. Ce sera prêt en avril prochain me dit-il pour un prix autour de 400 000 la nuit « but maybe free for you ! » !
Made et les garçons me déposent au point jaune, à la fin du chemin de terre, encore dans la brousse. Ils sont adorables…
Me voilà donc repartie avec mon vélo et là, les choses ont été beaucoup plus compliqué qu’à l’aller. Je me suis perdu dans la jungle (un sale môme m’a indiqué le mauvais chemin), j’ai fait rire tous les jeunes que je croisais (c’est sur une nana seule avec son vélo, les jambes pleines de boues et le t-shirt trempé de sueur…), je n’ai plus compté les immenses pentes, la chaine de mon vélo s’est pétée (j’ai fini la dernière heure à pieds), je me suis fait sacrément piqué par des bêtes et j’ai croisé un cortège d’enterrement ! Mais, je suis finalement arrivée à bon port pour enfin m’écrouler deux heures de sommeil !
J’ai adoré ma journée, mais j’ai regretté de ne pas savoir faire de scooter, tout aurait été beaucoup plus facile (je revois ces nanas derrière leur copain, toutes cleans, bien coiffées et fraîches).
Mes conseils pour une journée de vélo :
- Tester le vélo avant de partir en changeant les vitesses (c’est ce qui a fait dérayer mon vélo)
- Boire tout le temps (vous transpirerez tellement que vous n’aurez pas besoin d’aller au petit coin)
- S’arrêter souvent
- Prévoir un peu de monnaie pour rentrer à vôtre hôtel en scooter si vous être trop crevé
- Avoir une batterie de rechange pour votre appareil photo