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La Balade Sauvage (Terence Malick, 1973)

Par Doorama
La Balade Sauvage (Terence Malick, 1973)  Kit vit de petits boulots en petits boulots. Lorsqu'il rencontre Holly, le père de celle-ci ne voit pas du tout d'un bon oeil leur relation amoureuse, presque fusionnelle. Quand Kit vient prendre les affaires de Holly pour partir avec elle, Kit tue son père. Ils s'échappent ensemble, et commence alors une virée amoureuse qui sera aussi une virée meurtrière.
Jusqu'à Tree Of Life, Terence Malick faisait partie, avec Kubrick, de ces réalisateurs aussi adulés que rares, avec seulement 5 films en 40 ans de carrière... (et là, 3 films en cours !).  En réalisant La Balade Sauvage, il signe son premier long métrage, et sa première Oeuvre aussi. Cavale folle et vaine, Ballade Sauvage surprend et étonne encore aujourd'hui...
Dans les 70's, alors que le cinéma américain se découvrait, depuis la fin du code Hayes, un gout pour le percutant, le social et l'autocritique, La Balade Sauvage de Terence Malick se détache très distinctement de cette mouvance en mettant en image violence, amour et liberté sous un angle atypique. Kit et Holly se révoltent contre un système qui leur refuse l'amour et entament une balade remplie de rêves d'idéaux et semée de morts, mais Malick ne cherche pourtant aucun responsable à cette tuerie, ni ne souhaite délivrer de message ou de morale autour de la violence qui habite La Balade Sauvage. Ce qui l’intéresse est ailleurs et alors que la Balade Sauvage pourrait aisément dégager des constats ou des symptômes sur l'état de la société américaine, il se refuse à le faire, préférant choisir un angle plus contemplatif et poétique, préférant laisser la possibilité d'une lecture personnelle intime, en relation avec la vision de l'universel et du cosmos du spectateur.
La Balade Sauvage n'est pas une variante ou une alternative à Bonnie And Clyde, en dépit de son couple meurtrier en cavale et de sa fin tragique, il parle de l'ordre des choses, de leur place. Que ce soit sa violence ou ses ressorts dramatiques, ils sont secondaires dans le film de Malick car ce qui prime, c'est ce le cadre qui les accueille, son point de réflexion se concentre sur la nature de l'homme et sa remise en perspective dans ce grand ordre des choses, dans cette Nature où nous évoluons. La balade de Malick, en s'appuyant sur la jeunesse de ses personnages, Kit à 25 ans et Holly 15, nous parle d'innocence, d'aspirations et de rêves, il raconte des natures (même immatures) qui s'expriment. C'est donc tout naturellement que Malick immerge son histoire dans un contexte infiniment plus grand, comme pour la relativiser et faire apparaître ses maladroites articulations, comme pour réduire le parcours ultime de ce couple à une simple goutte d'eau prenant place dans un océan. La Nature selon Malick n'est qu'un révélateur, c'est aussi la grande matrice dont chaque chose participe, bonne ou mauvaise.
Remis à échelle humaine, le parcours du couple meurtrier laisse dubitatif... Holly qui ne semble pas broncher à la mort de son père, leur déphasage immature avec le reste du monde, l'intensité molle de leur amour... Malick contemple ce jeune couple comme de la même manière que les premiers pas d'un chaton  avec ce regard à la fois distant, parce que ce n'est qu'un "dysfonctionnement normal", et à la fois fasciné parce que l'amour le vrai, étonne toujours. Avec La Balade Sauvage Malick inaugurait ces allers-retours entre l'infiniment grand et l'infiniment petit... La mise en perspective perpétuelle entre Nous, nos petites aventures, et celles plus grandes. A force, le vertige apparaît... Les concepts se mélangent, s'opposent et pourtant se ressemblent tellement, participant toutes du même ordre. Malick mieux que personne ne sait utiliser ces contrastes, et surtout mieux que quiconque il sait en saisir la poésie et la beauté. La Balade Sauvage est des cette trempe, il touche à ce grand Tout par ses petits détails, il entre en harmonie avec nous, éveille un écho en nous que nos sens perçoivent. Qu'elle est belle cette dérive de l'amour vers la violence, qu'elle est étonnante cette vision de l'innocence, qu'il est inspiré ce langage cinématographique là ! Une fois dit tout cela, La Balade Sauvage, si universelle ou cosmologique soit elle, peut aussi paraître datée... Mais bon, on dit ça, on n'a rien dit...
La Balade Sauvage (Terence Malick, 1973)

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