Journal d’un intervieweur séquestré : épilogue.

Publié le 26 décembre 2012 par Legraoully @LeGraoullyOff

Ici Brest, les Bretons parlent aux Lorrains ! Vous le savez, notre collaborateur Renan Apreski est libre depuis dimanche dernier ; il est donc temps d’en finir avec cette étape de sa carrière qui, à n’en pas douter, l’a durablement marqué…

MERCREDI 26 DÉCEMBRE : Il est toujours bien mélancolique, ce jour du 26 décembre : les réjouissances de Noël sont finies et bien finies, il faut se résigner à ne plus pouvoir les revivre avant un an. Les décorations font les prolongations pour nous accompagner jusqu’à la Saint-Sylvestre, mais le nouvel an, ça n’a pas la même magie. En même temps, après avoir passé toute une année à magnifier la fête de Noël, on ne peut s’empêcher de ressentir comme une petite pointe de déception, comme si la réalité de ce qu’on a fêté n’était jamais à la hauteur du fantasme qu’on avait laissé mûrir pendant plus de onze mois. Après tout, faire un repas avec sa famille et s’offrir des cadeaux, si on enlève le décorum lié à la tradition, même si c’est toujours agréable, ça n’a rien de franchement exceptionnel… Ferais-je une sorte de déprime post-coïtum, Noël se substituant au coït ? C’est tout de même navrant, après un mois et demi de captivité, que je ne trouve rien de transcendent à ce dont j’ai bien failli être privé ; finalement, ce n’est pas vrai, que les expériences nous transforment : j’ai connu de bien plus grands malheurs dans ma vie que mon enlèvement, à commencer par la mort prématurée de ma mère, et ça ne m’a jamais aidé à relativiser les pépins de la vie. Si j’avais une plus grande famille, qui ne se réduirait pas à mon père veuf et à ma grande sœur célibataire et qu’il serait donc plus difficile de réunir au grand complet, je donnerais peut-être plus de valeur à Noël ; et si mes ravisseurs avaient été durs avec moi, je donnerais peut-être plus de prix à ma liberté retrouvée. Qui sait ? En attendant, ils ont été si aimables avec moi que je ne peux que tenir les promesses que je leur ai faites, d’autant qu’elle ne me coûtent plus aussi cher qu’avant. Je n’ai pas l’impression d’avoir été fondamentalement transformé, je ne suis pas plus intelligent qu’avant mon enlèvement ; on m’a ouvert les yeux, c’est sûr, et après ? Quant aux émotions fortes que j’ai pu ressentir durant ma captivité, je les redécouvre en relisant mes notes et je suis presque surpris car mes tripes n’en ont pas conservé un souvenir très net : ces émotions vous secouent l’intérieur mais c’est pour mieux disparaître peu après sans laisser de trace. Avant même d’être enlevé, j’ai passé une bonne partie de l’année à m’angoisser pour pas grand’ chose, et découvrir que mon angoisse n’avait pas lieu d’être ne m’a jamais « servi de leçon ». L’expérience vous fait acquérir des connaissances mais elle ne vous transforme jamais complètement, tout comme l’école : c’est peut-être d’ailleurs le sens qu’il faut vraiment donner à l’expression « l’école de la vie ». L’école de la vie, c’est comme toutes les écoles : elle crée finalement peu de professionnels irréprochables dans les moindres détails. Je baille, là, je vais me reposer un peu…

C’est vrai que les fêtes, c’est bien, mais on ne ferait pas ça tous les jours… Allez, salut les poteaux !

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