A propos de De l’autre côté du périph de David Charhon
Omar Sy et Laurent Lafitte
A Bobigny, un matin, des jeunes retrouvent le corps sans vie d’Eponine Chaligny. Etrange coïncidence, la femme du plus grand patron de France a été sauvagement assassinée près d’un tripot sur lequel enquêtait Ousmane Diakhaté (Omar Sy), un flic de Bobigny. Lorsque l’affaire est confiée à François Monge (Laurent Lafitte), capitaine de police au 36 quai des Orfèvres, Ousmane parvient au moyen d’une entourloupe à venir co-enquêter avec lui. Mais entre le très « BCBG »policier parisien et le flic au look « sportwear » de Bobigny, les méthodes comme le style s’opposent. Le caractère aussi. Pas sûr que l’entente ne fonctionne entre les deux hommes. Ni qu’avec ce « duo de choc », l’enquête avance rapidement…
A défaut de faire rire aux éclats, De l’autre côté du périph n’est pas une si mauvaise comédie que cela. A tel point que les commentaires ici ou là des journalistes et des spectateurs paraissent un brin sévères. Certes, le second-long métrage de David Charhon (Cyprien, 2008) ne verse pas forcément dans la nouveauté avec ce duo qui cite explicitement et en permanence Le flic de Beverly Hills ou Le Professionnel de Georges Lautner, certes il n’évite pas non plus des clichés ni des leçons de morale sur la banlieue, mais certaines scènes sont assez réussies comme celle où Monge et Diakhaté interrompent une grande réunion présidée par le plus grand patron de France. Ousmane commence alors une tirade mémorable qui met mal à l’aise son collègue Monge. Une tirade dans laquelle il se moque ouvertement des hôtes réunis autour de la table et critique la tonalité uniformément grise de leurs costumes, leur dégradé presque parfait. Cette scène est une des plus drôles du film sans doute.
Mais il ne faudrait pas non plus surestimer cette comédie. Car De l’autre côté du périph souffre de défauts majeurs. Outre le sentiment que ce duo manque un brin d’originalité et de nouveauté par rapport au Flic de Beverly Hills, la tension fait souvent défaut à une mise en scène pas assez enlevée pour soulever le rire en continu ni l’enthousiasme du spectateur. Dans une bonne comédie, les scènes comme les évènements doivent s’enchaîner rapidement sans donner néanmoins le sentiment que la mise en scène est bâclée. Ici, l’action est un peu laborieuse comme les dialogues. On a souvent l’impression que tout en essayant d’éviter les clichés sur la banlieue, Charhon se rattrape avec une morale bien pensante qui ne peut l’empêcher de verser dans la maladresse voire une certaine démagogie. La salle de spectacles « Georges Moustaki » dont Ousmane parle à Monge et qui n’a jamais vu le jour à Bobigny, alors que tout l’argent de la culture est alloué aux salles parisiennes, est un exemple de cette maladresse et de cette démagogie.
Malgré tous ces défauts, malgré le fait qu’Omar Sy nous refasse le coup des pas de danse qu’il maîtrisait déjà à merveille dans Intouchables, on suit étrangement et non sans un certain plaisir les aventures de ce duo de flics autant aux antipodes que sympathique. Lafitte et Sy s’entendent à merveille et c’est un atout (pas des moindres) qu’il faut reconnaître au film au même titre que la présence de très bons seconds rôles (Zabou Breitman et André Marcon en tête).
Maintenant, on aimerait bien voir Omar Sy jouer des personnages moins caricaturaux au cinéma, qu’il délaisse sa tenue et ce personnage de « caillera »pour camper des personnages plus profonds et plus étoffés psychologiquement. L’acteur de Tellement proches a tout le talent pour franchir un cap et camper des vrais personnages au cinéma. Reste pour les réalisateurs à lui proposer des rôles plus consistants et à sa hauteur. Et plus seulement celui d’un jeune de banlieue stéréotypé que Sy aurait certes et aussi pu refuser sur ce coup-là…
http://www.youtube.com/watch?v=q0F3nABoo8I
Film français de David Charhon avec Omar Sy, Laurent Lafitte, Sabrina Ouazani (01 h 36)
Scénario de Julien War, Rémy Four, David Charhon :
Mise en scène :
Acteurs :
Dialogues :
Compositions de Ludovic Bource :