Nôze - Songs on the rocks (2008)

Publié le 03 avril 2008 par Oreilles

C'est vrai que je vous en fais bouffer, du Nôze, depuis quelques temps. Pas ma faute si les deux allumés aux chapeaux de paille remuent la routine du petit monde électronique à chacune de leurs saillies phonographiques. Comme je vous le disais, non sans excitation, le mois dernier, leur troisième album est déjà sur la rampe de lancement du label allemand Get Physical. Propulsion annoncée pour le 26 avril. Je dois dire que dès les préliminaires, Songs on the rocks a su me procurer une belle érection : c'est exactement l'album que j'attendais, tout aussi foutraque que leur précédent How to dance, mais davantage calibré pour séduire les masses.

Finies ou presque les errances instrumentales et bruitistes, Nôze fait désormais dans la chanson. Comme ils avaient pu le faire sur certains de leurs meilleurs morceaux (« Love Affair », « Kitchen » ou l'imparable « Remember love » - « N°1 techno track of 2007 » d'après le très influent Pitchfork et présent ici plus d'un an après sa sortie en maxi), Nicolas Sfintescu et Ezechiel Pailhes, sans se prétendre chanteurs, donnent de la voix avec une énergie hors du commun, passant de l'éructation façon cancer de la gorge à des choeurs moelleux et funky. Leurs paroles témoignent d'un esprit potache attachant, dénué de toute sophistication, entre incitation à la beuverie (« You have to dance to this / You have to drink all night ») et enfantillages dadaïstes. La palme de l'absurdité revient à « L'inconnu du placard », Vaudeville sonore sans queue ni tête qui décape d'emblée les écoutilles : « Quand je te vois le matin / Mon amour / Tous les jours / Je bois du vin »... Si le duo insiste lourdement dans cette veine paillarde, il se permet cependant un détour par la chanson d'amour, sur le très sensuel « Danse avec moi ». Pour l'occasion, ils invitent la délicieuse Dani Siciliano, souvent entendue avec Matthew Herbert, à chanter en français avec son sensuellissime accent. Et puisqu'on parle d'Herbert, la prod luxueuse de ce titre, avec ses cordes enveloppantes, rappelle incontestablement les grandes heures du magicien britannique, à l'époque où il sévissait sous pseudo Doctor Rockit.


Difficile, par ailleurs, de caractériser le son de Nôze, conglomérrat de micro-house, d'eurodance, de musette, de jazz éthiopien (« Ethiopio »), de chants slaves et de blues (« Childhood blues ») – plus disparate tu meurs... Boris Eltsine, qui nous lit sûrement depuis le paradis des ivrognes, n'aurait certainement pas dédaigné entonner, visage écarlate et haleine au kérozène, les airs russisants de « You have to dance » et « Little bug ». Des titres qui gravitent - je sais, c'est improbable - entre « Le petit bonhomme en mousse », « Kalinka » et la minimale allemande.


Je ne vais peut-être pas me faire des potes en disant ça, mais lorsqu'on voit l'énorme buzz que suscitent des albums médiocres comme le dernier Hot Chip, on ne comprend pas comment des artistes aussi brillants que Nôze peuvent rester aussi confidentiels.


En bref : Deux doux dingues parisiens se brisent les cordes vocales sur des rythmiques minimales avec une paillardise que l'on jugera, au choix, géniale ou affligeante. Un album qui ne ressemble à aucun autre.

A noter : En live, l'hystérie de Nôze est décuplée, comme j'ai pu en juger lors d'un mini-concert à la Bellevilloise. Ne ratez surtout pas leur prochaine apparition, le 16 mai au Bataclan ! Nos amis québecquois pourront quant à eux les voir le 30 mai au festival Mutek de Montréal.

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