On rapporte le déficit au PIB alors que c'est au budget de l’État qu'il faut le comparer. Un objectif de déficit auquel de toute façon personne ne croit plus.
Par Thibault Doidy de Kerguelen.
Citant des sources provenant de hauts responsables au sein de l’exécutif européen et du gouvernement espagnol, le quotidien espagnol El Pais affirme que la France bénéficiera, au même titre que l’Espagne ou l’Italie, d’une année supplémentaire afin de ramener ses déficits sous la barre des 3% du PIB. Ceci, toujours d’après le quotidien espagnol, sera annoncé officiellement début février. Il faut dire que, pas plus que la Commission européenne, personne ne croit plus en la possibilité d’un tel objectif pour 2013.
L’INSEE n’y croit plus
L’INSEE annonce carrément 0,2% de croissance pour l’ensemble du premier semestre 2013 avec une perte de 80 000 emplois productifs et marchands faiblement compensés par les emplois aidés dans le secteur non productif. Le seul espoir de progrès viendrait au troisième trimestre 2013, selon l’Institut, des USA qui verraient leur consommation repartir. Le marché intérieur français serait en récession et les marchés de la zone Euro en stagnation. Pas question, même si la question n’est pas évoquée dans la note de conjoncture, d’espérer 0,8% de croissance en 2013 en France !
Le FMI n’y croit plus
Le FMI , pour sa part, n’hésite pas à mettre les pieds dans le plat, même si ses prévisions ne sont pas si pessimistes que cela. En effet, le Fonds Monétaire International estime que le déficit de l’État, des collectivités locales et de la Sécurité sociale atteindrait 3,5% du PIB en 2013, avec toutefois un déficit « structurel » (ce fameux déficit structurel dont personne n’est encore capable de définir précisément le contenu…) inférieur aux estimations gouvernementales, 1,4% pour 1,6% prévus. À moyen terme, 2017, c’est-à-dire complètement à l’aveugle car je défie quiconque d’être capable de dire qu’aucun événement majeur ne viendra bouleverser les équilibres mondiaux d’ici là, le FMI calque ses prévisions sur celles de François Hollande : un déficit équivalent à 0,3% du PIB.
De toute manière, parler en pourcentage sur le PIB est un mensonge !
De toute manière, un déficit équivalent à 3% du PIB, cela représente 19,7% des recettes totales de l’État (61,6 Md€ de déficit pour 312,6Md€ de recettes) ou, selon votre critère de prise en compte, 20,6% des recettes fiscales ! Soit peu ou prou 20% de déficit et non 3% comme on cherche en permanence à le faire croire aux Français. J’ai déjà eu l’occasion de l’écrire plusieurs fois mais ceci doit être répété et répété et répété encore, on n’évalue pas un déficit sur autre chose que ses recettes, c’est-à-dire sur sa capacité à rembourser. Or le PIB est le Chiffre d’Affaires de la maison « France » dont l’État ne perçoit à son profit qu’une part. C’est donc bien sur cette part que doit être rapporté le déficit pour en évaluer authentiquement l’importance (lorsque vous empruntez, votre banquier vous demande VOS revenus, pas le chiffre d’affaires de votre employeur !). Or 20% de déficit, cela veut dire que l’an prochain, à partir du 19 octobre 2013, l’État empruntera l’intégralité de ses dépenses. En soi, c’est déjà inacceptable. Dans 10 ans, dans 15 ans, dans 20 ans, vos enfants paieront à travers leurs impôts le remboursement des dépenses de l’État en octobre, novembre et décembre 2013 ! Un budget ne doit pas être en déficit. Zéro déficit est le seul objectif réaliste. Le déficit budgétaire n’est acceptable qu’en période extraordinaire (guerre, catastrophe naturelle, reconstruction comme en Allemagne etc.) ou dans le cadre d’investissements visant à augmenter les recettes de l’État à terme.
De nouvelles mesures seront obligatoires en 2013…
Que Monsieur Ayrault pérore à la radio pour dire que l’objectif des 3% reste celui du gouvernement quand tout le monde sait que les mesures qu’il a prises ne feront qu’aggraver la situation du pays en provoquant, à travers un alourdissement de 30Mds€ de la pression fiscale et une augmentation de la dépense publique de 5,9Md€, n’a finalement que peu d’importance (si ce n’est sur sa propre crédibilité). Que le déficit soit l’an prochain de 19,7% ou de 23% (équivalent à 3 ou 3,5% du PIB) ne changera pas la face du monde. Dans tous les cas, il faudra prendre de nouvelles « mesures ». Réduction des pensions de retraites, des prestations sociales, augmentation des impôts et taxes sur les consommations internes au pays, nouveaux abandons de projets et d’investissements etc. Autant de mesures qui enfonceront un petit peu plus la France dans la récession parce qu’elles seront prises trop tard, de manière brutale et sans discernement.
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