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Ce qu’il faudra retenir de la mode en 2012.

Publié le 23 décembre 2012 par Maybachcarter

 Après la musique, les vidéos et les sites web, on boucle la boucle de cette série d’adieux à l’année 2012 avec la mode.

Ce qu’il faudra retenir de la mode en 2012.
2012 n’a pas été débordant de créativité en matière de prêt-à-porter. La crise économique a semble-t-il renforcé la crise d’inventivité (ou l’a imposée, ça dépend). L’année a surtout été marquée par des événements qui concerne les insiders de l’industrie, bien plus que le grand public.

Le tournant pour les grandes maisons:

Balenciaga, Dior et Yves Saint Laurent ont embauché de nouveaux directeurs artistiques, et en dehors du fait que cela se produise la même année, ils ont aussi pour point commun d’avoir surpris (voire déçu) beaucoup par leurs choix respectifs. Concernant les cas de Dior et YSL, j’en ai longuement parlé dans cet article. Pour ce qui est d’Alexander Wang chez Balenciaga, je n’aurais au grand jamais parié que ça arriverait un jour. Cela s’annonce compliqué de prendre la suite après le travail effectué par Nicolas Ghesquière… à moins qu’afin d’éviter les comparaisons incessantes, l’on aille dans une direction totalement différente. C’est ce que semble vouloir la maison Balenciaga. Attendons donc la Fashion Week de Paris en mars 2013 pour voir se matérialiser la nouvelle ère de la marque. Je mentirais si je disais que je ne crains pas la même déception qu’avec la collection P/E 2013 de Saint Laurent. Alexander Wang a une patte quand même franchement new yorkaise, je ne suis déjà pas sûre qu’il fasse le poids commercialement dans du moyenne gamme face à (au hasard) Isabel Marant en France, alors combien de fois dans le haut-de-gamme…? Même en conjuguant sa touche à celle de Balenciaga (qui est d’origine espagnole, mais qui a une image assez frenchy finalement), je suis très sceptique. Est-ce que Wang va aller piocher dans les archives de Mr Cristobal et saupoudrer quelques modèles vintage de minimalisme sporty ? Réponse en mars 2013.

La valse de la presse:

Ce qu’il faudra retenir de la mode en 2012.

Kate Lanphear.

Vous le savez, les rédactrices Mode des grands magazines sont devenues des stars à part entière. De ce fait, chaque mouvement d’un média à l’autre est – toute proportion gardée – semblable au passage d’une star du football d’une équipe à l’autre. Et cette année, les principaux changements sont: le départ de Kate Lanphear du ELLE américain. Les circonstances restent un peu floues, mais l’hypothèse principale serait qu’elle aurait essayé d’obtenir un poste au Wall Street Journal mais on lui a préféré quelqu’un d’autre à la dernière minute, et elle aurait donc été renvoyée du ELLE. Peu importe les conditions, elle trouvera sûrement vite un autre job. Cependant, le relatif silence qui a entouré cette affaire m’a paru très étrange. Après tout, elle est une des têtes les plus connues du Street Style.

Autre changement: Cosmopolitan et Marie Claire ont changé de rédactrices en chef. Joanna Coles, du Marie Claire US, est devenue rédac’chef du Cosmo, et en a profité pour ramener deux collègues du Marie Claire avec elle pour commencer son nouveau job. Quant à Marie Claire, ils ont débauché Anne Fulwinder du magazine de mariages BRIDES pour prendre la place de Joanna Coles. Ce jeu de chaises musicales a eu pour effet de provoquer un événement historique pour la presse américaine. En effet, la remplaçante d’Anne Fulwinder chez BRIDES est Keija Minor, la 1ère rédactrice-en-chef noire d’un des leaders mondiaux de la presse, Condé Nast. Elle a été débauchée chez Uptown Magazine, un féminin chic dédié aux afro-américaines CSP+ (la fameuse “blackgeoisie”).

Ce qu’il faudra retenir de la mode en 2012.
Keija Minor (à gauche) et l’actrice Sanaa Lathan en couverture d’Uptown Magazine (à droite).

Il a quand même fallu 103 ans pour que ça arrive, mais enfin.

Et pour finir sur la presse et ses mouvements, il y a eu plusieurs plans sociaux cette année. Les magazines de luxe ont pas mal licencié (le plus discrètement possible bien sûr) afin de réduire leur train de vie et s’adapter un peu plus aux budgets que leurs annonceurs leur imposent. Internet a aussi pas mal achevé les médias qui ont raté le coche de la complémentarité Print/Internet (R.I.P. aux titres qui sont morts en 2012). D’autres ont eu un sursaut de lucidité, à l’instar du magazine i-D qui a été racheté par Vice et qui devrait désormais se focaliser sur une plate-forme web dédiée aux vidéos Mode (plus de détails ici). Mais attention, le print a encore de beaux jours devant lui. Quelques titres sont nés cette année, et celui que l’on attend est sans conteste le lancement de l’édition française du Vanity Fair. Avec Michel Denisot à sa tête, et surtout Anne Boulay (qui a fait du bon boulot au GQ France) en rédac’chef -sans oublier la force de frappe de Condé Nast- ça promet. Et puis, ça nous changera de Paris Match, qui manque quand même cruellement de glamour.

Scandales:

Ce qu’il faudra retenir de la mode en 2012.

Un extrait de “Fashion Industry Confessions”.


Comme je l’ai dit en intro, l’année a surtout été mémorable plus pour le petit milieu de la mode que pour le grand public. Puisqu’on ne peut pas parler de renouvellement sur les podiums (on ne prend pas de risque, on recycle les tendances sur deux voire trois saisons), c’est en coulisses que les choses les plus croustillantes se passent. En témoignent la gifle à un million de dollars, les querelles entre rédactrices et créateurs, les lettres ouvertes assassines par réseaux sociaux interposés….

Par ailleurs, le site web qui a affolé la planète Fasheuuun en 2012, c’est quand même fashionindustryconfessions.tumblr.com. Tout comme Dan Humphrey Gossip Girl, la propriétaire de ce tumblr (que je soupçonne d’être danoise ou française) diffuse anonymement les petits secrets (très) gênants des grands noms de la mode. Et tout le monde y passe, du mannequin forcé à l’aneroxie aux problèmes financiers des grandes agences, en passant par les plagiats des maisons de luxe ou les grands photographes un peu b*tchy sur les bords. J’espère que ce tumblr restera en ligne aussi longtemps que possible, et que sa propriétaire va réussir à maintenir son anonymat, parce qu’il semblerait que certains soient déjà sur sa piste pour la démasquer. Dans le même genre, mais dans un autre concept, je recommande Kate Mess. En dehors du culte qu’il voue à la brindille (dont je pourrais me passer), j’a-do-re sa langue de garce et sa répartie (“Alexander Wang designing for Balenciaga? You mean, he does something else than just t-shirts????? OMG!” MYTHIQUE

:D
). Ces deux tumblr sont vraiment un vent de fraîcheur dans le fashion blogging, et me rappellent un peu Bryan Boy (avant qu’il ne se fasse complètement happer par le système). Ce qui est par ailleurs intéressant ici, c’est l’anonymat des auteurs (qui ont intérêt à ne pas se montrer vu ce qu’ils balancent). En n’existant uniquement que par le contenu de ce qu’ils écrivent et non en se mettant en scène, ils échappent d’office aux marques qui pourraient les “acheter” en les invitant à des événements ou leur offrant des cadeaux…

Les coups de coeur.

Je l’ai dit plus haut, les fashion weeks traditionnelles cette année m’ont vraiment laissée sur ma faim. Il y avait quelques belles pièces individuelles ça et là, mais aucun émerveillement.. Dieu merci, je travaille principalement sur des fashion weeks qui sont moins couvertes médiatiquement parlant. Et de ce fait, je vois surtout des marques dans la fleur de l’âge, et qui ont énormément à offrir.

Dans mon top 3 cette année, pour des raisons différentes, Oriett Domenech de République Dominicaine (à gauche), Duaba Serwa du Ghana (au centre) et l’italo-haïtienne Stella Jean (à droite).

Ce qu’il faudra retenir de la mode en 2012.

Je finirai en disant que 2012 a été une belle année d’accomplissements pour les marques africaines, et je tiens à tirer mon chapeau à Omoyémi Akerele.

Ce qu’il faudra retenir de la mode en 2012.
Omoyémi Akerele.

Cette jeune femme est la créatrice de Style House Files, une société qui a diverses activités (Relations presse, média, accompagnement…). Elle a fait défiler le célèbre designer britannique Matthew Williamson à Lagos, a permis de jeunes designers et entrepreneurs dans la mode locale de gagner des prix (et de l’argent), sans oublier qu’elle a emmené une poignée de créateurs africains (déjà établis) au Salon Pitti Imagine à Florence. Il s’agit d’un des salons mode les plus importants en Italie (et en Europe), et l’initiative d’Omoyémi Akerele a permis à ces designers de rencontrer les personnes qui comptent dans la mode italienne (Presse et Acheteurs). Elle a été invitée à s’exprimer lors du sommet de l’International Herald Tribune sur le luxe en Afrique. Et enfin, elle est derrière le projet Ndani à Selfridges: avec l’aide de la banque nigériane GT Bank (qui est derrière Ndani TV), elle s’est associée au grand magasin londonien Selfridges (un équivalent anglais des Galeries Lafayette) pour qu’une sélection de créateurs nigerians soit vendue dans un pop-up store de décembre à janvier 2013. Tout ça en une année, je dois dire que je suis admirative !

Quelqu’un d’autre qui n’a pas démérité cette année, c’est Lisa Folawiyo, qui est clairement déterminée à faire de son enseigne la 1ère marque de luxe globale venue d’Afrique.

Ce qu’il faudra retenir de la mode en 2012.
Lisa Folawiyo.

En 2012, plusieurs célébrités internationales ont porté ses créations, elle a réussi à intégrer le portfolio de marques distribuées sur l’e-store américain 100% luxe Moda Operandi, elle a conçu une ligne des housses pour BlackBerry Nigeria et cerise sur le gâteau: elle a décroché une collection en édition limitée avec L’Oréal Italie. A ma connaissance, c’est la première fois que L’Oréal s’associe avec une marque de mode africaine, quelle qu’elle soit.

Ce qu’il faudra retenir de la mode en 2012.
A gauche, un extrait du lookbook Printemps/Eté 2013 de Jewel By Lisa. Au centre et à droite, rouge à lèvres et vernis L’Oréal x JBL.

Bien sûr, il reste encore beaucoup de travail à faire, mais je suis reconnaissante envers ceux et celles qui contribuent à leur niveau à faire avancer le schmilblick. Notamment en élevant les standards de qualité, et de manière globale, l’exigence du travail bien fait. Ca prend du temps, mais ça finit toujours pas payer. Je suis impatiente de découvrir vers quels sommets ces deux jeunes femmes vont nous entraîner l’année prochaine.


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