"Vu l'article 1719 du code civil, ensemble l'article 1134 du même code ;
Attendu que le bailleur est obligé, par la nature du contrat, et sans qu'il soit besoin d'aucune stipulation particulière, de délivrer au preneur la chose louée, d'entretenir cette chose en état de servir à l'usage pour lequel elle a été louée et d'en faire jouir paisiblement le preneur pendant la durée du bail ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Rennes, 16 mars 2011), que la société La Fantasia de Marrakech, locataire de locaux appartenant à la société Klecar France, à usage de café-restaurant et situés dans un centre commercial, se plaignant d'entrées d'air froid dues au mauvais fonctionnement des portes d'accès à ce centre l'empêchant d'exploiter normalement les lieux loués, a assigné la bailleresse en réparation de son trouble de jouissance ;
Attendu que pour rejeter cette demande, l'arrêt, après avoir relevé qu'une clause du bail stipule que le preneur s'interdit tout recours en diminution de loyer du fait de l'interruption dans le fonctionnement des appareils communs et que la locataire réclame la restitution de 50 % du montant des loyers réglés pendant la durée du trouble, peu important qu'elle lui donne la qualification de dommages-intérêts, retient que la clause susvisée rend sa demande irrecevable ;
Qu'en statuant ainsi, alors que la clause litigieuse ne décharge pas la bailleresse de son obligation de délivrance et ne prive pas la locataire du droit de demander l'indemnisation de son trouble de jouissance, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a débouté la société La Fantasia de Marrakech de sa demande de dommages-intérêts pour le trouble de jouissance subi par suite du dysfonctionnement des portes du centre commercial, l'arrêt rendu le 16 mars 2011, entre les parties, par la cour d'appel de Rennes ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Rennes autrement composée ;
Condamne la société Klecar France aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Klecar France à payer à la société La Fantasia de Marrakech la somme de 2 500 euros ; rejette la demande de la société Klecar France ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du trente et un octobre deux mille douze.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt
Moyen produit par la SCP Le Bret-Desaché, avocat aux Conseils pour la société La Fantasia de Marrakech
IL EST FAIT GRIEF A l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir débouté la société FANTASIA de toutes ses demandes notamment au titre du dysfonctionnement des portes ;
- AU MOTIF QUE la société KLECAR France est propriétaire de la galerie commerciale, l'AFUL ASSOCIATION FONCIERE URBAINE LIBRE assurant la gestion et l'entretien de la galerie marchande et de ses annexes ; qu'il importe peu que ces parties communes n'aient pas été donnée à bail ; que de plus la société KLECAR France est, en qualité de bailleur des locaux où est situé le restaurant tenue d'en assurer la jouissance paisible pendant la durée du bail ; que la société FANTASIA DE MARRAKECH sollicite paiement de la somme de 12.770,45 € en réparation du préjudice subi du fait des problèmes de froid rencontrés dans son restaurant en raison des défectuosités des portes d'accès à la galerie commerciale qui ne fermaient pas hermétiquement ; qu'une clause du bail liant les parties prévoyait que le preneur s'interdisait tout recours ou demande de diminution de loyer auprès du bailleur du fait notamment de l'interruption dans le fonctionnement des réseaux, des appareils communs, transporteurs ou élévateurs ou dans la distribution des fluide de toute nature, vols ou dégradations intervenus dans les locaux loués ou les parties communes du centre commercial ; que la société FANTASIA DE MARRAKECH ne peut sérieusement soutenir qu'elle n'a pas, eu connaissance de cette clause alors que l'acte par lequel elle a acquis le fonds de commerce mentionne qu'une copie du bail lui a été remise ; que les portes d'entrée du mail sont des appareils communs ; qu'il résulte de l'assignation du 18 novembre 2008 que la société preneuse réclamait la somme de 12770,45 € représentant la restitution de 50 % des loyers par le bailleur pour les mois de novembre et décembre 2005 ainsi que pour le 1er trimestre 2006 peu important qu'elle lui donne la qualification de dommages-intérêts ; que la clause susvisée au bail rend irrecevable la demande présentée à ce titre ;
- ALORS QUE D'UNE PART l'obligation de délivrance du bailleur suppose une mise à disposition du bien objet du bail permettant l'affectation prévue originairement ; que le bien loué doit donc, compte tenu du droit applicable et de ses spécificités matérielles, pouvoir accueillir l'activité projetée dans le contrat de bail ; qu'en l'espèce, la société FANTASIA MARRAKECH se plaignait de ne pouvoir exercer son activité de restauration durant les mois d'hiver en raison d'une température trop basse malgré un chauffage intensif liée à la défectuosité des portes battantes de l'entrée du centre commercial (cf ses dernières conclusions p 11 in fine et p 12) ; que la renonciation du preneur stipulée à l'article 15 du bail rédigé dans l'intérêt du bailleur à demander toute diminution de loyer auprès du bailleur du fait notamment de l'interruption dans le fonctionnement des réseaux, des appareils communs, transporteurs ou élévateurs ou dans la distribution des fluide de toute nature, vols ou dégradations intervenus dans les locaux loués ou les parties communes du centre commercial ne pouvait donc autoriser le bailleur à anéantir sa propre prestation et ne le déchargeait pas de son obligation de délivrance ; qu'en se bornant à énoncer que la clause susvisée au bail rendait irrecevable la demande présentée puisque les portes d'entrée du mail étaient des appareils communs alors qu'une telle clause ne déchargeait pas le bailleur de son obligation de délivrance, la cour d'appel a violé les articles 1134 et 1719 et s du code civil ;
- ALORS QUE D'AUTRE PART l'objet du litige est déterminé par les prétentions des parties ; qu'en appel, la société exposante avait sollicité la confirmation du jugement qui lui avait alloué une certaine somme à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice de jouissance subi ; comme le rappelait, en effet, la société exposante dans ses conclusions d'appel (p 13 § 8 et s) en cas de trouble de jouissance, le preneur a droit à réparation, celle-ci pouvant consister en la restitution par le bailleur d'une partie des loyers reçus, la référence au montant du loyer permettant ainsi de chiffrer le montant du préjudice subi en raison du trouble de jouissance ; qu'il résulte d'ailleurs des propres constatations de la cour que la société FANTASIA DE MARRAKECH sollicitait le paiement de la somme de 12.770,45 € en réparation du préjudice subi du fait des problèmes de froid rencontrées dans son restaurant en raison des défectuosités des portes d'accès à la galerie commerciale qui ne fermaient pas hermétiquement ; qu'en décidant cependant que la clause de renonciation insérée au bail rendait irrecevable la demande de la société exposante qui réclamait dans son assignation la restitution de 50 % du montant des loyers par le bailleur pour les mois de novembre et décembre 2005 ainsi que pour le premier trimestre 2006, peu important qu'elle lui donne la qualification de dommages-intérêts, la cour d'appel a méconnu les termes du litige en violation de l'article 4 du code de procédure civile."