Ah, ces riches ! Qui détesterait-on s'ils n'étaient pas si riches ?
Qui d'autre pourrait bien avoir des secrets de famille, des luttes internes et une incroyable faculté commune à lever le coude ? C'est, après Revenge, ce que Deception s'apprête une fois de plus à explorer (Deception, la série américaine de NBC qui commencera le 7 janvier, à ne pas confondre avec Deception, la série irlandaise de TV3 qui commencera... le 7 janvier !).
Et si je mentionne Revenge, c'est parce que la parenté saute aux yeux. Rien que les plans sur la cossue demeure des Bowers donne bien le contexte, dans tous les sens du terme, de Deception, qui a trouvé le moyen d'avoir, elle aussi, pour héroïne, une jeune femme extérieure à une famille puissante. Joanna, c'est son nom, va s'insérer l'air de rien dans le quotidien de ces gens, qui cachent, à n'en pas douter, un lourd secret ; les souvenirs et les émotions passées vont évidemment s'en mêler.
Cette fois, au lieu de vraiment accomplir une revanche, il s'agit de trouver l'explication de la mort d'un des membres de la famille, Vivian, qui était à l'adolescence la meilleure amie de Joanna et dont la mort semble peu accidentelle ; par rapport à Revenge, ici on est du "bon" côté de la barrière puisque Joanna est également détective pour la police, et qu'elle est envoyée sur les lieux par un agent du FBI qui veut utiliser ses liens avec les Bowers. Il n'y a donc aucune sorte d'ambiguité morale (non que Revenge ait beaucoup exploré celle d'Emily, il est vrai), rendant instantanément suspect à peu près n'importe quel membre de la famille d'entrée de jeu. Je ne suis pas certaine qu'ajouter un contexte d'enquête policière soit une trouvaille intéressante, sans même parler du fait que je suis fatiguée de tous ces flics qui ont envahi mon écran depuis douze ans, mais au moins ça permet quelques petites variation par rapport à Revenge, notamment le fait que Joanna est épaulée par une équipe et non plongée seule dans les mystères de la somptueuse villa Bowers.
Sortis de ça, on n'a pas tellement affaire à une série d'une folle originalité. Les riches sont, comme toujours, des gens qui n'ont que des problèmes, quand Joanna est une fille gentille et adorable, et c'est normal, puisqu'elle est moins riche (sa mère travaillait pour les Bowers). Ils boivent beaucoup, abusent de substances variées, ils se détestent les uns les autres au point de se sauter à la gorge le soir-même de l'enterrement de Vivian, n'attendant même pas que le corps soit froid pour s'envoyer les pires horreurs à la tronche, et évidemment ils gèrent un empire (pharmaceutique, cette fois) qui n'est pas non plus tout blanc. Vous savez : comme font les riches.
Ainsi, Deception tente d'insérer des intrigues par-dessus l'enquête de Joanna mettant en scène les différents membres de la famille ; ces intrigues secondaires, en toute logique, devraient densifier les épisodes afin de rendre plus compliquée l'investigation sur la mort de Vivian. Mais pas du tout. Le coix de Deception, même si ça semble plus une marque d'incompétence qu'un choix, est d'évoquer toutes sortes d'intrigues qui sont incroyablement évidentes, au moins pour le spectateur, et qui empêchent de vraiment se poser de vraie question. Il n'y a, en réalité, pas grand suspense sur les origines de Mia, et ce sont environ deux bons tiers du pilote qui vont faire semblant de maintenir le mystère autour de la question en vain, parce que Joanna est, voyez-vous, beaucoup plus stupide que les spectateurs, ce qui augure d'énormément de choses pour la suite ! Même la question de la mort de Vivian est à moitié résolue à l'issue de cet épisode inaugural !
Alors, évidemment, il est possible qu'il y ait plein de retournements de situation (celui qui s'est débarrassé de l'arme du crime en pleurant n'est pas forcément celui qui a tué Vivian, admettons) ou de suspense qui vienne se greffer là-dessus (le père de Mia va peut-être débarquer et réclamer sa garde), mais pour l'instant, en n'ayant vu que le pilote, ça donne plutôt l'impression que les spectateurs vont en savoir systématiquement plus long que l'héroïne sur ce qui se passe dans la vie des Bowers, et ça fait un peu peur. Où le suspense quand la moitié des secrets de la maisonnée ont été percés en 45 minutes ?
A l'issue de ce premier épisode, c'est à se demander pourquoi quelqu'un pourrait choisir de regarder Deception quand tout est déjà fait dans Revenge ...en mieux !
Bon, d'accord, pas tout : Deception fait un peu moins cheap... mais comme sa distribution est aussi bien moins haute en couleur (moins de très mauvais élèves, pas vraiment de premier de la classe), ça revient à dire qu'à choisir, autant regarder Revenge avec ses défauts, que Deception avec son soucis de ne prendre absolument aucun risque.
Et pour que je recommande de regarder Revenge, il en faut.