La fantastique histoire du Radium, par Jean-Marc Cosset et Renaud Huynh

Crédulité dramatique, tu n’as pas fini de faire courir les gogos.

Pour revenir sur stupide bobard qui a fait converger des milliers de badauds dans un village de l’Aude en l'attente de l’apocalypse, je voudrais vous parler d’un petit livre très sérieux qui fait réfléchir sur la capacité des hommes à gober des sornettes …

Cet opuscule est écrit par Jean-Marc Cosset : médecin, professeur des universités, qui fut le patron du département oncologie de l’Institut Curie et Renaud Huynh, directeur du Musée Curie à Paris. L’ouvrage est surtout passionnant par le grand nombre d’illustrations issues du fonds documentaire du l’Institut Curie, et s’il relate rapidement les étapes des découvertes majeures du couple Curie et de leurs successeurs, il insiste surtout sur l’utilisation fantaisiste, et aussi dangereuse voire criminelle qui a été faite du Radium, comme symbole de la modernité, la découverte qui allait changer le monde…

Car effectivement, la découverte par Henri Becquerel de la radioactivité naturelle en 1896 puis en 1898, celle du premier élément chimique émetteur de rayons par Marie Curie avec l’aide de son mari Pierre, ouvre une ère de changements fantastiques dans le domaine de la santé et de l’énergie. C’est en décembre 1898 que Marie et Pierre Curie découvrent en effet le Radium, un million de fois plus radioactif que l’uranium … une source d’énergie semblant infinie, qui dégage spontanément de la chaleur, rend l’air conducteur d’électricité et phosphorescent …  une découverte fantastique, au sens littéral du terme, dont on ne mesure pas tout de suite toutes les conséquences – même les plus dangereuses.

Alors, dans le monde entier, on va utiliser le concept de radium à toutes les sauces : c’est un élément qui peut tout, le symbole des temps nouveaux.  Des publicitaires comme les littérateurs, les dessinateurs de bandes dessinées, et des charlatans, des fabricants de produits de beauté, les pharmaciens et les patrons de stations thermales vont s’en emparer pour tromper le grand public.

Il y eut aussi des catastrophes : on sait que Marie Curie, faute d’avoir pris les précautions nécessaires lors de la manipulation des substances radioactives, est morte prématurément. On se souvient moins – car l’affaire se déroula aux Etats-Unis – du drame des Radium Girls … dans les années 1920-1930, près de 4000 ouvrières furent employées pour des travaux de peinture d’aiguilles luminescentes de montres. Comme ce travail nécessitait un pinceau particulièrement effilé, elles portaient le pinceau à leurs lèvres ce qui les contamina gravement au radium, provoquant de nombreux cancers de la mâchoire et de la moelle osseuse.  Une potion au Radium, le Radithor – qui hélas en contenant réellement – a tué. Ce qui ne découragea nullement, entre autres,  le laboratoire THO-RADIA de continuer à commercialiser des poudres de riz, des eaux de toilette, des crèmes de beauté à base de thorium et de radium …ou du moins et c’est heureux, en le faisant croire…

Toujours aussi facile de jouer sur la crédulité humaine ? Je crains hélas que oui, malgré l’élévation du niveau de connaissances général de la population. Mais dans le domaine scientifique, on constate tout de même que les théories les plus farfelues prospèrent.

En tous cas un phénomène toujours d’actualité … et surtout, grâce à ce petit livre, il faut imaginer aujourd’hui  que des substances radioactives toujours aussi dangereuses malgré le temps écoulé( si elles ne sont pas stockées convenablement) peuvent avoir été  « oubliées » dans des greniers ou des caves (vieux appareils de radiologie, lames de rasoir « au radium », réveils, montres, tubes ou cassettes de plomb de provenance inconnue) et qu’en cas de découverte, il ne faut absolument pas y toucher !

Un dernier clin d’œil : je remarque soudain le nom de marque de ma margarine anti-cholestérol … « Pro-Activ » !

La fantastique histoire du radium, quand un élément radioactif devient potion magique, par Jean-Marc Cosset et Renaud Huyn, aux éditions OUEST-France, 128 p. 17,90€ (les droits d’auteur sont reversés à l’Institut Curie).

Jean Marc Cosset, je le connais bien car il était assistant en radiothérapie enfants lorsque j'étais surveillante en pediatrie à IGR dans les années 80...., en plus c'était le mari d'une amie, ils avaient une maison de campagne près de ma famille.....Il est chef de service à Curie & peut être à la retraite aussi!!!