L’ENVERS DU DECOR
Il y a toujours
cette boue qui nous menace
et qui nous tire vers le bas,
elle est en nous :
lourdeur corruptible, organique
de la chair
véhicule du Temps, de la dévastation
où œuvrent à bas bruit, la destruction programmée,
le lent pourrissement des sites intestins…
Nous qui aspirons à la lumière, à l’azur,
nous, extraits à grand peine du limon des nuits,
nous, au fond, aussi fragiles que la gelée
nous retournons toujours
où nous avons jailli.
Les macules de la maladie, du déclin,
de la lassitude à force
de trop lutter
ont raison de notre foi, de notre vigueur…
Dès l’aurore, le germe de fin
est logé
au plus discret de notre fibre intérieure,
fertile en apoptoses et en effondrements,
en érosions sournoises de l’axe de vie.
Chaque minute ajoute
à notre illusion
mais aussi, en Janus, à notre autophagie
et nos parfums, nos ruses de séduction,
nos combats pied à pied contre ce qui salit
et qui use masquent assez mal les miasmes épais,
putrides, de nos viles décompositions .
Nous ne voyons (car nous ne voulons regarder)
que le rayonnement de notre être animal
-traître-, que l’agilité de notre mental
mais au regard de cette vase
que pèsent-ils ?
Si l’on ne nous
mettait pas en terre, à la fin
ou si quelque bûcher
ne nous dévorait pas
quelque bec de freux ou quelque croc de chacal
s’en viendrait cisailler
ce qui reste
de nous !
Patricia Laranco.