Au delà des conflits qui divisent le monde et que beaucoup qualifient de religieux, il y a la vie quotidienne. Il y a nos voisins, nos collègues de travail et toutes ces personnes que l’on croise chaque jour, avec lesquelles on fait des projets, celles qui nous font rire et celles qui nous rendent service. Alors aujourd’hui, j’ai envie de vous parler d’une amitié très particulière qui me lie à ma voisine chrétienne. Elle a pris une grande place dans ma vie et est véritablement passée du statut de gentille voisine à celui d’amie proche avec qui je peux tout partager.
Évidemment nous échangeons énormément sur nos croyances respectives
Bon là, il est déjà 20h, si on se lance dans une discussion sur Jésus, je vais peut-être refaire du café, non?
L’été, on discute jihad, trinité, enfer et paradis en buvant de la citronnade devant la maison. C’est officiel, les voisins nous prennent pour des folles.
Niveau culinaire, elle se donne toujours beaucoup de mal pour me faire plaisir. Lors d’un repas avec plusieurs de ses amies, elle m’a même fait la surprise d’aller acheter de la viande halal pour me faire une tourtière du Lac Saint Jean juste pour moi!
Je l’ai déjà accompagnée à l’église et elle est venue à la mosquée. Parfois, elle se lève avec moi pour prier avant l’aube et ensuite nous partons dans un parc regarder le lever du soleil. Je peux faire ma prière devant elle sans aucune gêne et nous parlons souvent de notre relation à Dieu. Inconsciemment peut-être, nous utilisons de plus en plus un langage commun. Elle parle de Dieu plutôt que de Jésus, et je parle de Dieu plutôt que d’Allah. Bref, on parle spiritualité, confiance en Dieu et défis quotidien pour vivre à la hauteur de nos valeurs.
Quand on prend sa voiture, elle met du rock chrétien, dans la mienne il y a du Coran (bon allez, j’avoue, pas toujours…).
Le plus beau cadeau qu’elle m’ait fait récemment est une petite carte dans laquelle elle m’écrit que bien que nous n’ayons pas les mêmes croyances, mon mari et moi-même la stimulons spirituellement et la poussons à se rapprocher de Dieu. Elle dit se sentir bénie de nous avoir rencontrés. Je sais qu’elle aime notre façon de vivre et qu’elle partage avec nous cette foi profonde qui la guide dans ses choix et ses actions.
Avant nous, elle ne connaissait rien de l’Islam et rit à présent des préjugés qu’elle en avait. Aujourd’hui, je ne sais pas si elle s’en rend compte, mais elle en connait plus que beaucoup de musulmans! L’invitation à l’Islam par l’exemple est une réalité très concrète dans ma vie. Parce que les livres sur l’Islam que je lui ai prêtés sont encore en train de prendre la poussière sur ses étagères…
Ensemble, on ne fait pas de «marketing». Nous n’hésitons pas à parler des problèmes et des lacunes de nos communautés religieuses respectives, parce que nous savons qu’une religion se juge en fonction de son message et non de ses adeptes.
Étant pratiquante elle-même, elle comprend que certaines choses sont importantes et non négociables. Elle n’aura pas de relations sexuelles sans être mariée et elle ne sort pas dans des clubs. Elle se soucie énormément du bien-être des personnes qui l’entourent et nous savons que nous pouvons compter l’une sur l’autre.
Bien sur, selon ma croyance, elle n’ira probablement pas au paradis et selon la sienne, je n’aurai point de salut. Mais cela veut-il dire pour autant que nous nous souhaitons du mal? Absolument pas! Nous avons conscience de nos points de vus respectifs, mais nous comprenons également ce que cela signifie pour chacune de nous, dans nos cadres de référence.
Évidemment qu’au fond de mon cœur, je souhaite qu’elle devienne musulmane un jour et il est certain qu’elle rêve de me voir donner ma vie à Jésus.
Dans le fond, je plus grand mal que nous soyons capables de nous faire, c’est de prier avec ferveur l’une pour l’autre.
Que Dieu nous guide…