Pour la plupart des nations, la mondialisation, la prépondérence des forces du marché, la diminution des pouvoirs économiques des Etats, est un processus imposé et inéluctable. Pour l’Amérique, la mondialisation demeure un processus volontaire et entretenu par une élite économique et politique. Ainsi cette “surpuissance” est la dernière nation à avoir conservé une dose importante de souveraineté nationale. Sur toutes les questions liées à la politique économique, commerciale, sociale, financière et monétaire, ce sont au bout du compte les hommes politiques de Washington et leurs conseillers qui fixent les règles.
Ce n’est pas une volonté “coloniale”, mais simplement la taille de l’économie américaine qui fait des Etats-Unis le dernier facteur d’ordre dans le chaos de “l’intégration mondiale”. Il est donc tout à fait possible qu’au bout du compte ce soit aussi un gouvernement américain qui sorte, le premier, du piège de la mondialisation. Aujourd’hui déjà, le modèle américain, la soumission totale au marché, n’est critiqué nulle part avec plus de force qu’aux Etats-Unis eux-mêmes.
Si un nombre suffisant de personnes dans ce pays finissent par estimer que “le retrait de l’Etat” ruine aussi leur pays, elles pourraient dès demain provoquer un changement de cap brutal. Après tout n’est-ce pas aux Etats-Unis qu’est né cet “Etat-Providence” que la machine économique planétaire broie aujourd’hui ?
Lorsque le dernier élan en date de “globalisation” de l’économie mondiale s’est achevé sur une catastrophe, dans les années trente, c’est le gouvernement de Franklin D. Roosevelt qui, avec le New Deal, a inventé l’Etat social moderne pour arriver à juguler la misère. On ne peut donc pas exclure que le légendaire pragmatisme américain, d’ici quelques années, rejette les articles de foi des “extrémistes du marché” aussi vite qu’il en a fait des dogmes pendant les années 80.
Ce changement de cap paraît lointain et improbable … Pas si sûr ! L’Amérique “marche souvent devant !” N’oubliez jamais que ce qui est “moderne” … C’est l’Etat ! Pas le libéralisme économique plus ou moins “sauvage”.