Jorge Pineda
Afro issues
Installation
2006-2009
Jorge Pineda
né en République Dominicaine en 1961
Entretien avec Carlos Garrido Castellano
Q : Comment avez-vous commencé à dessiner ?
Jorge Pineda
Me Voy
Installation
2005
J : J’ai toujours dessiné, depuis tout petit, je ne me souviens pas d’un moment en particulier. Mais bon, maintenant que vous me posez la question, oui : ma mère était professeure, elle avait installé un tableau sur la terrasse de la maison et elle le divisait en six sections avec une craie. Une section par enfant. Je voulais faire des dessins plus grands, j’avais besoin de plus d’espace, je devais donc négocier avec mes frères et sœurs. Ma sœur jumelle me prêtait sa section, les autres, qui étaient également des jumeaux, me la louaient. Comme ils aimaient bien mes dessins, ils ont fini par me laisser tout le tableau.
Q : Comment définiriez-vous l’identité de votre œuvre ?
J : Le thème de l’identité est présent dans mon œuvre, parfois comme thème central, parfois comme thème secondaire. J’en ai pris conscience dans la salle du contrôle de l’immigration de l’aéroport de Miami. Quand la fonctionnaire a ri parce que l’information concernant ma couleur de peau sur mon passeport indiquait « couleur indienne ». J’avais 24 ans et c’était la première fois que je prenais conscience du fait que nous les dominicains avions inventé une couleur sans questionner le ridicule de la situation. En raison, à la base, d’un complexe national qui a assumé de manière très superficielle le concept d’« être dominicain ». En l’isolant des contextes qui l’avaient construit. J’ai alors commencé à m’intéresser à cette question sous tous ses angles, comme la sexualité, le genre…
Q : Comment faites-vous allusion au thème de l’enfance ?
J : Moi j’ai eu une enfance heureuse. Pourtant, en voyant mon œuvre, on pourrait penser le contraire. Ces images que j’utilise traitent parfois le thème qui les illustre, mais d’autre fois ne sont qu’une métaphore de la société. D’une société qui refuse de grandir et préfère mal se comporter au lieu d’assumer ses responsabilités. Le spectateur décide en fonction de ses références. Ma responsabilité en tant qu’artiste est d’arriver à ce que le spectateur qui voit l’œuvre, ouvre à nouveau les yeux. Qu’il voit à nouveau cette quotidienneté qui lui est devenue invisible à force d’être devant ses yeux.
Afro Charlie
installation
2009
Q : Comment utilisez-vous le contraste entre ce qui est caché et ce que l’on montre ?
J : Je suis un admirateur de Jung, le psychanalyste. Dans une de ses propositions, il parle d’ombre, comme de cette part de l’individu qui fait partie intégrante de lui, mais que celui-ci n’accepte pas en tant que telle et voit comme quelque chose de négatif, une source de conflit. Ce dialogue conflictuel et perturbateur m’intéresse en tant que façon de dépeindre non seulement l’individu, mais aussi la collectivité. C’est un thème que je traite dans la série Niñas Locas, qui est constituée de portraits de quelques amies et de mes angoisses.