Un pianiste, un contrebassiste, un claquettiste, tous trois vêtus de noir. Jazz.
Fabien Ruiz danse. Ou danse le rythme, ce serait peut-être plus juste. Et joue, et donne, et incarne, et frappe, et glisse, et pointe, et dialogue avec, et et et il fait des phrases avec les pieds. Il met ses pas dans ceux de Fred Astaire. Quand on a vu danser Fabien Ruiz, il faut bannir une expression de notre langage : « bête comme ses pieds ». Car il y a de l’intelligence dans ces pieds-là. Ils racontent une histoire du monde : ils unissent la gigue irlandaise et les danses africaines, le cinéma parlant et la musique noire américaine, les voyages au long cours et les orchestres où jouaient les grands-parents de Fabien ; ils racontent le temps d’avant le cinéma, le big band de Duke Ellington, le sel répandu dans la cuisine pour faire un son proche des balais sur la batterie ; ils disent ainsi l’universel et l’intime, de l’allure élégante du danseur jusqu’à la qualité de ses chaussettes. Parfois on ferme les yeux et le son qui nous parvient est bien un son de percussions mais il faut ouvrir presque aussitôt les yeux pour admirer les déplacements du danseur. Et Fabien nous donne une première leçon de claquettes : chaque pas a un nom, ainsi les frappes, les déplacements peuvent s’écrire et se transmettre autrement que par l’image, même si c’est la transmission directe qui donne toutes les nuances : vitesses, hauteur, directions…
Et vous pourrez peut-être repartir du spectacle avec les pieds de Fabien Ruiz s’animant dans un flip-book.