Noel, temps des réjouissances en famille ou maman et papa cajolent et démontrent leur amour inconditionnelle à leurs enfants…..
Malheureusement ce genre d’histoire relève, en 2012, d’une époque non lointaine mais rendue révolue alors que de plus en plus d’enfants sont retirés de leur famille par la DPJ.
Le contexte est encore plus frappant lorsque les parents sont séparés et un père de famille qui avait décidé de poursuivre son ex conjointe ainsi que la DPJ vient de l’apprendre d’une façon très radicale alors qu’au lieu de remplir le dessous du sapin de cadeaux il devra payer une somme supérieure à 52 000 $ tel que l’a décidé l’honorable juge de la Cour Supérieure Clément Samson le 7 décembre dernier.
À l’intérieur d’un jugement de 84 pages se concluant par l’espérance du juge que cette histoire prenne finalement fin, nous retrouvons quelques extraits intéressants
[5] Madame et Monsieur sont tous deux originaires [de la région A] et ils reviennent y demeurer au mois de mai 2006, car Monsieur, nouvellement promu avocat, y débute un emploi dans un important cabinet.
[6] À cette même époque, leurs relations s’enveniment. Madame reproche alors à Monsieur de vouloir régir sa vie, ce qui a pour conséquence de la rendre tellement stressée qu’elle est même un jour atteinte d’une crise de panique intense qui la conduit à l’hôpital. Elle se croit victime d’une crise cardiaque. Monsieur attribue cette angoisse à des raisons qui n’ont rien à voir avec lui puisque les premiers symptômes se sont produits alors qu’il était absent. Sans égard à la cause, cela ne change en rien ce fait.
[7] Le 18 août 2007, Madame et Monsieur se séparent et, le 27 septembre 2007, ils signent une première convention prévoyant que Madame aura la garde de l’enfant 60 % du temps et Monsieur en aura la garde 40 % du temps.
[8] Au début de l’année 2009, alors que Madame fréquente P… B… (nouveau conjoint) depuis mai 2008, les relations entre Monsieur et Madame se détériorent davantage. De cette nouvelle union, un autre enfant naîtra ultérieurement.
[9] Monsieur soupçonne que le nouveau conjoint brutalise Madame, ainsi que l’enfant lors de sa semaine de garde. Des épisodes de gestes violents conjugaux sont admis par Madame et le nouveau conjoint dans une moindre mesure que ce que perçoit Monsieur.
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[24] Monsieur, en sa qualité personnelle et en celle de tuteur de l’enfant, poursuit Madame ainsi que son nouveau conjoint, la DPJ et les intervenants A à H.
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[41] Dans ce contexte, le nouveau conjoint accepte de déposer son dossier de consultation psychologique devant la Cour supérieure au printemps 2009. Madame Agathe Bernard, psychologue, après des rencontres avec tous les acteurs, conclut que la possibilité de violence du nouveau conjoint est faible.
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[52] Pour sa part, Madame B… reproche aux intervenants de la DPJ d’avoir rendu des témoignages diffamatoires à son égard et d’avoir intenté contre elle des poursuites abusives en Chambre criminelle et pénale qui ont eu des répercussions sur sa sécurité et le développement de ses propres enfants. AB et Pi… T… sont poursuivis par elle pour avoir porté atteinte à sa réputation.
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[63] Les intervenants s’immiscent dans la vie d’une famille et recommandent des solutions qui peuvent avoir des conséquences importantes sur l’avenir des enfants et par ricochet de leur famille. D’où la nécessité d’une telle disposition. Sans celle-ci, il serait hasardeux de vouloir exercer pareille délicate fonction.
[64] La LPJ contient également ce qu’elle appelle elle-même des « principes généraux et droits des enfants ». La Loi rappelle que le soin, l’entretien et l’éducation d’un enfant et la responsabilité d’en assurer la surveillance incombent en premier lieu à ses parents. Toute intervention auprès d’un enfant et de ses parents doit viser à mettre fin à la situation qui compromet sa sécurité ou son développement ou qui a pour objectif d’éviter que cela ne se reproduise.
[65] La LPJ rappelle que toute intervention doit privilégier, lorsque les circonstances sont appropriées, les moyens qui permettent à l’enfant et aux parents de participer à la prise de décision.
[66] Les intervenants doivent traiter les enfants et les parents avec courtoisie, équité et compréhension, dans le respect de leur dignité et de leur autonomie. La LPJ confie également à ces personnes le devoir de permettre à l’enfant et à ses parents de faire entendre leurs points de vue, d’exprimer leurs préoccupations et d’être écoutés au moment approprié de l’intervention.
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[117] Bien plus, les relations demeurent tendues entre Monsieur et Madame pour des vétilles. Tout est matière à blâme. Ni l’un ni l’autre des parents n’est sans taches. Le caractère méticuleux de Monsieur l’amène à prendre des notes détaillées de tout ce qui arrive. Par exemple, des espadrilles trop grandes deviennent sujettes à discorde pendant des semaines. Et Monsieur ne peut en porter seul le blâme.
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[122] Le 6 août 2009, Monsieur se présente alors avec l’enfant chez un médecin qui examine l’ecchymose. Il raconte l’événement qui aurait causé cette blessure. Le médecin fait un signalement à la DPJ le lendemain.
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[126] La dénonciation faite au service de police par l’intervenant C indique que ce pourrait être le nouveau conjoint14 (ou peut-être R… que personne ne connaît) qui aurait alors frappé l’enfant. Il faut donc imaginer que, dès le premier contact, le nom du nouveau conjoint a été évoqué, car l’intervenant n’a pas pu imaginer ce nom. C’est dire que, probablement lors du récit de Monsieur fait à l’intervenant C, les appréhensions de Monsieur aient pu rapidement être manifestées. Cela démontre que le jugement du 4 mai 2009 n’a rien changé aux perceptions de Monsieur quant au caractère violent du nouveau conjoint.
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[147] Monsieur ne fait plus confiance à la DPJ à compter de cette décision. Il considère que l’enquête ne fut pas sérieuse et qu’ils n’ont pas compris le niveau de danger pour son enfant. De fait, les intervenants n’ont pas interrogé les témoins identifiés par le père; il faut toutefois comprendre qu’ils étaient davantage à la recherche de la source de violence dans le milieu maternel et les acteurs du milieu paternel n’auraient pas été d’un grand secours pour identifier R…!
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[153] L’ecchymose découverte en juillet 2009 fut donc l’occasion d’une intervention de la DPJ, mais pas celle anticipée au départ par Monsieur. Et, par ailleurs, pour reprendre les mots de la juge Thibault de la Chambre de la jeunesse, « cette ecchymose est le point de départ d’un dérapage en règle de la part du père ».
[154] Il est utile de connaître les trois étapes du cheminement d’un signalement; d’abord le signalement fait par une personne dont seule la DPJ connaît l’identité; ensuite l’évaluation et l’orientation du dossier (ce qui pourrait conduire à sa fermeture). Cette deuxième étape se conclut lors d’une rencontre animée par l’intervenant responsable du dossier, auprès d’une table d’orientation notamment composée d’intervenants seniors et d’intervenants chargés de l’application des programmes. Finalement, si, au terme des décisions de cette table d’orientation qui seront consignées par l’intervenant responsable du dossier dans un rapport du même nom, les parents consentent par écrit à se soumettre au processus et en reconnaître le bien- fondé, le dossier sera alors transmis à de nouveaux intervenants qui appliqueront ce qui s’appelle alors les mesures volontaires. Si, au contraire, les deux ou l’un des deux parents refusent le constat et les mesures proposées, alors la DPJ réfère le tout à la Cour du Québec, chambre de la jeunesse. Ce tribunal recevra les recommandations de la DPJ et en disposera comme bon lui semble.
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[159] Monsieur allègue que le comportement de la DPJ et de ses intervenants manquait d’objectivité et que cet alignement a perduré. Il s’est senti menacé dès la première rencontre. Immédiatement par la suite, il s’est mis à enregistrer les rencontres avec les intervenants, à leur insu. Le Tribunal a écouté les enregistrements et tient compte de tous les témoignages entendus. Il ne voit pas en quoi les actes posés par les intervenants étaient tendancieux. Évidemment, les intervenants doivent agir avec un certain scepticisme devant les propos d’ex-conjoints qui entretiennent entre eux des sentiments négatifs. De plus, pour reprendre une expression entendue lors de l’audition ‘quand la DPJ entre dans votre vie’, personne ne réagit avec plaisir. Pour reprendre un terme médical, la DPJ est un ‘corps étranger’ à la famille, dont la présence est devenue nécessaire à cause d’influences néfastes sur le développement de l’enfant. Cela dit, compte tenu du contexte, le Tribunal considère que Monsieur ne s’est pas déchargé de son fardeau de démontrer une quelconque faute de la part des intervenants de la DPJ.
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[168] En mars 2010, dans une requête que Monsieur adressera à la Chambre de la jeunesse, celui-ci allèguera que l’intervenant D a comploté avec les intervenants B et C en faisant preuve de négligence et d’aveuglement volontaire. Le Tribunal a entendu l’intervenant D et n’a rien à lui reprocher. Au contraire, son témoignage constitue un récit logique du traitement du signalement.
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3.2.5 Des tensions et encore des tensions
[173] Le 9 mars 2010, à la suite d’une demande de Monsieur de faire réviser l’ensemble de son dossier, il a été décidé par le réviseur de judiciariser le dossier de l’enfant devant la Cour du Québec, chambre de la jeunesse. Compte tenu du comportement du père, la DPJ n’a d’autres choix.
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[180] Il allègue que la DPJ a mystérieusement fait disparaître un signalement, que les intervenants ont tenté par de nombreuses manœuvres de l’intimider et de déclarer faussement des choses, de falsifier un rapport d’orientation, de maintenir des accusations frivoles et non fondées. Qui plus est, il allègue que l’intervenant D a comploté en faisant preuve d’aveuglement volontaire dans la gestion du signalement du 25 novembre 2009, alors que le Tribunal n’a aucune raison de douter de la gestion adéquate de ce signalement. La table était mise pour une première audition judiciaire où serait partie la DPJ. Faisant référence à la notion de chose jugée, le Tribunal remarque que ce qui est alors essentiellement allégué devant la Cour du Québec, chambre de la Jeunesse est, à peu de choses près, la même liste de récriminations dont il est saisi dans la présente affaire.
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[201] Le Tribunal note que ce comportement est loin d’être celui exigé par la LPJ19 ou de l’engagement qu’avait pris Monsieur lors de la signature des mesures volontaires20.
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[205] À lui seul, bien que discutable, ce comportement d’un intervenant ne constitue pas une faute grave, encore moins une faute commise de mauvaise foi qui engage la responsabilité de la DPJ. Tous conviendront qu’il faut éviter cela.
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[217] Le Tribunal qualifie ce comportement d’entêtement.
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[221] Par conséquent, le tribunal ordonne que les droits d’accès du père soient effectués sous la supervision d’une personne déterminée par la DPJ à raison de 3 heures par semaine.
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[232] L’écart entre les allégations et la preuve administrée devant le Tribunal est grand. Le Tribunal n’a aucunement constaté de trace d’un supposé complot dont Monsieur aurait été victime. Au contraire, la preuve démontre que les intervenants ont fait preuve de professionnalisme et de retenue malgré le comportement inquisiteur et envahissant de Monsieur. La preuve démontre aussi que Madame a obtenu la garde exclusive de l’enfant à cause du comportement de Monsieur.
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[237] Le Tribunal ne peut donner suite à des dommages dans ce contexte. Il est vrai qu’il devenait difficile pour Monsieur de travailler dans un cabinet qui représentait judiciairement la DPJ alors que, de l’autre main, il la malmenait!
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[264] En plus de réclamer des dommages pour abus de droit, Madame demande au Tribunal de la mettre à l’abri des procédures judiciaires de Monsieur en le déclarant quérulent.
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[268] Compte tenu de la profession d’avocat qu’exerce Monsieur, le Tribunal considère que sa formation lui impose un devoir de prudence plus élevé, car il ne peut plaider qu’il ne connaît pas la loi, les procédures de façon générale et le mode de fonctionnement des tribunaux. Il est en plus avantagé, car il n’a pas nécessairement besoin d’un avocat pour rédiger une procédure et connaître ses droits avec détails. D’ailleurs, à plusieurs reprises constatées dans ses écrits, Monsieur ne s’est pas caché pour exprimer à Madame qu’elle ne connaissait pas le droit et qu’il était bien placé pour s’en servir. Le Tribunal en fait un critère supplémentaire dans la présente affaire.
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[366] Le Tribunal est toutefois étonné des énergies investies afin de démontrer à quel point les anciens conjoints posent des gestes répréhensibles et comment les intervenants de la DPJ exécutent mal leurs fonctions, alors que c’est inexact. Le Tribunal souhaite que le présent jugement aide à tourner la page.
[367] Le Tribunal ne peut se convaincre, même en faisant des efforts de soupçonner l’un et l’autre, qu’il y ait eu des erreurs fondamentales dans les dossiers des trois enfants. Les intervenants et les juges – et le soussigné s’y inclut – ont écrit des recommandations et ni Monsieur, ni Madame B… ne les ont considérées comme s’adressant à eux. Ils se sont convaincus d’avoir raison pendant que toutes les autres personnes ont tort. Nous sommes dans le domaine des sciences sociales où il n’y a pas une règle scientifique imparable. Si à tout le moins Monsieur et Madame B… avaient démontré un minimum de bonne volonté pour s’améliorer comme parents et surtout améliorer leurs liens de confiance avec les intervenants dont le travail n’est pas toujours évident, nous n’en serions pas là. Souhaitons que ce jugement soit le dernier de cette longue « saga » comme le disait la juge Thibault au début du dossier, alors qu’elle ne pouvait s’imaginer la suite. Et souhaitons aussi que les recommandations qui se retrouvent dans ces jugements et rapports trouvent une oreille attentive. Devant tant de sages conseils, le Tribunal ne croit pas utile d’en rajouter.
POUR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL: Cliquer ici pour lire le jugement