Photographie de gauche : « Un bosquet de la Closerie des Lilas ». Illustration de Tableau de Paris d'Edmond Texier (Paris, Paulin et Le Chevalier, 1853).
Photographie de droite : « REÇU AVOCAT. - Dis donc, Phémie, ce qui m'amuse, c'est quand je
pense que ce pierrot-là sera notaire ! ». Illustration de La Comédie de notre temps : La civilité - Les habitudes - Les moeurs - Les coutumes - Les manières et les manies de notre
époque, de Bertall (P. Plon, 1874, 2° édition).
Plusieurs livres du XIXe siècle dépeignent l'étudiant, ses manières, ses compagnes (les hautes études sont suivies avant tout par la gent masculine) … Il est souvent croqué par des caricaturistes le représentant dans des positions lascives, lisant les romans à la mode, vivant en parfaite liberté et harmonie avec sa compagne ... Celle-ci change souvent au fur et à mesure des études. Comme l’écrit Edmond Texier dans son Tableau de Paris (1853) : Il commence généralement son apprentissage de la vie parisienne amoureuse avec une « grisette du pays Latin » dans un romantisme échevelé s’il a de la chance, sinon avec une lorette ou une « demoiselle au numéro » qui est un genre de grisette ambitieuse qui traque l’étudiant comme un ascenseur social ou comme moyen de subsistance. La première année de l’étudiant est donc un moment de déniaisement : « Cette première année de stage comprend les filles que l’on appelle demoiselle au numéro, et qui se rencontrent principalement au Prado, chez Bullier, ou encore au bal des Acacias. Les demoiselles au numéro sont celles qui s’attachent à un hôtel meublé, […] où vient s’entasser la jeunesse studieuse de toute la France, et qui partagent à l’amiable les divers appartements dont elles se composent. Celle-ci est attitrée aux numéros impairs, celle-là aux numéros pairs : l’une ne quitte pas le premier étage, l’autre ne s’élève jamais au dessus du second ou du troisième. Il y aurait entre elles des luttes acharnées et terribles … ». L’étudiant cherche toutes les occasions de fête (réussite aux examens …) : ce qui s’appelle alors faire la noce, c'est-à-dire une fête arrosée de punch etc. A cela s’ajoute « Le bal champêtre, la promenade, les longues stations au café et le cours complet d’éducation morale. […] L’étudiant de troisième année renonce entièrement au pays Latin et à ses pompes ; déjà expert dans la vie de Paris, il poursuit de ses déclarations passionnées les jeunes modistes, les demoiselles de comptoir, les ouvrières qui sortent de leurs ateliers, et même il s’aventure jusqu’à offrir un aperçu de l’état de son coeur à mesdames les actrices de Bobino. Bobino est le théâtre de prédilection de troisième année […] Jadis, dans les jours d’opulence, il pénétrait dans les solitudes de l’Odéon … »
Louis-Sébastien Mercier occupe un chapitre consacré au ‘pays latin’ dans un tome de Tableau de Paris (1781) : « On nomme pays latin le quartier de la rue Saint-Jacques, de la montagne Sainte-Geneviève et de la rue de la harpe. » Le quartier autour de la Sorbonne est déjà celui des étudiants au Moyen-âge. Au XXe siècle, il continue de l'être, et s’étend du jardin des plantes jusqu’à Saint-Germain en passant par le Panthéon et la Sorbonne. Les étudiantes et les étudiants y étudient (oui oui aussi !), passent, se divertissent, boivent aux terrasses des cafés, sortent. Ils y savourent une vie libre, intellectuelle et studieuse. Aujourd'hui cet endroit est beaucoup moins « latin » et les universités plus dispersées, certaines étant en banlieue.
© Article et photographies LM