Lorsqu’une partie de poker illégale est braquée, c’est tout le monde des bas-fonds de la pègre qui est menacé. Les caïds de la Mafia font appel à Jackie Cogan pour trouver les coupables. Mais entre des commanditaires indécis, des escrocs à la petite semaine, des assassins fatigués et ceux qui ont fomenté le coup, Cogan va avoir du mal à garder le contrôle d’une situation qui dégénère…
Le braquage de la salle de poker par les lâches Frankie et Russel
Cette semaine je suis allé voir Cogan, Killing Them Softly d’Andrew Dominik, réalisateur australien qui a entre autre réalisé L’Assassinat de Jesse James par le lâche Robert Ford (film que je n’ai pas aimé, et cela principalement du à sa lenteur excessive).
C’est un véritable révolution qu’opère Andrew Dominik en nous proposant un polar très noir, mêlé aux films de gangsters, tout ça avec un rythme assez lent (mais pas aussi ennuyeux que son film précédent), qui passe outre les codes des films du genre. Un scénario bien écrit, de très bons personnages mais surtout une mise en scène unique, et certaines scènes qui vont devenir des moments d’anthologie.
La chose qui saute aux yeux sur l’affiche ? (bon à part le fusil à pompe) : Brad Pitt. Et ce n’est pourtant pas autour de lui que gravite tout le film, ce qu’on aurait pu penser vu le casting, et c’est plutôt une bonne nouvelle. Après avoir braqué la salle clandestine de poker, Frankie et Russel – deux losers convertis pour l’occasion en braqueurs – sont recherchés par la mafia locale. Jusque là (à part l’ouverture du film) un film assez classique, mais qui va progressivement se transformer en thriller assez inquiétant, très stressant même.
Yes We Can !
C’est sur un fond de crise économique que se base le film : finies les grosses bagnoles, les baraques tape à l’œil et les salaires mirobolants pour les gangsters. Ils sont même obligés d’enfiler des gants de cuisine pour leurs braquages (car « c’étaient les moins chers »). C’est la crise. Et pour tout le monde. Des banlieues pourries au bar miteux, on redécouvre l’Amérique – la vraie – d’un autre œil, comme on ne nous l’avait pas montré depuis un moment. Et c’est justement ce qui permet au film de se démarquer un peu. Les personnages transpirent, ils ont peur, se trompent. Rien à voir avec un gros film hollywoodien.
Andrew Dominik a eu la bonne idée d’intégrer aux scènes du film (sur une télé dans le bar par exemple) des extraits de discours d’Obama ou de Bush, et même en voix-off pendant certaines scènes. Au moment où Obama parle de système économique en faillite, de crise sociale ou d’endettement, on nous montre la crise, mais sous un autre angle : nos deux personnages en galère, pourchassés par la mafia pour avoir braqué un tripot. Une très bonne trouvaille, comme lorsque Jackie Cogan reçoit sa commande pour un meurtre, on peut entendre Obama prononcer « Nous sommes tournés vers l’avenir, pour faire briller la responsabilité ». C’est l’image d’une Amérique complètement ravagée par la crise que nous livre ici Andrew Dominik, une Amérique bien loin du pays qu’on s’imagine, comme le rappelle Cogan (Brad Pitt) à la fin du film « America is not a country, it’s a business ».
« The Man Comes Around »
On le savait (et pourtant je ne m’y attendais pas réellement pour ce film), Andrew Dominik adore les dialogues. Et c’est avec brio que ceux-ci sont écrits dans Cogan. Au final peu de scènes (pour un thriller d’1h37) mais toutes très intéressantes, tant du point de vue de la mise en scène, des dialogues mais aussi de l’image pour certaines d’entre elles. On se souviendra obligatoirement de la scène du meurtre en voiture, filmée au ralenti : absolument sublime, du mouvement de la culasse du pistolet à la balle qui brise la vitre de la voiture et transperce en même temps la main de la victime. Un grand moment de cinéma qui nous fout sur le cul, il faut le dire.
Que rajouter de plus ? Pas grand-chose, mais globalement, même si le film est lent, il reste très captivant. La tension monte (très très haut par moment) puis redescend après, une alternance qui nous rappelle Drive, où Nicolas Winding Refn s’était aussi amusé à jouer sur les contrastes, tant au niveau du scénario qu’au niveau de son personnage principal. Une autre similitude entre ces deux films : des scènes parfois très violentes, très réalistes, qui font vraiment froid dans le dos.