Analyse d'un phénomène qui relève l'incapacité des pouvoirs publics français à produire des politiques publiques incitatrices saines et efficaces .
L'arnaque du petit éolien
Depuis le printemps dernier, le marché du petit éolien a explosé. Les entreprises font du démarchage à domicile et commercialisent des éoliennes de pignon d'une puissance nominale de quelques kw.
Pourtant, l'Association Française des Professionnels du Petit Eolien (AFPPE) tire la sonnette d'alarme: de nombreux commerciaux vendent littéralement "du vent".
Ils annoncent des rendements fantaisistes, ne proposent pas d'étude de vent préalable pour vérifier que le site convient et produira suffisamment pour rendre le projet d'éolienne rentable.
Ils passent sous silence les risques pour la solidité de l'édifice car les éoliennes de pignon, mal conçues et installées, représentent un vrai danger pour les murs d'une maison. Les vibrations détruisent à la longue les joints de maçonnerie horizontales. Ils négligent les nuisances sonores engendrées par l'installation de ce matériel sur un lieu de vie.
Les prévisions sont trop optimistes: une éolienne, pour être efficace, doit disposer d'espaces dégagés pour profiter de vents réguliers.
En zone urbaine dense, au ras des toits, les turbulences provoquées diminuent fortement le rendement de ces petites éoliennes. De nombreux particuliers se retrouvent avec des machines, qu'ils ont payées très chers, et découvrent ensuite que le rendement est si faible qu'ils ne pourront jamais rembourser leur investissement!
Comment expliquer ce phénomène et ces échecs?
Confrontés à l'augmentation des prix de l'énergie, de nombreux ménages ont cru, un peu vite, devenir autonomes et produire eux-même leur électricité. La baisse des tarifs de rachat de l'électricité photovoltaïque a renforcé l'engouement pour ce concept de mini-éolienne urbaine.
Les inquiétudes d'une partie de la population péri-urbaine, la méconnaissance des mécanismes et des lois de l'éolien se sont conjugués pour faire naître un marché qui a trouvé son épanouissement dans les lotissements à la périphérie des grandes villes.
Mais ce qui a favorisé aussi ce phénomène, c'est l'existence du crédit d'impôt qui permet de financer jusqu'à 40% de l'installation. Cette mesure permet aux commerciaux peu scrupuleux de vanter un produit qui va "permettre de ne plus payer d'impôts".
Elle permet surtout de gonfler les prix: une petite éolienne de pignon est commercialisée 12 000 à 15 000 euros alors qu'elle est achetée 1000 euros par le revendeur qui va la chercher en Chine!
C'est une belle plus-value qui se fait aux dépens de l'Etat -et donc du contribuable- les bénéfices de l'entreprise se faisant grâce à une réduction d'impôts ! Comme je l'avais montré dans un autre article, ce type de mesures fiscales environnementales a des effets pervers qui trahissent la cause des politiques environnementales qu'elles sont censées défendre!
D'une manière générale, ces matériels sont vendus à des tarifs qui restent exorbitants. L'auto fabrication d'une éolienne de 3 mètres de diamètre avec son mât de 30 m a eu un prix de revient de 3000 euros de matériaux. Une installation similaire par un professionnel peut être facturée 30 000 à 50 000 euros !
Faut-il abandonner le petit éolien?
Ces arnaques et ces politiques inappropriées risquent de décrédibiliser durablement le petit éolien. Or, celui-ci a des atouts : il permet de compléter la production locale d'énergie électrique et représentera, à terme, un des outils de production au sein des réseaux locaux que constituera l'internet de l'énergie, aux côtés des centrales à cogénérations et des panneaux solaires.
Les petites éoliennes vont permettre de fournir de l'électricité la nuit et participeront à la recharge des batteries des voitures hybrides rechargeables de demain.
Mais il faudra, pour cela, que leur prix de revient baisse fortement, que les machines gagnent en rendement et en confort, que les techniques d'installation s'améliorent, et que les procédures administratives se simplifient comme le réclame l'AFPPE.
Le petit éolien est une technologie nouvelle qui n'a pas besoin de charlatans et de montage financier fantaisistes qui décrédibilisent la filière et la profession. Il faudra aussi cesser ces politiques incitatives basées sur le crédit d'impôt qui vont pervertir la volonté initiale. Il faut préférer la prime à l'investissement au crédit d'impôt.
Sur cette question, je recommande aussi la lecture de l'article de bastamag d'où est extrait la photo qui illustre l'article.