Le nouvel environnement numérique appelle une nouvelle économie

Publié le 18 décembre 2012 par Monartiste

Revoyons les bases avant 2013

La révolution numérique appelle une remise en question et une adaptation rapide, difficilement acceptée par l’industrie.

Cet équilibre industriel fragile vit sans doute ses dernières années. L’industrie musicale n’a en effet pas réagi adéquatement aux deux tournants majeurs propres à l’économie immatérielle.

C’est d’abord l’émergence d’Internet comme support des échanges culturels. La diffusion des biens culturels sous format matériel, quasi-monopole qui était la source principale de revenus des Majors, est alors bouleversée, puisque le Web permet une mise en relation plus facile, et beaucoup moins coûteuse (réduction des dépenses marketing) entre le public et les créateurs de contenus culturels.

Le bien culturel prend une forme numérique facilement duplicable, ce qui le transforme en bien non-rival et non-excluable. Or ce type de bien (un bien collectif) pose de nouvelles difficultés pour couvrir les coûts fixes et oblige à repenser de A à Z les conditions de financement de la création culturelle.

« Lorsqu’on partage un bien matériel, il se divise. Lorsqu’on partage un bien immatériel, il se multiplie »

Intéressons-nous à l’impact de cette nouvelle donne sur l’économie culturelle et son industrie

Le téléchargement gratuit n’est pas la même chose que la piraterie, car la musique, ou le cinéma  n’est pas un objet matériel. Si je vole un pain, celui à qui je le prends ne l’a plus. Si je télécharge de la musique ou du cinéma, je n’en prive personne. L’art obéit donc à d’autres lois économiques, depuis toujours. C’est l’objet des droits d’auteur, qui peuvent être payés par d’autres que le consommateur final.

Pour illustrer ce propos, j’aime utiliser la métaphore de la caverne d’Ali Baba ».

DANS LE MONDE ANALOGIQUE, la caverne d’Ali Baba contenait un certain nombre d’objets physiques (livres, disques, …). Chacun avait le droit d’entrer gratuitement dans la caverne. Quand on prend un objet dans la caverne, on diminue le stock disponible, donc on fait payer à l’acquéreur l’objet qu’il se procure. Le monde numérique présente deux différences par rapport au précédent. Première différence : la caverne est beaucoup plus achalandée que la caverne du monde physique (pas de contrainte physique de stockage). Seconde différence : par un des miracles de la technologie quand quelqu’un prend

un objet, cet objet reste à l’identique et disponible pour les autres utilisateurs; il est donc quasiment impossible de faire payer l’objet qui est emporté par l’acquéreur ; il n’y a plus de tarification possible à l’achat; le seul modèle économique possible, c’est de tarifer l’accès.

Le Nouveau  ou faux problème de la gratuité

Ce qui permet la gratuité dans le monde d’Internet et qui ne serait pas possible dans le monde réel, c’est que sur Internet ça ne coûte « rien » (le coût de l’espace de stockage et de la mémoire vive est divisé par deux chaque année) et que vous avez 6 milliards de clients potentiels. Que vous vendiez à 100 personnes ou 1 milliard de personnes, vous n’augmentez pas vos coûts. Ce qui n’est pas la cas  dans la vie réelle.

Dans « Free, entrons dans l’économie du gratuit », Chris Anderson, montre à travers un passage sur l’industrie de la culture en Chine et au Brésil, Il démontre aussi et surtout, qu’il n’est plus possible de vendre de la culture sur internet, tout ce qui est dématérialisable a sa valeur qui tend vers le zéro.

Il serait naïf ou hypocrite de penser qu’à l’ère du numérique, l’argent ne soit pas déterminant. La gratuité n’est pas tant le problème, la télévision a toujours été gratuite, les nouveaux problèmes qui en résultent le sont à cause à cause de l’effondrement des revenus de la publicité, plus de médias, plus de concurrence donc perte de valeur…Le revenu unitaire de la publicité a baissé à cause d’internet : 1000 sites qui gagnent 1€ ne peuvent investir dans la création autant qu’un site qui gagne 100€. D’où l’impasse d’aujourd’hui.

L’évolution du contexte global, demande aussi un changement dans la manière de « vendre » un film. Les internautes ou les amateurs du cinéma, ne voient plus l’intérêt ou l’avantage de télécharger légalement ou d’aller au cinéma. Il faut apporter une nouvelle raison d’acheter ou de participer. Il faut s’inventer une valeur ajoutée (peut-être dans un accès facilité ? personnalisé, exclusifs ou une expérience) pour retrouver une valeur économique.

Il existe de nombreux modèles économiques du gratuit, une cinquantaine ont été répertoriée dans le livre de Chris Anderson : Free, entrons dans l’économie du gratuit. Le plus répandu est le « freemium » (contraction de premium et free), comprenez : le service de base est gratuit et si vous souhaitez mieux vous devez payer (exemple Deezer, Viméo). Le nombre de personnes que vous allez attirer avec la gratuité de votre service générera des conversions vers l’offre supérieure Premium. Votre objectif sera d’augmenter votre taux de conversion. Il ne parle pas d’ailleurs d’économie du gratuit, comme nous avons pu le voir, mais d’une économie de l’attention, d’un déplacement de la valeur. On y libère l’accès et on fait payer l’expérience. Dans ce monde, le livre électronique est gratuit et sert à faciliter la prise de connaissance, la version papier est payante à cause de son confort de lecture. Mais cela montre aussi qu’aucun modèle ne s’est imposé, aucun n’a encore trouvé l’équilibre permettant de légitiment pensé qu’il peut représenter la solution.  Nous l’avons déjà vu, Pour beaucoup, surtout pour les générations qui n’ont pas connu avant Internet, de nombreux services ou produit ne peuvent plus devenir payants car ils sont en « libre service » sur Internet. Chacun recherche la (les) recette(s) susceptibles d’apporter pérennité et rentabilité à la « nouvelle économie ».

Mais l’erreur serait de s’obstiner à reproduire les modèles économiques d’hier ou un produit avait une valeur et le consommateur devait l’acheter au prix du marché. Beaucoup d’entreprises se sont obstinées à reproduire ce modèle lorsqu’elles sont arrivées sur Internet, et bons nombres d’entre elles ont échoué car la logique n’est plus la même, vous devez accepter d’ « offrir » pour vendre. On perdrait moins de temps à essayer de comprendre la nouvelle façon de penser l’économie que d’essayer de reproduire les modèles d’antan car il est clair que nous entrons dans un siècle « numérique ».