DE LA LETTRE À DIOGNÈTE
« Elle s’est manifestée, la bonté de Dieu notre Sauveur… »
Aucun homme n’a vu Dieu ni ne l’a connu : c’est lui-même qui s’est manifesté. Et il s’est manifesté pour la foi, qui seule a reçu le privilège de voir Dieu. Car Dieu, Maître et Créateur de l’univers, qui a fait toutes choses et les a disposées avec ordre, s’est montré pour les hommes non seulement plein d’amour, mais plein de patience. Toujours il était ainsi, il l’est et le sera : secourable, bon, sans colère, véridique ; lui seul est bon. Ayant conçu un dessein d’une grandeur inexprimable, il ne l’a communiqué qu’à son Enfant.
Tandis qu’il maintenait son sage projet dans le mystère et le tenait en réserve, il semblait nous oublier et ne pas se soucier de nous. Mais quand il eut dévoilé par son Enfant bien-aimé, quand il eut manifesté ce qu’il avait préparé dès le commencement, il nous a tout offert à la fois : de jouir de ses bienfaits, de voir, de comprendre ; qui de nous aurait jamais pu s’y attendre ?
Dieu avait donc déjà tout disposé en lui-même avec son Enfant ; mais, jusqu’à ces derniers temps, il a toléré que nous nous laissions emporter à notre gré par des mouvements désordonnés, entraînés par les voluptés et les passions. Nullement parce qu’il se réjouissait de nos péchés ; il tolérait alors, sans l’approuver, ce règne de l’iniquité. Bien au contraire, il organisait pour maintenant le règne de la justice. Après avoir bien prouvé, dans cette première période, que nos propres œuvres nous rendaient indignes de la vie, il voulait que nous en devenions maintenant dignes par l’effet de sa bonté. Il voulait qu’après nous être montrés incapables d’accéder par nous-mêmes au royaume de Dieu, nous en devenions capables par sa puissance.
Lorsque notre perversité fut à son comble, et qu’il fut devenu pleinement manifeste que son salaire — le supplice et la mort — était imminent, c’est alors qu’arriva le temps que Dieu avait marqué pour faire connaître désormais sa bonté et sa puissance : quelle surabondance de l’amour de Dieu et de sa bonté pour les hommes ! Il ne nous a pas détestés, il ne nous a pas repoussés, il ne nous a pas tenu rancune ; au contraire, il a longtemps patienté, il nous a supportés. Dans sa pitié pour nous, il a pris en charge nos propres péchés, il a livré son propre Fils pour nous racheter : le saint pour les criminels, l’innocent pour les méchants, le juste pour les injustes, l’incorruptible pour les corrompus, l’immortel pour les mortels. Qu’est-ce qui aurait pu couvrir nos péchés, sinon sa justice ? Par qui pouvions-nous être rendus justes, criminels et impies que nous étions, sinon par le seul Fils de Dieu ?
Quel échange plein de douceur ! Quelle réalisation insondable ! Quels bienfaits inespérés ! Le crime du grand nombre est enseveli dans la justice d’un seul, et la justice d’un seul rend juste un grand nombre de criminels !