Résumé: Bilbon Sacquet (Martin Freeman), un paisible hobbit de la Comté, voit un jour débarquer chez lui le magicien Gandalf (Ian McKellen), accompagné d’une troupe de 13 nains. Ceux-ci sont en route pour Erebor, leur ancienne cité, qui a été annexée par le dragon Smaug des dizaines d’années auparavant. Pour tenter de reconquérir la cité, les nains ont besoin d’un quatorzième compagnon, capable de se glisser silencieusement devant le dragon, d’où leur présence chez Bilbon. D’abord réticent, celui-ci finit par accepter de les accompagner dans une aventure qui le changera à jamais et modifiera le destin de la Terre du Milieu…
Quasiment dix ans après Le Retour du Roi, Peter Jackson revient en Terre du Milieu pour une nouvelle trilogie, cette fois adaptée du roman Bilbo le Hobbit. Etant donné les circonstances dans lesquelles le réalisateur a dû accepter de s’atteler à cette nouvelle trilogie (forcé par les événements de reprendre le flambeau après les déboires de la MGM et le départ de Guillermo del Toro), on aurait pu craindre que celui-ci assure le minimum syndical juste pour faire marcher la machine à pognon (crainte amplifiée par l’annonce du découpage de l’histoire en trois films au lieu de deux). Fort heureusement, il n’en est rien, et ce Voyage Inattendu est une nouvelle pierre maitresse dans l’édifice de cette œuvre colossale.
En tant qu’épisode d’ouverture de cette nouvelle trilogie, Un Voyage Inattendu a la lourde et ingrate tâche de servir d’introduction à l’aventure qui va suivre. On se souvient qu’a l’époque de la sortie de La Communauté de l’Anneau, on avait beaucoup reproché à Peter Jackson de trop prendre son temps et de ne pas proposer assez de morceaux de bravoures. Sans surprise, les mêmes reproches sont aujourd’hui faits à ce nouveau film. Des reproches totalement infondés, tant il est évident à l’écran que Jackson et ses scénaristes ont effectué un travail titanesque pour proposer un film à la fois ouvert au profanes sans pour autant ennuyer les fans de la trilogie du Seigneur des Anneaux. Un Voyage Inattendu réussit ainsi avec brio à présenter pas moins de 14 nouveaux personnages (à des degrés plus ou moins importants certes) tout en réintroduisant certains personnages-phares de la première trilogie, sans pour autant rentrer dans trop de détails. Peter Jackson fait avec intelligence de nombreux parallèles avec la première trilogie (voir la scène dans laquelle Bilbon enfile l’anneau unique pour la première fois, miroir de la scène de la taverne dans La Communauté de l’Anneau) sans pour autant sombrer dans la redite pure et simple. Les parallèles entre les deux films sont nombreux, notamment en termes de construction, mais ceux-ci ne paraissent jamais incongrus ou insérés au forceps (contrairement à une autre célèbre prélogie se déroulant dans une galaxie lointaine). Plus que du fan-service, ces nombreuses correspondances entre les deux trilogies montrent un vrai souci de cohérence entre des œuvres ayant tout de même en gros dix ans d’écart. Un Voyage Inattendu possède ainsi son propre ton, beaucoup plus léger que celui de La Communauté de l’Anneau, et ses propres personnages.
Des personnages que le spectateur apprend à connaitre et à apprécier pendant ce premier film, au point que, s’il ne font pas oublier Frodon, Sam ou Aragorn, ils ne font pas non plus pâle figure à côté de ces héros maintenant mythiques, ni ne sont des décalques pâlots de ceux-ci. A cet égard, on ne pourra que saluer une fois de plus le casting parfait du film, à commencer par le choix de Martin Freeman dans le rôle de Bilbon. L’acteur britannique est incroyablement crédible dans le rôle de ce hobbit tranquille qui se laisse entrainer malgré lui dans une aventure qui le dépasse, et deviendra petit à petit un héros. La scène de sa rencontre avec Gollum restera comme un des très grands moments du film, à la fois drôle, stressant et jubilatoire de par ses implications sur l’histoire du Seigneur des Anneaux. L’autre révélation du film est bien sur Richard Armitage, qui incarne le fier Thorin, petit-fils du roi d’Erebor et leader de la fine équipe. L’acteur, que l’on a pu voir notamment dans la série TV MI-5 ou dans Captain America, fait preuve d’un excellent charisme et s’impose sans souci en leader naturel tiraillé par ses démons (dont sa haine des elfes).
La pseudo lenteur d’Un Voyage Inattendu permet aussi au réalisateur de planter son décor, de présenter les nombreux dangers planant autour des héros (certaines menaces n’interviendront que dans les prochains films, mais on en salive d’avance) et de décupler l’impact des scènes d’action du dernier tiers du film. Nul doute que les épisodes suivants seront certainement plus actifs, mais il est agréable de voir un réalisateur n’oubliant pas que l’action doit découler de l’intrigue et non l’inverse. L’action est d’ailleurs bien présente, et Un Voyage Inattendu propose d’excellents morceaux de bravoure, que ce soit un affrontement entre géants de pierre, une fuite éperdue dans un repaire de gobelins, et plusieurs batailles contre des troupes d’orcs. Peter Jackson prouve qu’il n’a rien perdu de sa maitrise dans les scènes d’action, et renvoie dans les cordes la plupart des blockbusters de l’année en termes d’inventivité au niveau de la réalisation. Et si la première heure du métrage est un peu avare en action (encore que l’ébouriffant flashback sur la prise d’Erebor par le dragon Smaug est un morceau de bravoure assez incroyable), c’est aussi un bon moyen de poser les personnages et de préparer la suite. Une stratégie qui s’avère tout à fait payante, puisque même si ce premier film n’est que le tout début de l’aventure, on ne peut qu’être épaté par le chemin psychologique et initiatique parcouru par les personnages au terme du long-métrage.
Impossible enfin de ne pas signaler l’excellente partition d’Howard Shore, de retour auprès de Peter Jackson, qui réadapte avec brio certains des plus grands thèmes du Seigneur des Anneaux (malgré quelques incohérences dans l’utilisation de certains d’entre eux), tout en ajoutant de nouvelles mémorables partitions (le thème des nains et la chanson qui l’accompagne). Les envolées lyriques de la bande originale accompagnent une fois de plus parfaitement les superbes images de la Nouvelle-Zélande.
Apres un Lovely Bones en demi-teinte, Peter Jackson revient pleinement aux affaires avec ce retour dans l’univers de Tolkien. Même si on est impatient de voir ce que donnera le second épisode de Tintin sous sa direction, force est de constater que l’on est plus qu’heureux de retourner avec lui fouler la Terre du Milieu. Et après cette mise en bouche magique, l’attente va être très longue jusqu’à Noel 2013…
Note : 9/10
USA, Nouvelle-Zélande, 2012
Réalisation : Peter Jackson
Scénario : Fran Walsh, Philippa Boyens, Peter Jackson, Guillermo del Toro
Avec : Martin Freeman, Richard Armitage, Ian McKellen, Ken Stott, Aidan Turner, Ian Holm, Andy Serkis, Elijah Wood, Hugo Weaving, Cate Blanchett, Christopher Lee
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