Quand on veut écrire un roman, forcément, on veut être original. A quoi bon écrire quelque chose que quelqu’un d’autre à déjà écrit? En plus, ça s’appelle tout simplement du plagiat, et ça, c’est mal. Alors forcément, on cherche une idée originale, nouvelle, quelque chose d’inédit. Et souvent, on croit la trouver.
Oui mais, tous les auteurs vous le dirons, depuis le temps que l’homme pense, invente, raconte des histoires et écrit, il n’y a plus beaucoup de place pour la nouveauté. Qu’on se le dise: on est rarement le seul à avoir une même idée, et on est encore plus rarement le premier à l’avoir. J’irai même encore plus loin en disant que selon moi, l’originalité n’existe pas. Et je ne suis sans doute pas la seule à voir eu cette idée. Peut être même que quelqu’un a écrit un livre sur ça
Si on regarde sur le wikitionnaire, au mot « original » en tant qu’adjectif on trouve les définitions suivantes:
-Qui n’a pas été fait d’après un modèle
- Qui paraît inventé, imaginé sans aucun souvenir qui précède.
- Qui écrivent, qui travaillent d’une manière neuve, non empruntée, non imitée, en parlant d’une personne.
Quand on y réfléchit, il parait peu probable qu’une telle chose existe. Que peut-on bien créer sans « souvenir qui précède »? Peut-on vraiment créer quelque chose à partir de rien? Il semble que ce soit là la définition même de Dieu, où en tout cas un de ces caractères essentiels, celui de pouvoir créer à partir du néant. Personne ne peut dire comment le Tout peut émerger du Néant. Ni même comment quelque chose peut en sortir. C’est là tout le mystère de l’Univers. Alors autant dire que vouloir être vraiment original relève de l’impossible, je crois
D’ailleurs, ne dit-on pas qu’à l’essence même de la création il y a ce qu’on appelle l’inspiration? L’inspiration signifiant « avoir Dieu en soi », d’ailleurs. Mais comme on peut douter que ce soit Dieu qui nous souffle les bonnes idées, d’où alors nous viennent-elles? Il n’y a qu’une seule réponse possible: de ce que l’on connait. Ce qui nous entoure, la nature, les autres hommes, son propre vécu et celui des autres, ses propres émotions et celles des autres… Parfois consciemment et souvent inconsciemment, on créé du nouveau à partir de ce qui existe déjà. C’est nouveau, mais ce n’est pas « original ». A mon avis, les seules idées soit disant « originales » qu’il reste doivent être les plus mauvaises
I look stupid but at least I’m original
Je tournais une scène de bondage et j’ai pas eu le temps de me changer
A tel point que la vraie « originalité » aujourd’hui serait de ne pas chercher à l’être, m’enfin. En tout cas cette réflexion s’applique très bien au domaine de l’écriture. Si l’on résumait tous les romans en 3 lignes, on verrait bien qu’il n’y a pas grand chose qui les différencie. Il n’y a pas 36 000 façons d’inventer une histoire. On l’apprend même à l’école, pour avoir une histoire il faut:
- un personnage principal (ou plusieurs)
- un point de départ
- un élément déclencheur
- une quête ou objectif
- des péripéties
- un dénouement
Il faut bien qu’il y ai des problèmes, des contradictions, que quelque chose se passe, sinon c’est pas une histoire, et on en fait pas un roman, sinon ça n’intéresse personne. Je ne dis pas que l’on ne peut pas faire autrement, mais si on veut raconter une histoire, il n’y a pas d’histoire avec un début un milieu et une fin sans ces éléments. Ca c’est le noyau dur. Ensuite si on prend le style policier, on aura un criminel, un enquêteur, des crimes. Si on prend un roman d’amour il y aura une rencontre et des déchirements. Si on prend une histoire fantastique/sci-fi de super héros, on aura un super héros, des pouvoirs spécifiques, quelque chose à protéger et forcément, un méchant. Cela ne signifie pas qu’on ne peut pas être « original dans le sens d’apporter du nouveau, c’est pas ça le problème. De Moïse à Spider Man, on ne peut pas dire qu’il n’y a pas eu de changement!
Si je parle de tout cela, c’est parce que pour la énième fois, je reprends mon roman depuis le début. Mais vraiment depuis le point de départ: la trame, en quelques lignes, de l’histoire. Autour de mon problème, de ce que je veux chercher à montrer, j’ai réfléchi pendant des heures à ce que je pourrai bien concevoir comme histoire. La toute première fois que j’ai imaginé « cette » histoire il y a quelques années, j’ai réalisé plus tard que j’étais en train de faire un remake du livre « Le meilleur des mondes » de Huxley. Je ne l’avais jamais lu, je ne connaissais même pas son existence à l’époque. Donc il a fallu tout revoir et puis de toute façon, avec le temps, j’avais complètement changé d’idée. Puis j’ai davantage réfléchi à ma société idéale et à comment faire pour la décrire à travers mon roman, à tel point que je n’avais plus vraiment d’histoire à raconter. Seulement un setting. Autant écrire un essai! A cause de ça j’ai longtemps été bloquée. Voulant à tout prix décrire ma société idéale, je ne savais comment en faire une histoire, parce que pour avoir une histoire il faut un problème, or ma société idéale étant idéale, il ne pouvait pas y avoir de problème
Et puis bon, j’ai beau chercher, je ne trouve pas l’idée du siècle, que dis-je du millénaire! Je ne trouve pas l’idée qui n’a jamais, jamais, été traitée d’une façon ou d’une autre. Je n’arrive pas à être originale. C’est ainsi que je me demande pourquoi je ne peux pas être originale. Et c’est ainsi que cet article est né
Et je me rassure comme j’ai tenté de le faire ici, en me disant que la trame de l’histoire ne sera peut-être pas fondamentalement originale et que temps pis. Je vais quand même éviter de faire un remake d’un autre roman, bien entendu, même si j’aurai adoré écrire K-Pax