Au lieu de proposer l'expropriation des propriétaires privés, pourquoi Mme Duflot ne fait-elle pas profiter les sans-abris des bâtiments publics ?
Par Ulrich Génisson.
Je suis né et j’habite à deux pas d’un « monument » de l’histoire de France, qui a vu se succéder les plus grands souverains aux cours des siècles, c'est-à-dire le Château de Fontainebleau en Seine et Marne.
L’histoire de l’art où la généalogie de la maison de Bourbon ne sera pas le sujet du jour, je compte plutôt vous parler d’hypocrisie politique et de gabegie financière. Un grand nom du bolchevisme français m’ayant qualifié un jour de « méchant libéral de l’immobilier », je vais donc m’employer une fois de plus à œuvrer dans ce domaine, c'est-à-dire celui de la liberté dans le secteur du logement.
Le Château de Fontainebleau est un ouvrage extraordinaire et ne manquera pas d’intéresser l’érudit de l’histoire de France, le touriste étranger en manque de connaissances sur le pays de Louis le quatorzième, ou encore le bonapartiste nostalgique des heures de gloire en manque d’un leader à l’UMP. Je vous encourage donc à venir visiter Fontainebleau et à faire tourner le commerce local.
Une nouvelle fois, ce billet sera rédigé sur le ton de la colère. La colère qui m’anime est celle qu’on éprouve face à l’irresponsabilité des personnes qui décident pour vous, avec votre argent, sans aucun compte à rendre si ce n’est à leur ego démesuré.
Dernièrement notre ministre de l’égalité des territoires et du logement a déclaré que la réquisition de logements vides allait être mise en place d’ici quelques jours pour permettre aux sans-abri d’avoir un toit pour l’hiver. Dont acte, désormais on sait que la propriété privée n’existe plus. On sait maintenant qu’à tout moment l’État peut intervenir, légiférer pour légaliser une occupation hier illégale. L’État fait donc fi du plus élémentaire des droits, faisant fi aussi des règlementations dans le secteur du logement, de la salubrité, de la sécurité et surtout de la liberté des contrats. L’État, par l’intermédiaire du son ministre, se débarrasse de ce qui fait de lui un État de droit positif, tout en piétinant un peu plus le droit naturel des individus. L’État désormais, devient chaque jour un peu plus le gardien du droit de fermer sa gueule.
Il sera je pense inutile de s’offusquer, de s’énerver ou de crier au voleur, car « l’État, c’est de toute façon plus fort que toi ! »
Néanmoins, je voudrais attirer l’attention de mes lecteurs sur les opportunités que l’État écarte pour assouvir son besoin irrépressible d’égalité. En effet – par chez moi – au Château de Fontainebleau, il y a tout un pavillon qui pourrait parfaitement remplir le besoin pressant du ministre, de pouvoir dormir tranquillement bien au chaud en s’imaginant que la totalité de ses indigents, de gré ou de force, dormira aussi au chaud cet hiver.
Depuis des décennies, ce bâtiment désaffecté dénommé « Quartier Henri IV du Château de Fontainebleau » d’une surface utile d’environ 4700m², propriété de l’EPCF « Établissement Public du Château de Fontainebleau », pourrait à lui seul accueillir le bon millier de SDF de Seine et Marne.
Voici ce qu’on peut lire dans un communiqué de la préfecture de Seine et Marne sur ce bâtiment :
Construit sous Henri IV, l'ensemble architectural dénommé "Quartier Henri IV" est constitué de bâtiments de service élevés à l'emplacement de l'ancienne avant-cour du château, située à l'est de la cour Ovale. Cet ensemble est caractéristique de l'architecture briques et pierres du début du XVIIe siècle. Longtemps affectés à l'armée, ces bâtiments ont été rendus au château après le départ, en 1965, des troupes de l'OTAN stationnées en France. Le projet, en 1998, d'y installer le Centre Européen de Musique de Chambre géré par l’association Pro-quartet, notamment pour ses activités de master-classes, en a motivé la restauration. L'étude préalable conduite par l’ACMH en 2000 a révélé un état de vétusté et d'insalubrité critique des bâtiments, tant pour ses façades, que pour ses structures et ses dispositions intérieures. Les principaux murs des trois ailes étaient affectés de basculements provenant d'une poussée anormale des charpentes. Les travaux clos et couvert s'achèvent.
Les travaux débutent ainsi en 2005 sous la direction de l’architecte en chef des monuments historique, en la personne de Jacques Moulin. Ce sera donc une première tranche de 12 000 000 € qui sera dépensée pour le gros œuvre. Cette première tranche de travaux fut terminée fin 2009. Ceci en prévision de l’installation pour 10 000 000 € de plus du conservatoire de musique de chambre Pro-Quartet. Qui ne se fera jamais.
Nous avons donc un bâtiment qui est une propriété publique, resté inoccupé des décennies, que l’état décide de restaurer sur fonds publics pour y installer le « Centre Européen de Musique de Chambre » Pro-Quartet.
Se retrouvant avec un bâtiment sans affectation après l’échec du projet « musique de chambre », j’imagine que certains ont dû se creuser les méninges, et en particulier Lionel Walker élu (DVG) chargé du tourisme, pour vouloir y installer « Le Pôle d’Excellence du Tourisme ». Avant lui le Ministre de la Relance (Patrick Devedjian) y avait été aussi à coup de millions pour la musique de chambre, chacun ayant ses préoccupations, l’important étant de dépenser l’argent du peuple efficacement – nous dira-t-on.
D’une surface utile de 4700m², l’ouvrage accueillera sur un peu plus de 2000m² le pôle d’excellence du tourisme (IFT Paris-Est - Fontainebleau) – en théorie mi 2014 – après que la dernière tranche des travaux qui débutera mi-2013 soit terminée. IFT qui mettra en place un Doctorat (je cite d’une manière anecdotique au passage : « portant sur la valorisation du tourisme d’affaires au moyen du train à grande vitesse ») fera je suis sûr, progresser très largement la compétitivité de l’industrie du tourisme français.
Petit rappel des frais engagés :
En 2005 pour les travaux de clos et de couvert, c'est-à-dire les murs et les toitures, la somme de 12 000 000 €.
En 2010 les travaux sont arrêtés et le bâtiment se retrouve sans affectation puisque le projet de conservatoire de musique de chambre est abandonné.
En 2012 on prévoit d’y installer le pôle d’excellence du tourisme pour 8 000 000 € (dont 3 000 000 € pour le département de Seine et Marne, 3 000 000 € par la région Île de France, 2 000 000 € par l’État). Tout ceci sur une grosse moitié du site.
Le bilan est d’environ 20 000 000 € de dépense publique. Inutile de rappeler que trouver des chiffres précis est une mission impossible, les hommes politiques de droite et de gauche ayant ceci en commun, d’être précis au centime sur les appels d’offres, et se suffisent d’être au million prêt pour expliquer les dérives au moment de la réception des travaux.
Bon, revenons à nos moutons (le contribuable), non… nos SDF plutôt. Ça ne fait pas leurs affaires pour le moment toutes ces histoires de château, de musique de chambre et de tourisme.
En 2010 Pro-Quartet devait s’installer au château. En 2014 ce sera normalement le pôle d’excellence du tourisme qui devrait s’y installer, mais les travaux ne débuteront qu’en juin 2013, ce qui nous laisse le bâtiment tout l’hiver 2012/2013 pour les sans-abris.
Alors, chiche Madame le Ministre ? Que pourriez-vous faire de mieux pour le tourisme français que de faire savoir au monde entier que la France loge ses nécessiteux dans des châteaux ? Quelle belle publicité pour le pays qui a guillotiné son roi !
Dans l’hypothèse ou la place viendrait à manquer, ou si vous souhaitiez loger quelques parisiens un peu trop nombreux pour la capitale, à Fontainebleau nous avons des hectares de casernements désaffectés depuis très longtemps, la place ne manque donc pas dans les bâtiments publics en France, inutile d’aller spolier les entreprises et les particuliers, aucune procédure ni recours pour y avoir accès, c’est déjà à vous ! Logez vos gens chez vous Madame, pas chez les autres ! Je ne manquerai pas de faire un reportage photo prochainement sur le sujet des casernements de Fontainebleau.
Enfin si par miracle madame le Ministre avait un petit creux dans son agenda lui laissant le temps de flâner sur internet et de lire mes délires libéraux, je me permets d’ajouter à Madame le Ministre de l’égalité des territoires et du logement que, si elle souhaite une idée de voyage dans l’hémisphère sud pour cet été sans mari et enfants, je l’encourage, accompagnée du ministre de la culture, à se rendre aux États-Unis, en Caroline du Nord dans la ville de Asheville pour y découvrir le domaine « Biltmore ». Je suis persuadé, que les Américains seraient très honorés d’apprendre à quelques Français en mal de bonne gestion et d’idées de mise en valeur de patrimoine culturel, comment gérer au mieux l’héritage de nos aïeux… Mais ceci est une autre histoire...
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