Pour lutter contre les "déserts médicaux", résultats de l'étatisation de la médecine, le ministre de la Santé propose une solution bureaucratique. De l’art de croire qu’une nouvelle dose de poison contrecarrera les effets du poison…
Par Thibault Doidy de Kerguelen.
Marisol Touraine, ministre de la Santé.
Étonnante logique que celle de nos gouvernants. Après avoir corseté le milieu de la santé, l’avoir archi-réglementé, avoir jeté à la vindicte populaire les praticiens qui revendiquaient le droit de gagner ce que gagnent tous ceux qui ont le même niveau d’études, et créé un contexte décourageant qui fait fuir les jeunes médecins, voici que la ministre de la Santé, Marisol Touraine, dévoile le jeudi 13 décembre, depuis Scorbé-Clairvaux, une petite commune de la Vienne, un « plan de lutte » contre les déserts médicaux !
Les jeunes fuient l’exercice libéral
Oui, aujourd’hui, moins de 10% des jeunes diplômés choisissent la pratique libérale, ils préfèrent travailler en tant que salariés, que ce soit à l’hôpital, dans des centres de santé ou dans des maisons de santé pluridisciplinaires (MSP). Oui, aujourd’hui, avec les contraintes administratives, les « contrôles-sécu » à tout-va, les tracasseries stupides, de plus en plus de médecins qui exerçaient jusqu’alors en libéral dans des communes excentrées ou dans des quartiers défavorisés, souvent seuls dans leurs cabinets, mettent la clé sous la porte sans trouver de successeur. Apparaissent alors ce que nous appelons des « déserts médicaux ».
Le nouveau « pacte territoires-santé »
Alors, pour pallier les carences issues d’une mauvaise gestion de la santé en France, on invente un nouveau « machin » administratif : le « pacte territoires-santé » présenté par Mme Touraine. Voici ce qui nous est présenté dans ce « plan ». Il s’agit d’une douzaine d’engagements, dont un revenu garanti dès 2013 et pour deux ans pour 200 praticiens territoriaux de médecine générale, des forfaits versés aux maisons de santé pluridisciplinaires (MSP), des expérimentations de télémédecine – en commençant par la dermatologie –, une accélération des transferts de compétences, d’abord en ophtalmologie, l’autorisation à des médecins salariés d’exercer en libéral sans perdre leur statut, l’adaptation des hôpitaux de proximité et le renforcement des centres de santé. Autrement dit, une fonctionnarisation des médecins qui dépendront pour une part encore plus importante de l’État, une batardisation des statuts, un retour des dispensaires via « l’adaptation des hôpitaux de proximité » et la télémédecine qu’on refuse aux libéraux.
Pourquoi faire simple quand on peut faire compliqué
Et si, au lieu de cela, on considérait que les médecins avaient le droit de travailler autant d’heures qu’ils le souhaitent, de voir autant de patients qu’ils le souhaitent, de prescrire les examens qui leurs semblent nécessaires, et si on leur autorisait la pratique de la télémédecine dans le cadre de leur spécialité, et si on leur fichait la paix sur les dépassements d’honoraires pris le soir, le weekend, et si on les laissait facturer les frais de déplacements en tenant compte du temps passé sur la route, si on les autorisait à avoir dans leurs cabinets des appareils d’examen…
Et si, après cela, on laissait les communes choisir leurs politiques d’incitation à l’établissement ? Certaines choisiraient une exonération fiscale, d’autres la mise à disposition de locaux, voire de logements ; d’autres la création de maisons de santé susceptibles de créer des flux de patients, d’autres l’installation de maisons de retraites ou de convalescence pour assurer une clientèle captive, bref les élus locaux gèreraient leurs problématiques d’offre en matière de santé et les professionnels seraient assurés de pouvoir exercer en toute liberté et de manière rémunératrice…
Et vous savez quoi ? Cela rendrait à nouveau la profession attirante : vivre en campagne avec un statut de « notable » local, en gagnant correctement sa vie est attractif pour un grand nombre de jeunes diplômés. Cela coûterait beaucoup moins cher à la collectivité, améliorerait le niveau des soins et participerait à la reconstitution du tissu rural. Mais est-ce bien cela que l’on recherche ?
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