Ce 12 decembre est enfin sorti l’un des films les plus attendus de l’année: Le Hobbit – Un voyage inattendu, premier film d’une nouvelle trilogie mise en scène par Peter Jackson, préquelle de sa trilogie oscarisée Le Seigneur des anneaux.
Les déboires financiers de la MGM avaient pesé sur la conception de l’adaptation du premier livre de JRR Tolkien se déroulant dans la Terre du Milieu. En effet, Guillermo Del Toro, réalisateur estimé de L’Echine du diable, Le Labyrinthe de Pan, Blade 2 et des deux Hellboy, devait être, à l’origine, a la tête de cette gigantesque entreprise. Durant deux ans, il parti en Nouvelle Zélande pour travailler avec Peter Jackson, Fran Walsh et Philippa Boyens (le trio gagnant de scénaristes des films de Peter Jackson depuis Braindead) sur l’adaptation de la célèbre œuvre de JRR Tolkien. Mais ces deux années lui ont paru très longues, surtout lorsque le feu vert du studio pour démarrer le tournage était sans cesse repoussé. Il a préféré abandonner, cette situation devenant impossible vis-à-vis de ses proches, pour se lancer dans une adaptation d’une nouvelle de HP Lovecraft, Les Montagnes hallucinées, projet qu‘il a en tête depuis une quinzaine d‘années (qui s‘est vue stoppée net quelques jours avant le tournage par le studio, trop frileux de produire un film d‘horreur à plus de 100 millions de dollars, malgré les valeurs sûres que sont James Cameron en producteur et Tom Cruise en tête d‘affiche, mais ceci est une autre histoire…).
Peter Jackson a donc choisi de reprendre le flambeau, lui qui, à l’origine, ne voulait pas réendosser la place de metteur en scène, sachant que la première trilogie lui avait couté presque 10 ans de sa vie. Avec l’appui de la Warner et un budget estimé à 1 milliard de dollars, marketing inclus, le réalisateur néo-zélandais est donc reparti en Terre du Milieu pour un tournage d’à peu près un an (si on compte la pré et la post production, les sept ans sont largement atteints). Tous les fans du Seigneur des anneaux sont donc rassurés, le patron reprend les commandes et la plupart des acteurs reprennent le rôle qui les a rendu célèbres. Il s’est tellement investi une nouvelle fois dans l’écriture que son dyptique s’est transformé en trilogie. Rien de marketing dans cette évolution. Au contraire. Le réalisateur a décidé de rajouter à son récit tous les appendices écrit par Tolkien (dont les droits étaient accessibles) qui complétaient l’histoire de Bilbo le hobbit. D’où la reprise du tournage au premier semestre 2013 qui complètera essentiellement le troisième volet.
On connait Peter Jackson pour sa générosité. Et quelle générosité ! Elle transpire durant tout le premier volet du Hobbit. Il y en a même trop. Et c’est par là que le film pêche. Un défaut dont il ne faut pas trop se plaindre parce que rares sont les réalisateurs de la trempe de Peter Jackson. Mais cet excès de générosité fait presque de cette préquelle un film qu’il faut voir après Le Seigneur des anneaux et non pas un film qu’on peut voir avant (on pense notamment aux plus jeunes que les parents emmèneront sans doute voir The Hobbit pour leur faire découvrir l’univers de Tolkien avant qu’ils ne soient en âge de voir Le Seigneur des anneaux). Et c’est là qu’on peut comprendre certaines mauvaises langues qui qualifient le film de redite de La Communauté de l’anneau. Parce que le film, via certaines scènes, nous renvoie sans cesse à la trilogie du Seigneur des anneaux, nous rappelle à nos bons souvenirs et nous empêche de rentrer à fond dans le film. Mais lorsque Peter Jackson abandonne (quasiment) ce léger défaut, une fois passée la scène a Rivendel, chez les Elfes, le film nous emporte pour de bon. Et enfin on se prend la claque qu’on attendait tous.
On peut également constater qu’un grand comme Peter Jackson a encore évolué. Sa réalisation est encore meilleure, encore plus ample et encore plus homérique (côtoyer des réalisateurs comme Steven Spielberg, James Cameron, Martin Scorsese ou Guillermo Del Toro n‘est surement pas innocent). Ceux qui disent que le film n’a rien d’épique peuvent arrêter d’être critiques. Comment fallait-il le mettre en scène pour satisfaire ces derniers? Comment Peter Jackson pouvait-il faire mieux? Comme à son habitude, il a su rendre les décors imaginaires délivrés par Weta digital, sa boite de production d’effets spéciaux, grandioses et magnifiques, si ce n‘est plus qu’il y a dix ans. Les plans séquences sont encore plus immersifs. Sa caméra, toujours au bon endroit, nous fait comprendre l’action à la perfection (pas besoin de secouer la caméra pour nous faire comprendre le danger). Ses plans aériens appuient la notion de gigantisme autant sur les lieux traversés que sur la quête en elle-même. Sans parler de la direction d’acteurs toujours aussi juste. Chaque acteur s’impose dans son personnage, Martin Freeman en tête, vraiment excellent dans le rôle de Bilbo, véritable spectateur de la quête de Thorin, roi des Nains déchu, au même titre que le spectateur dans la salle. Ce dernier est interprété par Richard Armitage, aussi imposant que Viggo Mortensen en son temps dans celui d’Aragorn. On reconnaitra aussi James Nesbitt, rôle titre de Jekyll, excellente mini série de Stephen Moffat (scénariste du Tintin de Spielberg et créateur de Sherlock, série avec Martin Freeman dans le rôle du Dr Watson… le monde est petit), dans le rôle du nain Bofur qui crève l‘écran malgré son rôle secondaire. De plus, il a enfin abandonné le ralenti saccadé qui ne sied pas vraiment à ses précédents métrages (surtout dans King Kong et la scène de la capture de Naomie Watts). Bien que le ton du film soit plus léger que celui du Seigneur des anneaux, vous sortirez essoufflés par la quête initiatique de Bilbo, inspirée du monomythe de Joseph Campbell.
Collaboration de Xavier.