De la crise économique à la crise écologique
La Crise économique est toujours là. Depuis 2007, elle s'incruste dans nos vies et nos économies. Chacune espère que nous allons bientôt en sortir. Les analystes guettent la sortie, la reprise tant espérée. Et pourtant, elle ne s'arrêtera pas, la reprise ne viendra pas.
La grande majorité des économistes n'en ont pas compris la véritable nature du phénomène que nous subissons. Ils nous décrivent une crise financière ayant entraîné une crise des dettes publiques. Ils nous expliquent maintenant que la récession est devenue générale.
Ce schéma explicatif est celui d'universitaires et de chercheurs ayant une analyse globale et macroéconomique de la situation. Quand ils adoptent un point de vue microéconomique, ils décrivent des entreprises aux carnets de commandes vides, qui attendent le redémarrage en faisant le gros dos.
Alors, pourquoi cela ne redémarre pas? Pour le comprendre, il faut adopter le point de vue d'autres acteurs économiques.
Prenons un établissement public, un collège par exemple. Depuis six ans, les comptes de ces organismes sont fortement contraints par les coûts croissants du gaz, du fuel, de l'électricité et de l'eau. Ce que les agents comptables appellent le "chapitre viabilisation" prend une place de plus en plus démesurée (parfois 50 à 70%). Les budgets n'augmentant pas, c'est la part relative à la pédagogie qui ne fait que baisser. Cela a deux conséquences: l'enrichissement des grandes compagnies et des pays qui commercialisent ces ressources, la faiblesse croissante des entreprises souvent locales qui vendent des prestations de sorties pour les élèves et du matériel pédagogique.
Prenons un autre exemple: un jeune ménage qui a acheté ou loué un appartement ou une maison. La demande de logements et les tensions sur le marché immobilier ont entraîné une augmentation importante des prix depuis une quinzaine d'années. Désormais, le logement d'un ménage représente le tiers ou la moitié de son budget. Cette situation s'est aggravée avec l'augmentation des prix de l'énergie.
Cette part croissante du logement a obligé chaque ménage à faire des économies: elles se font sur les loisirs (vacances, restaurants, culture) et la consommation. Les entreprises locales qui vendent du loisir ou qui produisent et vendent des biens ne verront pas revenir des consommateurs dont les budgets sont fortement impactés durablement par le coût croissant des logements et de l'énergie.
Ces deux exemples peuvent être généralisés. Les entreprises - grandes et petites-, les administrations et les particuliers: tout le monde est confronté aux coûts croissants de ces ressources.
Il n'y a aucune raison que ces phénomènes s'arrêtent, il n'y a pas à rechercher de reprise dans ces secteurs. L'augmentation des prix de l'immobilier et de l'énergie sont des phénomènes durables. Cela s'est fait brutalement et cela va durer longtemps car l'offre de ces biens ne peut plus répondre à la demande.
Le phénomène doit être appréhendé d'une manière globale. Les ressources nécessaires au fonctionnement d'une économie -les terrains constructibles, les hydrocarbures, l'eau potable, ... - sont de plus en plus rares. La tension entre une demande croissante et une offre stable ou déclinante ne cesse de croître.
Les processus en cours proviennent donc d'une crise qu'il faut qualifier d'écologique. Cette crise trouve ses racines dans l'insuffisance croissante et durable des ressources nécessaires au fonctionnement d'une économie.
Les origines de la crise actuelle sont d'ailleurs fortement imprégnées de la crise écologique des ressources. La crise des subprimes de 2007 naît une période d'augmentation des prix de l'immobilier aux Etats-unis. Les subprimes ont été "inventé" pour trouver des ressources financières pour les Américains impécunieux. Cela s'est produit dans une période d'augmentation importante des prix des hydrocarbures et de l'alimentation sur le marché mondial.
La plupart des économistes sont confiants car, dans l'histoire de l'Humanité, chaque récession a été suivi d'une reprise économique. Ils ont tort. Ils n'ont pas compris la véritable nature de la crise que nous venons de rencontrer. Il s'agit d'une crise durable des ressources nécessaires au fonctionnement d'une économie développée. Il s'agit d'une crise d'un genre nouveau qu'il faut appeler crise écologique.