Le Guantanamo grec

A quoi jouent les dirigeants grecs? Leur vision de l’avenir et leur promptitude à se faire envahir par le « côté obscur » dans les situations critiques, sont très inquiétantes. Nous avons ici, à maintes reprises dénoncé leur attitude irresponsable et criminelle envers leurs concitoyens, leurs compromissions avec le système bancaire et des affaires . Nous ne pensions pas devoir un jour faire connaître  la manière immonde et indigne dont sont traités les immigrés clandestins.

Inexcusable. Cela dit, il eut été étonnant que le gouvernement grec traite les sans-papiers mieux que ses propres citoyens. C’est dans les situations critiques et non dans l’opulence et la luxure où la dénonciation est facile,  que se mesure l’Humanité de chacun d’entre nous et sans doute qu’un jour chacun a pu s’éprouver ou devra le faire, l’avenir étant des plus incertains. Et en tout cas, les dirigeants grecs ont encore une fois loupé le coche.

Le Guantanamo grec. C’est fort, mais c’est sous ce titre que le « 20 min » espagnol décrit dans son article la vie des clandestins parqués dans une prison en attente de on ne sait quoi vraiment, reprenant ainsi le surnom d’un des centres de détention.

Nous avions déjà évoqué cette situation il y a quelque temps déjà. Trop rapidement. Il était temps de nous y attarder. Petits rappels non sans importance. Ça se passe en Europe. Ça se passe dans l’Union européenne. Dans une Union détentrice du prix Nobel de la paix.

« Entassés, sans vêtements chauds, sans eau chaude, sans chauffage, dans des conditions d’hygiène déplorables, mal-nourris, sans accès aux médicaments, dans une situation judiciaire incertaine et soumis à des vexations et des raclées occasionnelles.

Telles sont les conditions dans lesquelles la Grèce maintient plusieurs milliers d’immigrés et de réfugiés sans papiers dans les  nommés « Centre de détention pou étrangers » qui sont si dégradés que les internes de celui de Corinthe l’appellent ironiquement avec le même nom que la tristement fameuse base américaine: « Guantanamo ».

« Nous sommes enfermés comme des animaux. Nous n’avons pas le moindre droit », se plaint Ali Hasan, un Afghan qui a fui son pays , retenu depuis deux mois avec 800 autres personnes dans le Centre de Corinthe, une ancienne caserne.

Tous ont été pris dans les coups de filet que le gouvernement grec a ordonnés il y a quelques  mois dans le cadre de l’opération « Zeus Xenios » contre l’immigration irrégulière en Grèce, porte d’entrée principale des sans papiers en Europe.

Certains centres de détention enferment dans les mêmes cellules des adultes et des mineurs, violant ainsi la Convention des droits des enfants de 1989. D’après des informations provenant de la police, l’opération mentionnée a permis d’arrêter 4 092 étrangers.

« L’objectif officiel est d’arrêter ces personnes afin de préparer les documents nécessaires pour leur rapatriement, mais comment vont-ils le faire car dans les centres il n’y a même pas de traducteurs? Le vrai objectif est de les faire disparaître de la voie publique » affirme l’avocat Spyros Kulojeris.

Le ministre de l’Intérieur, a récemment affirmé au Parlement que le centre de Corinthe a été choisi en raison « de l’excellent état de ses dortoirs, de ses salles de repos et de ses réfectoires ».

« Les installations possèdent le chauffage et l’eau courante, et les serviettes et les couvertures nécessaires ont été achetées. Le respect des règles d’hygiène et de sécurité est essentiel pour le gouvernement » a-t-il ajouté.

Cette semaine, une délégation parlementaire a pu apprécier au centre de détention de Corinthe, comment les étrangers sont obligés de rester en permanence enfermés par groupes de 60 à 80 personnes dans des dortoirs de 120 m².

Les chambres étaient fermées avec des barreaux et les réfugiées ne pouvaient sortir dans la cour que pendant une heure par jour, trois heures d’après la direction du Centre.

Il n’y a pas de réfectoire et les repas, de très mauvaise qualité selon les immigrants et les avocats, sont servis à travers de barreaux sans qu’il n’y ait de tables. « Regarde mon repas » se plaint Hassan, originaire du Bangladesh qui montre un bout de pain dur et un verre de lait coupé avec de l’eau.

Il n’y a pas non plus de chauffage, ni d’eau chaude, en raison selon le directeur Vassilios Stavropulos, du « manque de moyens ». On offre aux détenus une mince couverture et un drap malgré des températures qui avoisinent les moins 10 degrés.

La plupart portent depuis deux à quatre mois les mêmes vêtements d’été et sont chaussés de nus-pieds.

Ces dernières semaines, trois centres de détention ont connu des mouvements de protestation et des grèves de la faim pour réclamer de l’eau chaude et des repas décents.

A Corinthe, ces mouvements ont été réprimés par l’intervention de la police anti-émeutes et l’utilisation de gaz  lacrymogènes à l’intérieur même des bâtiments, selon M Stravopulos.

Le rapporteur spécial de l’ONU pour les droits de l’Homme des Migrants, François Crépeau, a terminé cette semaine une visite en Grèce pendant laquelle il a dénoncé les conditions de détention « effrayantes » et affirmé qu’il ne voudrait « même pas y passer une heure ».

Rien que cette année, La Cour Européenne des droits de l’Homme a condamné à trois reprises la Grèce en raison de la violation de l’article 3 de la Convention Européenne des Droits de l’Homme » qui interdit « la torture et les traitements inhumains ou dégradants pendant toute détention ».

« Le gouvernement grec, affirme l’avocat Spyros Kulojeris, ne se soucie ni des droits humains de ces personnes ni des conventions internationales. »

Fauzi, un détenu, nous montre un énorme bleu sur sa jambe: « C’est arrivé la dernière fois que les policiers sont entrés dans notre cellule pour nous tabasser pendant la prière ».

En face, enfermé dans une autre cellule à barreaux, Mohamed se plaint: « On est censé être en Europe, mais j’ai vu des choses horribles ici ».

Source: 20 min Espagne - traduction El Don

A lire: Chasse aux immigrés en Grèce – Radio Canada

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