Pauline et Erwan réalisent qu’ils se sont fait piéger par la prêtresse hermaphrodite, lors de leur incursion dans le petit monde. Mais les questions restent nombreuses : Blanche y aurait-elle un frère ou une sœur dont Erwan serait le père ? Dans quel but la prêtresse a-t-elle voulu concevoir des enfants avec des humains ?
Scénario de Régis Loisel et Jean-Blaise Djian, et dessin de Vincent Mallié, Couleurs de François Lapierre. Public conseillé : Adulte, adolescent, homme ou femme
Style : fantastique
Paru chez Vent d’ouest , le 4 Novembre 2012 ShareMes Partenaires
L’histoire
Avec la liquidation des affaires de Cristo, Erwan a perdu les fioles des « Larmes d’abeille ». Sans cet attirail magique, il ne peut assurer son rôle de « Transporteur ». Ni une, ni deux, il se met à leur recherche. Gaëlle, qui l’accompagne en profite de ces moments pour lui montrer ses sentiments. Bien sur, cette concurrence ne plait pas à Pauline qui met rapidement les choses au point.
Tandis que Pauline et Erwan retrouvent les fioles au fond d’une brocante, Gaëlle s’enfuit sur Paris. Ces petits tracas amoureux ne seraient rien si Blanche, l’étrange fille de Pauline, ne communiquait pas avec l’autre monde. Peut-être que quelqu’un la cherche…
Une suite qui roule, et qui rebondit
Avec ce tome 4, pas d’inconnu. Loisel et Malié nous embarquent pour un bon moment d’aventure et de plaisir. Puisque tout les personnages sont bien posés et que la situation s’est décanté, ils redistribuent les cartes, en faisant apparaître un nouveau personnage (Sombre, l’opposé de Blanche). En dévoilant, à peine, une nouvelle intrigue, on est reparti pour un nouveau « cycle » avec une tension qui monte d’un cran.
Loisel, le mentor
Je trouve au « Grand mort » plein de qualités, mais je suis incapable d’expliquer ce qui me plait dans cette série… Peut-être est-ce le mélange subtil d’histoire toute simple et de fantastique ? Peut-être est-ce la vérité des rapports humains ? Peut-être est-ce le monde fantastique à peine entrevu ? Ou encore, la maîtrise graphique et visuelle d’un Malié sous influence. Toujours est-il que je prends un grand plaisir à ma dose annuelle de « Grand mort ». Jamais vraiment surpris, mais toujours enchanté, je m’engouffre dans cette lecture avec un bonheur renouvelé.
Car plus que tout, c’est sans doute le regard, la direction créative de Loisel qui m’enchantent. Même sans son dessin, et avec Djian en second scénariste, la série est remplie de sa présence bienveillante et son influence bénéfique.
Loisel est de ceux qui m’ont fait aimer passionnément la Bande dessinée. Avec La Quête de l’oiseau du temps, c’est le dessinateur que j’ai admiré. Son écriture cinématographique fut une découverte pur moi. Avec Peter Pan, j’ai compris son talent de conteur d’histoire.
Dans le Grand Mort, Loisel et Djian se montrent toujours attentif à leurs personnages. Ils leur donnent une crédibilité incroyable, en les faisant « vivre ». Chacun, personnage principal ou totalement secondaire s’exprime de manière personnelle, avec son caractère et ses motivations. Rien n’est laissé au hasard. Si certains éléments ne sont pas expliqués, ils serviront le récit ultérieurement. C’est ainsi qu’ils travaillent sur le Grand Mort. Après avoir détaillé chaque protagoniste (Erwan, Pauline, Gaëlle, Blanche, le petit peuple) ils exploitent des éléments laissés de côté (les motivations de la prêtresse Macare) pour densifier l’histoire et faire monter la tension.
La variété des situations
Dans le Grand Mort, on ne s’ennuie pas. C’est un principe de base, érigé en précepte, que Loisel, Djian et Malié s’imposent. Et c’est tant mieux pour nous lecteurs ! En changeant régulièrement lieux et situations (tranquille, intime, cocasse, aventureux, initiatique, fantastique), ils nous entrainent toutes les 10 pages sur un nouveau territoire. Ces sauts constants de style et de lieux nous font voyager dans un univers aux facettes changeantes et multiples. Tout en restant dans un univers cohérent, on est happé par la découverte suivante.
Le dessin
Sur le « Grand Mort », Malié dessine avec poésie et vérité. Extrêmement attentif à l’expression de ses personnages, il trouve toujours la position exacte, la moue parfaite pour crédibiliser la situation. Sans exagération, tout en finesse, il met en image avec talent le scénario aux petits oignons de Loisel et Djian.
Difficile de ne pas voir dans son dessin une filiation avec le dessin du « maître ». Ses décors du monde fantastique vous rappelleront certainement la quête de l’oiseau du temps, et les « bouilles » de ses personnages des « figures » de Peter Pan. Est-ce volontaire ou juste une inspiration forte ? Qu’importe. Le résultat est probant.
Enfin, mention particulière pour le découpage. A la manière de Loisel, Malié varie avec bonheur les cadrages, et les enchainements de case. Son découpage cinématographique et dynamique se lit avec une aisance incroyable.
Ce que j’en pense
Pourquoi bouder votre plaisir ? Vous connaissez la série ou pas encore ? Loisel, Djan, Malié se sont mis en quatre pour vous servir une nouvel album gourmand à souhait. Entre poésie du quotidien, monde parallèle fantastique et film catastrophe, vous devriez y trouver votre compte. Quoique vous veniez y cherchez, le plaisir de la lecture, sa fluidité exceptionnelle et le dessin sensible vous combleront.
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