Depuis qu’elle est revenue d’entre les morts, Vampirella n’a jamais eu autant de travail à combattre les vampires sur notre bonne vieille planète. Ceux-ci sont désormais parfaitement organisés, contrôlant des pans entiers de nos sociétés, d’importantes firmes industrielles ou commerciales, comme certaines villes, notamment aux États-Unis.
Dans cette nouvelle histoire, Vampirella s’allie avec une ancienne congrégation catholique, constituée de bonnes sœurs combattantes. Et le moins que l’on puisse dire c’est que les demoiselles, avec l’armement et la technologie d’aujourd’hui, sont largement aussi efficaces contres les vampires que pouvaient l’être les ordres de moines-soldats (Templiers ou Teutoniques) au Moyen-Age contre les Sarrazins. Personnellement, même l’âme chargée de péchés, je n’irais certainement me confesser à ces bonnes sœurs new age. Et encore apprend-on au fil de l’histoire que leur nombre a singulièrement diminué au fil du temps. De plusieurs milliers au temps de l’Inquisition elles ne sont plus aujourd’hui que vingt-trois. J’ose à peine imaginer leur puissance de destruction si elles étaient encore autant aujourd’hui.
Dans cette histoire Vampirella trouve une nouvelle alliée, Dixie, fille du mafieux Don Fattoni. Vampirella a sauvé Dixie des griffes d’un certain Von Kreist, ce dernier ayant obligé la jeune fille a tué son propre père après avoir assassiné sa sœur jumelle, Pixie. Von Kreist, ancien soldat allemand de la Première Guerre Mondiale, est devenu immortel. Bien qu’il ne soit pas lui-même vampire il travaille désormais comme mercenaire au service de ces derniers, et sa cruauté n’a d’égale que son absence totale d’humanité et de pitié. Von Kreist est un tueur froid, implacable, sans état d’âme, et va se révéler un ennemi redoutable pour Vampirella.
Cette histoire en deux parties (réunies dans cet album) est due au duo de scénaristes Grant Morrison (qui a récemment redonné du peps à Batman) et Mark Millar (« The Authority », Superman, Wolverine, « Marvel Knights », « Kick Ass »), et les deux compères s’en donnent à cœur joie pour mettre Vampirella dans des situations désespérées, dont elle finit évidemment par se sortir au prix d’exploits de plus en plus sanglants. La première partie de l’histoire, « L’éveil du mal », est dessinée par la talentueuse Amanda Conner (« Birds of prey », Batgirl, Power Girl, Daredevil, She-Hulk) et encrée par son mari Jimmy Palmiotti (Punisher, Ghost Rider, Ash, Painkiller Jane, Daredevil). Amanda Conner dessine superbement les héroïnes féminines, elle en apporte une nouvelle preuve ici. Sa Vampirella est évidemment sexy, mais aussi d’une dureté farouche. La seconde partie, « La guerre sainte », est dessinée par Louis Small Jr (qui avait déjà travaillé sur Vampirella en 1992).
Je ne vous dévoilerai pas l’intrigue, dont le dénouement, comme toujours avec Grant Morrison et Mark Millar, est pour le moins surprenant, avec un ennemi final inattendu, et une mère supérieure de la congrégation de bonnes sœurs elle aussi pour le moins singulière. Morrison et Millar usent de tout leur talent pour trouver des astuces scénaristiques qui pourraient paraître tirées par les cheveux de prime abord, mais qui, une fois l’histoire terminée, s’avèrent finalement en parfait accord avec le reste de l’histoire.
L’album est complété de deux mini histoires. « La reine de cœur sanglante » est due à Morrison, sur des dessins de Michael Bair (Huntress, Catwoman, Green Arrow, Daredevil, Shi, Kabuki, Nightwing). « Un enfer glacial » est écrite par Mark Millar et dessinée par Louis Small Jr. Dans les deux cas Vampirella se retrouve aux prises avec des vampires aux mœurs particulières, d’autant plus dangereux qu’ils agissent en free-lance, n’obéissant pas aux lois qui régissent les clans plus structurés.
Cet album suinte l’hémoglobine, au point que, une fois la dernière page tournée, on est tout étonné de constater que nos mains ne sont pas elle-mêmes sanguinolentes. La violence est omniprésente, suivant ainsi la tendance actuelle des comics américains, qui semblent désormais contraints de s’aligner sur le cinéma, lui-même de plus en plus gore et violent, y compris dans ses versions les plus commerciales. Une violence somme toute logique dans une histoire de vampires, ces créatures n’étant pas spécialement réputées pour leur humanité ou leur compassion. En même temps, quand on est déjà mort, j’imagine qu’il est difficile de respirer la bonté d’âme. Personnellement, cette violence me convient bien dans ce genre d’histoire.