Opportunisme toy

Par Baudouindementen @BuvetteAlpages

Non gardiennage

"Ne risque-t-on pas d’infester toutes les Pyrénées et d’ajouter à l’ours cet autre prédateur ? Des questions auxquelles il faudra répondre prochainement. Mais une chose est certaine : l’enfer pour les éleveurs va débuter." écrit le guide de pays tarbais pour qui le retour du loup dans le Gers est une infestation et pour qui la biodiversité à protéger se résume aux races de brebis à petits effectifs chères à BBC.

Il faut dire que Troncens, là où a été photographié un loup, ne se trouve qu'à quelques kilomètres seulement au nord de Tarbes et du Pays Toy.


Pays Toy ou les troupeaux vaquent en liberté "depuis des temps immémoriaux", selon les promoteurs de l'AOC Barèges-Gavarnie. Et Louis Dollo de poursuivre: "Reste à connaître son origine : bête sauvage ou animal élevé par l'homme ?" Ah l'origine, slovènes, parisiens, belges, italiens...

Pour Jean Omnes: "Les Slovènes, le Parisien, le Belge, le Marseillais ou le Montpelliérain, je ne me souviens plus, ne sont que de boucs émissaires à connotation xénophobe pour cacher une « escroquerie » intellectuelle d’un certain lobby qui veut nous faire  croire que le boulot de berger consiste à surveiller de temps en temps un troupeau en lui apportant quand c’est nécessaire, eau et pierre à sel.
Et surtout à nous faire croire que jadis c’était comme cela que ça se passait dans nos montagnes. Adieu germs, couyelas, assès, tout cela ne seraient que mirage, pure invention des E. Cordier (1818), et de tous les écrivains, forcément étrangers, qui se seraient penchés sur le pastoralisme haut-pyrénéen.

Pour Renaud de Bellefon : « Sur le plan historique il n’y a jamais eu de gardiennage permanent dans les estives » (Le pastoralisme, ASPP65, 2001) annoncent depuis une décennie déjà les représentants des éleveurs barégeois. Une vulgate que les élus locaux (*) reprennent facilement ainsi que l’administration. Tout dernièrement encore, cet été 2012, le sous-préfet et le préfet reprenaient ce lieu commun. Il est un élément justificatif essentiel de l’arrêté dérogatoire permettant des tirs d’effarouchement contre l’ours sur l’estive de Bachebirou, entre Luz et Gèdre.
Si cette tradition de garde s’est perdue, c’est évidemment lié à l’évolution globale de l’agriculture et à la chute de la main d’œuvre disponible :

  • fin de l’élevage laitier,
  • augmentation de la part des ovins dans le troupeau,
  • fin des cultures céréalières et vivrières,
  • départ des enfants, départs des cadets,
  • disparition des domestiques… appelés souvent par les meilleurs salaires du fonctionnariat, de l’industrie naissante. Le devenir de postier, à partir de 1924, d’Henri Fédacou en est une illustration concrète.
A l’évidence en 40 ans à peine, les éleveurs barégeois ont abandonné ce qui faisait « la tradition », ont su s’adapter à de nouvelles conditions matérielles, techniques, démographiques, économiques et culturelles. Fini les cultures de céréales, le pain fait à la maison, la traite des vaches et la fabrication du beurre.

C’est évident que pour des éleveurs aujourd’hui en activité, dont les plus vieux sont pour la plupart nés dans les années 40-50 (60 à 70 ans), la « tradition », ce qu’ils ont grosso modo vu toute leur vie, est bien une pratique de non garde des troupeaux. Une tradition récente, seulement récente… (Source : Renaud de Bellefon : A propos du gardiennage des troupeaux en pays de Barège)
(*) Jacques Béhague est Vice Président du Conseil Général des Hautes Pyrénées Conseiller général du canton de Luz saint Sauveur : “Je suis stupéfié de la violence des attaques dont ont été victimes l’AOC Barèges-Gavarnie mais aussi nos pratiques pastorales en général, de la part d’un Belge et de FERUS. 

Alors que nous développons une filière de qualité, que nos collectivités s’investissent aux côtés de nos éleveurs, d’autres, habitant très loin de nos vallées notamment un Belge et une association domiciliée à proximité de Marseille, se plaisent à démolir ce que nous construisons pas à pas au non d’une idéologie basée sur des montagnes sauvages qui exclu la présence de l’homme et de ses bêtes comme c’est le cas depuis des millénaires. " (NDLB: Jacques Béhague a retiré sa diatribe de son blog depuis.)

Le non gardiennage volontaire a des conséquences. Le bilan des indemnisations pour dégâts d'ours du Parc national pour l'année 2012 est de ce point de vue très révélateur. Jacques Béhague est surprit de "la violence des attaques dont ont été victimes l’AOC Barèges-Gavarnie et nos pratiques pastorales". Il ne l'est pas de la concentration des attaques d'ours sur les troupeaux non gardés. "Á table" crient en coeur les éleveurs et politiciens toys. L'ours est un opportuniste dit-on. Nul doute que les loups seront aussi et des opportunistes; ils feront pareil sur les troupeaux en "semi liberté". Nul doute que "l’enfer pour les éleveurs toys va débuter" s'ils ne reviennent pas à leurs traditions de gardiennage oubliées par... opportunisme.

L'opportunisme est une conduite qui consiste à tirer le meilleur parti des circonstances, parfois en le faisant à l'encontre des principes moraux.

Tirer le meilleur parti des circonstance, ce sera protéger les troupeaux. Sans doute vont-ils bientôt regretter le temps immémorial des ours.