Mardi 10 décembre, aux environs de 15h00, une soixantaine d’élèves ont rencontré comme prévu une partie de l’équipe du film de Jean-Pierre Améris présenté en avant-première le soir même au CGR Dragon de la Rochelle. Voici un petit bilan de la rencontre puis une approche du film.
Marqué par « l’Homme qui rit » qu’il a vu à dix ans dans une version télé, Jean-Pierre Améris, est habité par l’univers fantasmagorique de Hugo. A 15 ans, il a lu le roman et depuis, Gwynplaine ne l’a plus quitté... Avec une générosité de détails, le réalisateur s’adresse avec aisance à ses spectateurs. Il confie que l’idée de tourner « l’Homme qui rit » l’a habité pendant des années avant de pouvoir réaliser son projet. L’essentiel était de « tenir le cap » et de « tailler un scénario » dans « le granit » de cette œuvre magistrale, épaisse d’environ 750 pages...
Résultat : un film d’une heure trente, « léger, fluide » comme en témoigne Marc-André Grondin qui incarne Gwynplaine et qui est venu lui aussi parler aux lycéens. Pas facile de « porter le masque » de « l’Homme qui rit », de s’habituer à l’expression douloureuse et mécanique du rictus, à la torsion des prothèses enfoncées dans la bouche, d’éprouver l’embarras de ce visage qu’il faut « installer » pendant trois heures en loge et assumer toute une journée !
Car, comme le rappelle Jean-Pierre Améris, outre sa dimension politique et onirique, « l’Homme qui rit » est avant tout une œuvre visuelle et spectaculaire... Elle donne à voir le visage mutilé de Gwynplaine. Et si, malgré sa mutilation, Gwynplaine était beau ? D’une beauté plastique d’aristocrate défiguré, jeté en pâture aux chiens de la mer ? D’une beauté fendue par cette sorte de demi-masque ambigu de la commedia ou de la tragédie antique. Aux yeux du réalisateur, son Gwynplaine tient davantage du Joker que d’Elephant Man... Ce qui ne l’empêche pas de rester avant tout un héros profondément hugolien, marqué par la surface plane et énigmatique comme un miroir sans teint auquel le visage de Gwynplaine nous renvoie tous.