En septembre dernier, au milieu du tapage médiatique orchestré autour du nouveau Département des arts de l’Islam, l’ouverture des espaces consacrés à l’Orient méditerranéen dans l’Empire romain est passée un peu inaperçue. Je vais donc essayer de combler un peu ce « déficit de notoriété ».
Déjà, lors de la création du Grand Louvre, existait un projet dénommé les « Trois antiques » car il concernait les Départements des antiquités égyptiennes, orientales, grecques étrusques et romaines. Il s’agissait de regrouper dans un ensemble cohérent les objets de ces trois départements afin de présenter une époque et une aire géographique où différentes traditions artistiques se mélangèrent et s’assimilèrent. Au fil des années le projet a évolué, avec d’importantes restaurations d’objets entre 1997 et 2010 pour aboutir à l’ouverture de l’espace consacré à l’Orient méditerranéen dans l’Empire romain. C’est à partir du niveau inférieur des arts de l’Islam que l’on arrive dans ces nouvelles salles avec, tout d’abord, des grande mosaïques comme cette œuvre byzantine de Qabr Hiram découverte en 1861 près de Tyr par une mission archéologique française dirigée par Ernest Renan. Transportée en France, elle fut exposée au Louvre puis mise dans les réserves. Sa présentation complète fait suite à une récente restauration complète. Je vous ai fait un petit photomontage de différents éléments. L’inscription du bas est une citation Biblique du Livre de Samuel « Que ton entrée t’apporte la paix, toi qui regarde cette inscription ».
A côté une « Amazonomachie », c’est-à-dire la représentation d’un combat entre les Grecs et les Amazones, les femmes guerrières de la légende.
On passe ensuite aux objets de la vie quotidienne tels que les faïences et céramiques décorées ainsi que les pièces en verre. Une galerie est consacrée aux rites funéraires de l’Egypte romaine avec du mobilier de tombes et des « momies à portrait », c’est-à-dire personnalisées avec un portrait du défunt peint à la place du visage. L’un des pièces phare est « l’Européenne » appelée ainsi à cause de la couleur claire de sa peau. La dorure sur le cou recouvre un collier de perles cet effet de peinture donnait ainsi une sorte d’aura divine à la défunte.
Admirons ensuite cette « Aphrodite pudique » qui vient du Mithraeum de Sidon (c’est-à-dire provenant du sanctuaire du dieu Mithra à Sidon dans l’actuel Liban) et datée des premiers siècles de notre ère. Elle adopte la même posture que l’Aphrodite de Cnide, œuvre de Praxitèle, dont je vous parlais ici. Dans ces régions on assiste à un phénomène d’intégration des divinités locales dans le panthéon gréco-romain.
Le Baal des Syriens, dieu des orages, est assimilé au Jupiter dieu romain du ciel et de la foudre dans les sanctuaires locaux comme en témoigne ce Jupiter dit « bronze Sursock » (dénommé ainsi car il provient de la collection de Charles Sursock). Il provient du sanctuaire d’Héliopolis à Baalbek au Liban, au début de notre ère ce sanctuaire était très prisé pour ses oracles, l’empereur Trajan lui-même l’aurait consulté.
Je terminerais par une touche personnelle car ce que j’apprécie par-dessus c’est la réouverture des salles consacrées au monastère de Baouit. Il s’agit d’un village d’Egypte où, en 385, un moine nommé Apollô fonde ce monastère qui connaît très vite grand succès puisqu’il regroupe jusqu’à 500 moines et connaît son apogée aux VIe et VIIe siècle, il restera même en activité après la conquête arabe. Après une période de déclin le site fut abandonné et recouvert par le sable jusqu’aux fouilles récentes. Les archéologues ont dégagé des éléments architecturaux qui ont permis de reconstituer en partie « l’église sud ». Dans une salle voisine une maquette au 1/10e permet de donner une idée du site tel qu’il était à l’époque.
J’aime à venir dans ces salles un peu cachées, à l’écart de la foule et du bruit de l’aile Denon où, de temps en temps, je viens faire une « retraite » …. durant quelques instants.