REVIEW - Si vous voulez être cool, faîtes des études de géomètre. Si possible des études de géométrie lié à l’esthétique, à l’art, au design et non pas à la fonctionnalité de la géométrie, lié à l’ingénierie, au génie civil. Bon, je dis ça, je dis rien mais ça fait quand même deux ou trois ans que beaucoup, mais vraiment beaucoup de groupes cools – cool de manière objective, pour un grand nombre de galants et de courtisanes – utilisent des visuels construits de formes géométriques et ça marche plutôt bien en concert. Si vous n’aimez pas la géométrie et que vous voulez quand même être cool, vous pouvez faire des études de typographies, ça marche aussi.
Venons en au concert désormais. Cette salle dans laquelle Yeasayer jouait, la Gaïté Lyrique, est assez étonnante. Déjà par son nom, héritage d’un théâtre très ancien, puis par sa construction. Elle se niche dans un très grand bâtiment qui ressemble, à l’intérieur, à un ancien entrepôt ou bunker qu’on aurait entièrement rénové et en beaucoup plus propre. Ça ressemble donc à un musée d’art contemporain, du moins pour la plupart des pièces de ce bâtiment labyrinthique. D’autres donnent l’impression qu’on se trouve dans un salon mondain de Versailles, d’autres dans une navette spatiale. Vous me direz : « Il est vraiment relou cet article, ce qui m’intéresse c’est juste le concert de Yeasayer et pas ses descriptions du bâtiment, en plus elles sont nulles ». Vous aurez certainement raison sur le dernier point mais il y a une relation entre le bâtiment et la musique de ; il s’agit de l’entropie musicale. L’entropie, on peut lui donner plusieurs définitions : celle d’une flèche ou d’un harpon donc une chose qui, une fois planté, ne peut pas se déplanter ou celle d’un mouvement que va vers de plus en plus de chaos et de mélange. C’est cette 2e façon de voir l’entropie qui m’intéresse. C’est un concept qui existe en physique mais c’est un concept qui existe en musique aussi.
Une musique qui va vers plus en plus de mélange. Yeasayer semble bien répondre à ce concept. On peut trouver plusieurs types de musique dans ce qu’ils font. Tout d’abord, il y a ce qu’on appelle la musique du monde, à savoir la musique non-occidentale. Yeasayer s’inspire beaucoup de musiques africaines. On peut reconnaître des mélodies de type « guitare congolaise qui fait un solo » ou des harmonies vocales assez proches de certaines musiques africaines. Il y a aussi une influence de la musique jamaïcaine ; Yeasayer utilise souvent des rythmiques et des lignes de basse proches de la musique Dub jamaïcaine. Ensuite, il y a tout le côté synthétique de leur musique ; les pads électroniques à la batterie qui font des PIOUUUHH – PIOUUHH, les synthés numériques qu’ils ont sur scène et tout le côté hyper léché, hyper propre de leur musique. La troisième influence, c’est la musique pop. Les deux modèles musicaux précédents sont passés à la moulinette de la pop et grâce à ces influences bigarrées, elle devient beaucoup plus intéressante, et grâce à la pop, ces deux styles se lient très bien et deviennent audibles pour une plus grande partie de la population. Une sorte de contrat win-win en quelque sorte. On peut certainement trouver d’autres influences musicales à Yeasayer mais ces trois-là me semblaient les plus pertinentes.
La seule façon d’innover en musique, c’est la mixité des genres. Yeasayer n’innove plus vraiment avec cette world/electro/pop car beaucoup d’autres groupes exploitent ce filon – Animal Collective pour ne citer que le plus illustre- mais ils le font bien et le concert était réjouissant.