Le brésilien Oscar Niemeyer s’est éteint jeudi dernier à l’aube de ses 105 ans.
Avec sa disparition, c’est l’une des dernières figures de l’Architecture Moderne qui s’en est allé, laissant derrière lui une œuvre considérable dont les fleurons les plus connus sont, entre autre, Le Congrès National du Brésil, le Musée d’Art Contemporain de Niteroi, la Cathédrale Métropolitaine Notre Dame de l’Apparition à Brasilia ou encore le siège du Parti Communiste à Paris.
C’est après des études aux Beaux-Arts de Rio dans les années 30 que Niemeyer commença sa carrière, à une époque où perçaient trois autres maitres, chacun dans leur style, de l’architecture moderne : Frank Lloyd Wright aux Etats Unis, Ludwig Mies Van Der Rohe en Allemagne et Le Corbusier en France.
C’est d’ailleurs par admiration pour Le Corbusier qu’il rejoignit celui-ci à New York dans les années 50 et avec qui il participa à l’élaboration du siège de l’ONU.
« On voulait faire une architecture différente, qui crée la surprise » avait déclaré ce pionnier de l’utilisation du béton.
Avec plus de 600 œuvres à son actif, Oscar Niemeyer représente l’audace du Modernisme.
Au rythme de l’évolution des modes de vie, l’architecture du milieu du XXème siècle a bouleversé la physionomie de nos villes. Loin d’être étranger à cette révolution, Oscar Niemeyer y a même largement contribué en proposant une architecture très différente, une architecture libre aussi bien formellement qu’intellectuellement.
« Je n’ai aucun enthousiasme pour l’architecture rationaliste et ses limites fonctionnelles, sa rigidité structurelle, ses dogmes et ses théories. L’architecture est faite de songes et de fantaisie, de courbes généreuses et de grands espaces libres(…)le béton armé permet à l’architecture qui a le sens de la poésie de s’exprimer. Il faut savoir inventer en faisant appel à toutes les techniques qui sont à notre disposition. Pourquoi se soumettre à des règles, des principes intangibles ? »
Et de poésie, les créations de Niemeyer n’en manquent pas.
Il aura marqué son époque avec des bâtiments tout en courbes lui valant le surnom d’ « architecte de la sensualité ».
« Ce n’est pas l’angle qui m’attire. Ni la ligne droite, dure, inflexible. Ce qui m’attire c’est la courbe sensuelle que l’on trouve dans le corps de la femme parfaite. »
« Quand j’ai commencé ma carrière, le fonctionnalisme était le dogme : seul comptait l’usage du bâtiment, tout ce qui relevait de l’ornement était banni. J’ai voulu inverser la proposition, ne pas faire une architecture du dedans vers le dehors mais imaginer d’abord son aspect extérieur et l’adapter au reste. »
Pareille liberté fut possible avec l’avènement du béton, avec les structures porteuses libérant les murs, les livrant à la fantaisie de l’architecte. Niemeyer en a joué un maximum, augmentant encore les portées, allégeant les dalles, affinant les colonnes, jusqu’à prendre à rebours certains principes immuables de l’architecture.
« La première chose que je fais quand j’aborde un travail, c’est commencer par réduire les appuis, confiait-il à RFI en 2007. Quand on réduit les appuis, l’architecture devient plus audacieuse. Les espaces deviennent plus généreux et l’architecture peut alors créer une architecture nouvelle, qui provoque l’étonnement et peut devenir une œuvre d’art. »
La grâce préférée à la précision (tout part d’un dessin à main levée), la beauté préférée à la fonction, plus qu’un architecte Oscar Niemeyer était un sculpteur.
Un artiste, en somme.
Merci M. Niemeyer pour cette belle page d’histoire. Reposez en paix.
(Pics/source :AFP/ David Janin/ Michèle Daniau/ Antonio Orza/ Evaristo Sa/Marcelo Sayao/ Enrique Matute/ Joedson Ales, Reuters, sgaze.com, leplus.nouvelobs.com, rfi.fr & grapheine.com)