Une programmation alléchante, quelques bonnes surprises et de l’alcool (avec modération) ont contribué à faire de l’Elektr’Rhône 2012 une vraie réussite.
22h – Arrivée au Double Mixte, à Lyon, cette salle ordinairement réservée à l’examen tant redouté adulé de Sciences Po, désormais transformée en abreuvoir géant, dont le sol souillé de bières horriblement chères et de baskets fluorescentes reliées à des jambes en ébullition brille sous des effets de lumières au fort pouvoir hypnotisant. Baskets fluorescentes, en effet, qui expliquent sans doute la désagréable impression qui nous a frappé de plein fouet en entrant dans la salle, d’appartenir à la génération des vieux-mecs-qui-sont-pas-passés-à-autre-chose-et-qui-viennent-tâter-de-la-jeunette-de-seize-ans.
22h15 – Conscients d’avoir loupé Miimo en guise de warmup, on se prend une bière à 5€, la larme à l’œil en donnant notre billet, quand la jeune femme de l’autre côté du bar nous rappelle à juste titre que l’intégralité des bénéfices de la soirée sera reversé à la Ligue Contre le Cancer. Plutôt que d’avoir un effet apaisant sur notre conscience, on s’est remis en question pendant quelques minutes sur l’effet tragi-comique de la situation présente : être complètement saoul dans un endroit enfumé et cotiser pour la Ligue Contre le Cancer. Heureusement, The Greeks des londoniens de Is Tropical nous a ramené à notre occupation première, qui était de danser sur de la “musique funky fresh à forte tendance électro new wave french touch“ (c’est à peu près ce qui ressortait des conversations des jeunes gens que nous avons interrogé consciencieusement en fumant une clope).
23h – Les jeunots de la génération d’en dessous s’amassent devant la scène. Notre intuition de journaliste aguerri nous indique alors que L’Artiste de la soirée ne va pas tarder à poser ses mains sur les platines du Double Mixte. Effectivement, quelques instants plus tard, alors que nous étions coincés entre une groupie passablement énervée de ne rien voir et un mec pas vraiment porté sur l’utilisation du déodorant, Breakbot débarque sur l’immense scène, qui d’ailleurs semblait un peu ridicule, compte tenu de l’immense fossé qui la séparait de la foule.
23h30 – Breakbot fait son travail et ne reproduit pas l’erreur de passer un set complètement plat et merdique tel que l’avait connu le public présent lors de la première partie de Justice à La Halle Tony Garnier, il y a quelques mois. Les classiques sont bels et bien présents, de Baby I’m Yours à Fantasy, en passant par One Out of Two et le très Mickael Jacksonnant Why issu du dernier album. La foule semble comblée, au vu des nombreux pogos ébranlant les premiers rangs, contrastant avec l’ambiance plutôt funky du set. Pas vraiment de fausses notes pour cette fois, et c’est dans une passible déception qu’on avoue avoir adoré.
00h15 – Les lumières se tamisent de plus en plus, Breakbot se la joue ambiance Easy Fraction et prépare d’une platine de chocolat au lait la venue de Jean-Baptiste de Laubier, autrement (et heureusement) renommé Para One. Pendant qu’une demoiselle tente un strip-tease avec des vigiles à peine plus réceptifs qu’un colis recommandé envoyé un jour ouvré, on renouvelle notre cotisation envers la Ligue Contre le Cancer, scrutant avec Passion l’écueil enfumée de la scène, près à apercevoir au moindre mouvement l’arrivée du maître du chill dancing.
Para One
00h30 – Para One prend possession des lieux et envoie pendant plus d’une heure trente une panoplie de sons tout autant bizarroïdes que géniaux. Oubliant pour l’occasion son penchant naturel pour les instrus hip-hop, le boss du label Marble démontre avec brio qu’il sait aussi composer avec les beats bien dansants. Un set qui restera dans les annales, transpirant de bonnes surprises et de pièges pour jambes molles.
Environ 1h30 – Alors que Marble le Père s’apprête à passer la main au fils et au Saint-Esprit, aka Surkin et Bobmo, une bagarre éclate à deux mètres de nous, entre un vigile et un mec apparemment chiant. Nous encourageons le vigile et partons en quête d’une petite bière, parce que ça faisait quand même longtemps, et que ce live set extraterrestre de Para One nous a quelque peu fait mouiller la chemise. Durant la transmission de pouvoir, l’ambiance rythmique tourne à la sauce Club Cheval, ce qui n’est guère étonnant quand on connaît les liens étroits qui se sont créés il y a un peu plus d’un an entre les deux groupuscules terroristes de la musique EDM.
Surkin
Les sets alternatifs de Surkin et Bobmo s’enchainent tout seul, sans grosses surprises sonores, à la remarque près que les deux petits frenchies ont bien grandis. La maturité des enchainements et leurs interactions réussies avec le public témoignent d’une relative prise de conscience quant à leur influence dans le monde de la musique électronique. Les High Powered Boys (duo autoproclamé rassemblant les deux DJ’s, notamment sur Sound Pellegrino) ont définitivement fini de faire gentiment glousser les hipsters en soirée pour faire bouger les foules en festival.
Le jeune prodige SCNTST
Très tard – La jeune pousse de ce festival déboule comme une fleur sur la scène, devant un parterre zombifié de junkies dépravés près à bouffer en masse des kicks lourds et des synthés dignes d’une cathédrale au bord de l’effondrement. SCNTST (on ne sait toujours pas comment ça se prononce), tel un généreux maître d’hôtel, leur sert sur platine d’argent le ravitaillement nécessaire. A seulement 19 ans, le jeune enrôlé dans les troupes de Boys Noize Records a réellement fait voyager tout le monde, poussant même certains estomacs fragiles à s’exiler et à s’évanouir dans les toilettes (true story).
En résumé, cet Elekt’Rhône 2012 avait largement de quoi plaire à toutes les oreilles, des plus “Ed Bangerisées“ aux plus demandeuses de basses assassines. La Ligue du Cancer tient à nous remercier pour tant de générosité à leur égard ; nous ne pouvons que remercier tous les DJ’s présents ce soir-là de nous avoir offert une cure de prévention contre le cancer auditif. A l’année prochaine, cher Double Mixte.