Lola est toute petite.Mais vraiment toute, toute petite.
Quelques cheveux blonds s’échappent de son bonnet. Je crois bien que c’est un bonnet Hello Kitty: il y a un noeud rose dessus. Sous le bonnet, deux yeux bleus comme la mer me regardent avec curiosité. Je me demande ce qu’elle pense, mais Lola ne parle pas. Pas à moi, en tout cas. Mais je crois bien qu’elle sait parler.
Lola est très jolie, une princesse de porcelaine en miniature. Tout est petit chez elle, jusqu’au petit bout de nez (qui souvent, coule), juste au dessus de l’écharpe. Je crois que je n’ai jamais vu ses mains, elles ne dépassent pas des manches de son gros manteau d’hiver.
Lola est tellement minuscule qu’elle se faufile partout, et surtout dans l’entrebâillement de la porte en bois que je pousse parfois. Je crois toujours qu’elle va s’échapper, mais elle regarde juste si son papa, par hasard, n’aurait pas changé d’avis, ne reviendrait pas la reprendre, et tous les deux, ils passeraient la journée au chaud. Mais non. Lola, comme tous les autres, doit sortir de la couette chaude et moelleuse, abandonner Doudou et affronter le froid du matin.
Lola ne sourit pas. En tout cas, pas à moi. Elle ne court pas dans la cour, ne pourchasse pas les autres. Ne crie pas. Ne pleure pas. Elle se concentre sur la porte en bois, guette son ouverture.
Parfois, Lola vomit. Plus souvent, Lola fait pipi. Dans la culotte. A la cantine, parfois, Lola s’endort sur son plateau. Mais il faut la réveiller, le service suivant arrive, il faut qu’elle aille jouer dans la cour, comme les autres. Dans le froid de l’hiver, le vent qui pique et la neige qui glisse. Alors, elle se blottit dans les jambes de la maîtresse, parfois dans ses bras, quand elle le peut.
Viens, Lola, ton papa viendra te chercher ce soir, viens.
Lola n’a pas trois ans. Elle est si petite encore. Mais Lola va à l’école maternelle, et mon coeur de mère se serre. Lola est un bébé encore.
Poupée en crochet Isabelle Kessedjian