Adel Abdessemed, Habibi,
polystyrène, résine acrystal, métal (réacteur d'avion), dans la St.-Johannes-Evangelist-Kirche,
Berlin, 2006
Cet artiste d’origine algérienne, vivant depuis plusieurs années en France, est devenu une véritable star de l’art contemporain, grâce à des expositions importantes dans des institutions reconnues, telles que le Palais de Tokyo ou le Centre Pompidou, qui lui consacre une rétrospective jusqu’au 7 janvier 2013.
Ses œuvres sont l’occasion de réfléchir aux événements de l’actualité, comme dans le cas des voitures brûlées en Practice Zéro Tolerance (dont le titre fait allusion à l’expression de Sarkozy « Zéro tolerance » lors des émeutes des banlieues parisiennes en 2005) ou les avions entrelacées de Telle mère, telle fils. L’œuvre que vous voyez au début de cet article a comme titre Habibi, qui en arabe signifie « mon cher » : il s’agit probablement du portrait de l’artiste en forme d’énorme squelette « en vol », souvent installé au milieu d’une énorme salle, en lévitation dans l’espace.
L’impact visuel est grand : le squelette, qui fait toujours penser à la mort, et sa façon d’être exposée, comme les squelettes des dinosaures dans les musées d’histoire naturelle, polarisent l’attention des visiteurs, et tous les autres travaux à coté ont tendance à disparaître.
La tête de mort, les os humains, les squelettes sont des sujets classiques de l’iconographie chrétienne et notamment de la peinture hollandaise du XVIIème siècle. Elles renvoient toujours à l’idée de la mort et à la fragilité de la vie, dans des natures mortes qui s’appellent « vanités ».
La vanité d’Adel Abdessemed est une version moderne des peintures hollandaises : dans le sourire moqueur on y lit de l’ironie, dans la posture la volonté de bondir, de sauter au-delà de quelque chose, dans le réacteur d’avion, qui complète la composition et semble propulser le vol, l’allusion à une actualité dramatique bien connue.