J’aimerai mourir comme on s’endort
Mes yeux peu à peu s’ensommeillent,
Et je sens ta vie drossée contre mon corps.
J’aimerai emporter ton regard,
Ma fontaine d’ombre
De l’autre coté du temps,
Mes mains cherchant
Le berceau de tes mains.
J’aimerai mourir comme on s’endort
Dans tes bras immuables
Ta bouche butinant mon visage
Tes doigts perdus dans mes cheveux.
Je suis passée au bord du lac.
Nous sommes tous les deux sur ce banc
Avec posé sur nos genoux
Le poème de ton premier amour
Que nous traduisons,
Toi Créole, moi Française,
Mariant nos pensées aux reflets ardoisés
Des froideurs de Novembre.
Tu as illuminé de tes mots
Ton village d’outre monde :
« Allons à l’Asile * chérie…»
J’écoute murmurer la rivière tropicale
Et le frissonnement des feuillages
Qui font palpiter sur sa robe
Des poissons de lune.
L’onde chuchote, grignotant le silence
Et tu savoures l’instant
Où ses lèvres corolles
S’ éveilleront sous tes baisers.
Mais tu es là ,
Sous le ciel d’Ile de France
Tu m’interroges,
Les mots s’effritent sur mes lèvres
Nos corps se figent.
Les prémices de l’hiver mordillent les platanes.
Je voudrai poser ma tête sur ton cœur.
Le crépuscule envahit les berges qui se fondent
A l’horizon.
Les cygnes s’éloignent sous les saules
Et nous nous en allons, blottis
Au creux de la petite voiture bleue
Qui nous emmène tout au bout du rêve
Par les chemins de nulle part
Denise Bernhardt
Montmorency, le 3 Décembre 2008
* l’Asile, petite ville d’Haïti