Dans la vie, Patrick Mille est le mari de Justine Lévy, auteure du roman autobiographique « Mauvaise fille ». Pour son premier film, il adapte donc le récit de sa compagne : récit brut, écriture tranchante, pathos condamné. Un beau livre. Le film, qui offre le premier rôle à la chanteuse rock Izia (Higelin), lui, l’est nettement moins. Sans les (bons) mots offrant une errance et une réflexion possibles sur le papier, Mauvaise fille se retrouve dépourvue d’art. Mille, face au gigantesque vide devant lui, ne trouve aucune réponse satisfaisante : regard de cinéaste absent, proximité avec le spectateur réduite à néant. Pire : on a constamment l’agaçante sensation d’être exclus d’un « film de potes ». Pourtant, il y avait de quoi faire avec les thématiques poignantes brassées par Lévy dans son bouquin telles les sentiments de culpabilité qui assaillent la jeune femme qui se retrouve enceinte alors que son ex-mannequin de mère (Carole Bouquet) est en pleine phase terminale du cancer, ou les difficultés qu’elle rencontre à s’imaginer mère après avoir vécu une enfance sans repère, flanqué d’un père rock star (plus glamour que Bernard-Henri Lévy).
En outre, le personnage de Louise/Justine constituait le terreau parfait à la construction d’un ambivalent portrait de femme, adulescente tiraillée entre les douleurs du passé et les promesses d’un avenir heureux, quelque part entre ombre et lumière, douce innocence et maturité trop précoce. Oubliez tout cela, il n’en est rien. A l’écran, tout est d’un ennui total, téléfilmique. Tout y semble surjoué, forcé, faux : les sourires, les larmes, les joies, les tristesses. Mille ne parvient jamais à faire surgir l’émotion, Izia Higelin peine à donner de la chair et du coffre à une protagoniste-titre mal adaptée pour le cinéma, et le film se vautre peu à peu dans une ambiance bobo chic, sans choc ni charme. Encore une adaptation ratée. Encore un conseil : lisez plutôt le roman.