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LES YEUX AU CIEL, de Karine REYSSET

Par Geybuss

LES YEUX AU CIEL, de Karine REYSSET

Roman - Editions Points - 189 pages - 6.30 €

Parution aux Points en avril 2012 (Olivier en mars 2011)

L'histoire : Saint Lunaire, à l'approche de la saison estivale... Noé et Marianne, couple de retraités résident dans la station balnéaire, reçoivent leur famille recomposée (dans la forme), mais assez décomposée, dans le fond. Un weekend en famille, avec son lot de non dits, de paroles blessantes, de jalousie, de fantôme, d'amour mal exprimé, d'avoeux, de décisions, de renoncements, de révélations...

Tentation ; Envie de découvrir cette auteure malouine depuis longtemps

Fournisseur : Ma PAL (livre gagné chez Clara, merci !)

  

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Mon humble avis : J'ai lu ce roman comme on conduit un diesel sans injection. Il a mis du temps à m'absorber et finalement à me plaire. En fait, je suis demeurée un moment extérieure à qui ce passait dans cette villa bourgeoise et familiale. Je suis plutôt restée sur la plage, plage que je connais très bien il faut dire, puisque c'est dans ce village de bord de mer (en hiver) et dans cette station (en été) qu'habite ma mère. Saint Lunaire, en Ile et Vilaine, donc en Bretagne ! Aussi, je me suis plu dans les descriptions de cette plage magnifique, et encore plus quand à marée basse... Mais, là, il s'agit d'un goût personnel...

Toujours est il que Karine Reysset ne n'a pas charmée autant que je m'y attendais. Dans le premier tiers, c'est même le style qui m'a dérangée. Ce livre est très bien écrit mais, ne connaissant la romancière que de réputation, je m'imaginais son écriture plus subtile quelque part, plus sophistiquée, plus littéraire. Bref, ce n'est pas ce qui m'a séduit dans cette lecture, même si je ne remets pas en cause la qualité. C'est juste qu'elle ne correspondait pas à mon attente.

J'ai aussi trouvé les personnages un peu trop caricaturaux. Une famille recomposée, c'est certes assez courant. Mais au niveau des enfants, chacun d'entre eux correspond à un stéréotype. Achille, l'ainé, du premier mariage, est riche, a très bien réussi sa vie professionnelle aux USA, et remplit son père de satisfaction, même si...

Lena, mère au foyer en pleine dépression, en crise d'identité... Merlin, le jeune père paumé qui  à l'ouest, a toujours été porté à bout de bras par ses parents.

Et enfin, Stella, la benjamine, homosexuelle à un moment charnière de sa vie de couple.

Sur 4 enfants, aucun n'est vraiment heureux. Cela fait beaucoup, même si je ne me fais aucune illusion sur le bonheur et celui qu'affiche unanimement certaines familles. Mais bon... Il y a aussi des conjoint(e)s, des petits enfants... Alors que je commençais à me perdre dans cette tribus, l'auteure a eu l'intelligence de placer dans le texte un arbre généalogique, tant à destination d'un des personnages qu'à ses lecteurs. Bonne idée ! Je l'ai consulté à plusieurs reprises.

Karine Reysset s'intéresse, par chapitre, à l'état d'esprit de chacun de ses personnages, pour aller vers l'un et revenir vers l'autre ensuite, et couvre ainsi quatre jours de weekend familiale. Bien sûr, il ne se passe pas grand chose. Le coeur du roman est dans ce qui est dit, pensé, tu ou non écouté... par manque de temps, par peur de ne pas aimer la réponse à une question, par différence d'idées ou de points de vue.

Et puis il y a Violette, dont je ne vous ai pas encore parlé.... Violette, la petite fille/soeur, morte à 6 ans... dans un accident. Le silence est d'or autour de Violette dont l'ombre plane au dessus de chacun, dans la vie et le coeur de cette fratrie qui s'aime, se déchire, se jalouse, apprend à se connaître, ou s'éloigne.

Au fil des pages, j'ai fini par m'attacher à certains personnages. C'est Lena qui m'a le plus touchée, puis Stella et Merlin, chacun pour leur raison.

Et puis j'ai réalisé que Karine Reysset me contait l'entre les murs d'une villa sans doute située à quelques centaines de mètres à peine de "ma" maison familiale. Et que ce qui se passe dans ces deux maisons, même si les protagonistes sont en tous points différents, se ressemble assez. C'est l'histoire d'une famille... ou certains ont tout ce qu'ils voulaient (mais qui, ici, ne savent pas quoi en faire), et d'autres n'ont pas grand chose de leur rêve d'enfants, et que l'on porte à bout de bras. Ceux là, un jour, n'ont pas pris le bon train... et le retour en arrière n'est pas facile, surtout quand il se fait à coup de rames et à contre courant. Et puis il y a ses silences, ces non dit, cette façade. Je suppose mes frère et soeur heureux, ils ont en tout cas de bons arguments pour l'être, même si la vie n'est facile pour personne et qu'elle amène forcément son lot de soucis. Mais, comme dans le livre, aucun sujet grave, aucune conversation intime avec eux. Je ne connais pas leurs craintes existentielles, et ils sont loin d'imaginer les miennes. L'intimité est refusée, rejetée, ignorée, refoulée, tabou...

Sommes nous une famille comme les autres ? Y a t-il deux familles identiques ? Le mot "Normal" peut-il s'accorder avec le mot  famille ?

Les yeux au ciel est finalement un roman bien construit sur une famille fissurée. Des portraits appronfondis d'êtres blessés par la vie et par la mort, la mort d'une enfant, qu'ils l'aient, ou non, connue.

L'objectif de la romancière est justement atteint même si je ne pense pas que ce roman soit extraordinaire.

(Dans le genre, j'ai nettement préféré Cet été là, de Véronique Olmi, même s'il s'agissait, non pas d'un weekend familial, mais de retrouvailles amicales en bord de mer)


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