Y a-t-il des conclusions à tirer suite à la présentation des photographies de Bernard Demenge à Aix-en-Provence ? La conclusion est une proposition finale, elle marque la fin d’une action, d’un déroulé, or dans le processus de recherche, d’expérimentation qu’est le nôtre il serait bancal de se positionner dans ce découpage. Certes la conclusion peut être ouverte, mais elle n’en est pas moins prématurée. Et alors, peut -on au moins en mesurer l’impact auprès du public, des professionnels, des artistes ? Non, certainement pas avec précision, car les outils de mesure sont soumis à de multiples variables incontrôlables, fluctuantes.
Alors, que dire ? Beaucoup. Beaucoup dans l’analyse et l’observation, dans la connaissance des enjeux culturels, dans les principes et les habitudes de déambulation des publics dans les territoires, les modes de vie. Beaucoup sur nous et notre capacité à opérer, notre volonté de partage, de positionnement. Nous connaissons depuis longtemps les mécanismes et les dispositifs qui régissent la programmation culturelle, la notion de vitrine dans le commissariat à grand rayonnement, grandes signatures et grandes expositions. La concentration en des lieux stratégiques des ressources et des moyens matériels fonctionne, on est dans un tourisme culturel de masse, rodé, mais, cependant déconnecté d’une création contemporaine protéiforme incroyablement riche et pertinente.
Malgré un tissu associatif des acteurs culturels toujours plus important, un maillage qui se structure, malgré une offre de plus en plus dynamique dans les propositions de création et les modes de présentation, d’accès, de gratuité, la question de l’appauvrissement de la demande est alarmante. Pour que le public se sente impliqué, pour l’amener à se déplacer, il faut de l’inter connectivité. Il est indispensable d’agir bien en amont autour de nouvelles propositions en lien avec des pratiques numériques qui sont la conséquence à la fois d’une forme de repli individualiste tourné vers l’entre-soi, une offre virtuelle incomplète qui fige les actions et un évènementiel souvent unilatéral vers lequel convergent les médias, identifiable sans effort.
Chacun est libre de fouiller, de défricher, d’aller chercher l’information, puis de la relayer. Néanmoins si l’engouement et l’intérêt sont absents, peu importe les outils de communication, de prospection et de partage. Il est clair que cette question de la demande ne peut trouver sa réponse qu’autour de deux grands axes fédérateurs qui sont : 1 L’éducation artistique, citoyenne, en lien avec des préoccupations sociétales, territoriales, déconnectées des facteurs économiques. 2 La prise en compte des outils numériques qui conditionnent nos modes de déplacement, de consommation de l’objet artistique, qui révolutionnent notre regard sur la création, sur sa présentation et ses mutations.
Nous sommes convaincus qu’il ne faut pas céder à la tentation d’un nivellement par le bas (et par le haut ?) dans les choix artistiques, ne pas s’engouffrer dans une programmation seulement dictée par une politique du chiffre, avec obligation de résultat, totalement éloignée des véritables fondamentaux constitutifs de toute action culturelle, c’est-à-dire la connaissance (non tarifée), la confrontation et la prise de risques. Philippe Leroux le 30-11-2012