Amer béton

Par Kinopitheque12

Michael Arias, 2006 (Japon)

UNE THÉMATIQUE EN NOIR ET BLANC

Deux orphelins, gamins légendaires des rues de Trésor-Ville font la loi et protègent leur cité contre les yakuzas. Noir a un penchant pour la violence. Il veille sur Blanc, plus jeune et innocent. Tous deux forment le duo des Chats. Tout bascule lorsque Serpent décide d’éliminer les Chats pour se réapproprier la ville.

Cette œuvre offre une richesse de lectures toutes plus symboliques les unes que les autres. La plus évidente : le yin et le yang, thématique lisible à différents niveaux. D’abord à travers les deux personnages principaux : Blanc, le yang de Noir, oppose sa candeur et son innocence à l’impatience et la violence de l’autre. Puis chez les yakuzas se dessine un affrontement entre l’ancienne génération, traditionnelle et hiérarchisée, et la nouvelle, ambitieuse et avide de profits. Amer béton incite à l’équilibre et à la complémentarité du yin et du yang, et ce à l’échelle de l’individu. Noir doit se battre contre ses démons intérieurs. Blanc réalise qu’il doit se teindre de pragmatisme et atténuer son penchant pour l’onirisme afin de préserver Noir.

La beauté de ce qui nous échappe
Il a fallu plus de trois ans à Michael Arias pour réaliser cette adaptation qui allie le travail du dessin traditionnel à l’aquarelle, la brutalité du crayon gras à l’apport du numérique. De quoi troubler notre notion de l’espace, lorsque les Chats sont en action entre graphisme du dessin animé et un univers urbain numérisé. Blanc et Noir sont orphelins et vivent dans la rue, ils ne possèdent rien, pas même la conscience du temps. Malgré le nombre important de montres que possède Blanc, il ne sait pourtant pas lire l’heure. Au moment où Noir croit posséder la ville, – « Ma ville ! » -, les ennuis commencent. Un peu comme si son illusion causait sa perte.

Rat, le chef yakuza qui pensait régner sans encombre, maîtrisant sa vie et les siens, finit par perdre la sienne, par l’un des siens. Les rêves de Blanc sont proches de l’abstrait, échappent à notre compréhension. Un refuge où il y trouve la beauté qui manque à sa vie.

Amer béton nous entraîne dans une fresque citadine doucement moralisante ; presque convaincante. L’équilibre du goût pour la vie, la paix et la recherche d’un bonheur paisible se feraient à travers un regard impressionniste, décollé du béton et de l’amertume.

Josselin Rabiller pour Preview
en partenariat avec La Kinopithèque pour la 34e édition du Festival des 3 Continents