L'hostilité de l'Eglise à l'encontre du mariage pour tous a été telle qu'elle a déclenché des dérapages jusque dans les plus
hautes sphères de l'institution.
Depuis lundi, l'Eglise s'est découvert d'autres chats à fouetter. La ministre du Logement Cécile Dufflot s'est inquiétée de
la mise à disposition de logements et bâtiments vacants de l'institution pour héberger des sans-abris à l'approche du grand froid.
Fichtre ! Finalement, l'Eglise n'aime pas que la Politique s'occupe d'elle.
Nul n'a besoin d'être convaincu de la crise du logement: 47.000 ménages prioritaires au titre du droit au logement opposable
(Dalo) en attente de logement toit; 1,7 million de familles en attente de logement social; et toujours un décès par jour parmi les 150.000 SDF que compte la France... Aussi, la ministre est-elle
attendue au tournant.
« L'Église fait partie des personnes morales... dans tous les sens du terme ! J'ai bon
espoir qu'il n'y ait pas besoin de faire preuve d'autorité. Je ne comprendrais pas que l' Église ne partage pas nos objectifs de solidarité » affirme la ministre. Et de préciser: « Toutes les personnes
morales --les banques, les assurances, l'Eglise-- qui sont en situation de posséder des bâtiments qui sont inoccupés, sont concernés par l'appel qui est le mien de mettre à disposition des lieux
qui permettront de loger des familles ».
Divers hiérarques ont exprimé leur indignation qu'on puisse douter que leurs meilleurs efforts n'étaient pas déjà entrepris
pour soulager cette misère. Quelques médias
conservateurs ont surfé sur la vague, et la droite UMPiste et Rumpiste a joué l'indignation facile... mais incompréhensible. En filigranes, l'Eglise s'agace d'une telle intervention du
Politique dans son pré carré.
« L'Eglise n'a pas attendu 2012 et les appels de Mme Duflot pour s'occuper des pauvres, elle le fait depuis 2000 ans.»
Charles Gazeau, délégué épiscopal aux solidarités.
« Pourquoi Cécile Duflot ne commence-t-elle pas par donner son bureau aux pauvres ?»
Monseigneur Dubost, évêque d'Evry.
Ces réactions sont
consternantes.
Du côté de certaines associations, le message de la ministre a bel et bien été entendu. Pour preuve, le soutien du Secours
Catholique, par le biais de Victoire Lecoeur qui déclare: « la réquisition serait un symbole fort, de la part de l'Etat, de sa volonté de d'aider les personnes en grande difficulté.» Le
DAL est satisfait. Mais la fondation Abbé Pierre a préféré
pointer du doigt sur les responsabilités de l'Etat.
L'affaire est en fait sorti du Canard Enchaîné. Il y a 15 jours, l'hebdomadaire satirique avait détaillé
quelques unes de ces propriétés qui rendraient bien service à la cause de l'hébergement d'urgence. A Paris, ces bâtiments habitables se trouvaient notamment rue Gay-Lussac, rue
Notre-Dame-des-Champs, rue du Regard, ou rue de Picpus. Des logements vacants ou faiblement occupés, comme le précisait le journal, témoignages et réactions à l'appui.
On espère que le bras de fer tournera à l'avantage de cette dernière. L'Eglise s'est autorisée, avec une charge médiatique d'une rare violence, à intervenir dans le débat sur le mariage civil
pour tous. Ses arguments sont connus même si les laïcs ne cessent d'être surpris que les institutions religieuses du XXIeme siècle s'acharnent sur une célébration qui ne concernent pas la
leur. Après tout, elles avaient bien toléré le divorce et ses récentes facilités (la rupture à l'amiable).
Bref, l'Eglise est entrée dans le débat politique, et il n'est pas sûr qu'elle y est tant à y gagner. Soupçonnée d'être
"societalement rétrograde", la voici accusée d'égoïsme immobilier...
Joyeux Noël !
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